(Washington) Deux élus démocrates du Tennessee, qui avaient manifesté il y a une semaine pour un meilleur encadrement des armes à feu après une tuerie dans une école, ont été exclus jeudi de la Chambre des représentants de cet État américain, à majorité républicaine.

Les élus ont voté en faveur de l’exclusion de Justin Jones et Justin Pearson, qui avaient rejoint le 30 mars des centaines de manifestants dans l’enceinte du parlement, réclamant une régulation plus stricte des armes à feu quelques jours après une tuerie dans une école chrétienne de Nashville, la capitale de cet État du sud, au cours de laquelle six personnes ont perdu la vie, dont trois enfants.

Une troisième élue démocrate, Gloria Johnson, elle aussi menacée d’exclusion pour les mêmes raisons, est parvenue à garder son siège.

Les protestataires étaient entrés dans le Capitole du Tennessee pour interpeller les élus locaux réunis en session. « Qu’est-ce que nous voulons ? Des régulations sur les armes ! Quand est-ce que nous le voulons ? Maintenant ! », avaient-ils scandé dans les couloirs.

MM. Jones et Pearson avaient notamment utilisé un mégaphone pour inviter les manifestants à crier des slogans tels que « Le pouvoir au peuple » et « Pas d’action, pas de paix », selon plusieurs médias américains.

PHOTO KEVIN WURM, REUTERS

Justin Pearson

« Un élu qui a exprimé son opposition peut être exclu, c’est du jamais-vu au Tennessee. Ce n’est jamais arrivé dans notre histoire », a réagi Justin Jones à la télévision américaine.

« Ce que le pays voit, c’est que nous n’avons pas de démocratie au Tennessee », a-t-il poursuivi. « Je vais continuer à les tenir pour responsables de leurs actions […] Il ne s’agit pas seulement de moi, mais aussi d’essayer de réduire au silence et d’exclure le mouvement que nous essayons de porter. »

Une telle mesure est extrêmement rare aux États-Unis. Le parlement du Tennessee n’avait exclu jusque-là, au cours de son histoire moderne, que deux élus, en 1980 et 2016.

Le 28 mars, Audrey Hale, 28 ans, avait forcé l’entrée d’une école primaire chrétienne, la « Covenant School », avec deux fusils d’assaut et un pistolet, semant la mort avant que la police ne l’abatte.

Le drame, dont le mobile reste inconnu, a suscité un vif émoi et relancé le débat sur la circulation des armes à feu aux États-Unis, où elles représentent la première cause de mortalité pour les mineurs.

« L’exclusion d’aujourd’hui d’élus qui ont participé à une manifestation pacifique est choquante, antidémocratique et sans précédent », a fustigé le président américain Joe Biden dans un communiqué jeudi soir.  

« Au lieu de débattre des mérites de la question, ces élus républicains ont choisi de punir, réduire au silence et exclure des représentants élus par la population du Tennessee », a-t-il ajouté, appelant de nouveau le Congrès américain à interdire les fusils d’assaut.  

Il est néanmoins très peu probable que l’appel du président soit entendu : les conservateurs, fervents défenseurs du droit constitutionnel à avoir des armes, s’opposent en effet à tout durcissement législatif notable au niveau fédéral.