Au moins 169 candidats républicains niant la légitimé de la victoire de Joe Biden en 2020 ont remporté leurs élections mardi. Une radicalisation des actions du parti de droite est à envisager, affirment des analystes.

Au lendemain des élections de mi-mandat, les démocrates ont sauvé les meubles et poussent un soupir de soulagement : la « vague rouge » n’a pas eu lieu.

Un répit qui pourrait être de courte durée.

« Au bout du compte, on semble se diriger vers une perte de la Chambre des représentants pour les démocrates, explique en entrevue John Fea, professeur d’histoire des États-Unis au Messiah College, en Pennsylvanie. Lorsque janvier arrivera et que les élus prêteront serment, cela va changer la face du pouvoir à Washington. »

Élément avec lequel l’administration Biden devra composer : au moins 169 candidats républicains niant la légitimé de la victoire de Joe Biden en 2020 ont remporté leurs élections mardi.

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Liz Cheney, représentante républicaine du Wyoming

« Des républicains relativement modérés comme Liz Cheney ne sont plus là, et des gens plus pro-Trump ont pris leur place. Et donc oui, Trump n’a pas eu la victoire qu’il voulait mardi, mais son style de politique et les politiciens qui l’adoptent ne vont pas disparaître, bien au contraire. »

Forts d’une éventuelle majorité à la Chambre, les républicains vont essayer de faire la vie dure au président. « Ce n’est pas une prédiction, mais je ne serais pas étonné si les républicains se penchaient sur la destitution de Joe Biden, tout simplement comme revanche pour les procès en destitution de Trump », dit M. Fea.

Le « grand mensonge »

Le philosophe Michael LaBossiere, spécialiste des théories de la connaissance de la Florida A&M University, note qu’historiquement, le parti du président en exercice obtient de mauvais résultats lors des élections de mi-mandat. De plus, cette année, les républicains avaient de nombreux avantages, comme la faible popularité de Joe Biden et l’inflation élevée qui ronge le pouvoir d’achat des ménages.

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L’ancien président Donald Trump et sa femme Melania quittant mardi un bureau de vote de Palm Beach, en Floride

Or, le fait que les républicains n’aient pas fait table rase semble montrer que la stratégie d’embrasser le « grand mensonge » de Trump n’était pas la meilleure, dit-il.

Les candidats prêts à appuyer et à relayer le mensonge électoral de Trump étaient souvent des candidats de piètre qualité. Si le mensonge les a aidés à gagner leurs primaires, il a peut-être transformé la vague rouge annoncée en une marée rouge décevante.

Le philosophe Michael LaBossiere, spécialiste des théories de la connaissance de la Florida A&M University

Rafael Jacob, chercheur postdoctoral à la Chaire Raoul-Dandurand de l’UQAM et auteur du livre 2020 : L’Amérique au bord du gouffre, croit que, malgré l’échec de la « vague rouge », les républicains n’ont sans doute pas fini de nier la légitimité de Joe Biden, tout simplement parce que c’est désormais dans l’ADN du parti.

« La grande majorité des gens qui croient le mensonge de Donald Trump, de même que les gens qui étaient au Capitole le 6 janvier 2021, ne s’expriment pas comme des gens qui veulent renverser la démocratie, mais bien comme des gens qui veulent sauver la démocratie, analyste-t-il. En ce sens, ils ne vont pas décider de changer de point de vue. »

Devant leur échec à massivement s’imposer aux élections de mi-mandat, les républicains devront voir s’ils veulent continuer de suivre Trump, ou si des politiciens comme le gouverneur Ron DeSantis, qui a été réélu avec une forte marge mardi, deviendront leur choix numéro un.

« Mais est-ce ce que le noyau dur pro-Trump va faire un examen de conscience ? Ça, non, je n’y crois pas », dit-il.

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    Proportion d’électeurs américains aux élections de mi-mandat qui ont estimé que la démocratie était « assez ou très menacée » au pays
    Source : Edison Research, 2022