(Pékin) Li Qiang, considéré comme l’un des hommes de confiance les plus proches de Xi Jinping, est devenu samedi le nouveau premier ministre chinois, quelques mois après avoir été propulsé au rang de numéro deux du Parti communiste (PCC).

Au congrès du PCC en octobre, celui qui était alors le responsable du parti à Shanghai avait éclipsé deux autres candidats aux compétences jugées plus traditionnelles pour ce poste, dans un geste fort témoignant du placement par Xi Jinping de ses alliés au Comité permanent, le plus haut échelon du pouvoir.

La probabilité que Li Qiang, 63 ans, obtienne une fonction aussi élevée semblait pourtant compromise après sa gestion chaotique d’un confinement de deux mois à Shanghai l’an dernier, durant lequel les 25 millions d’habitants de la ville avaient connu des difficultés d’approvisionnement en nourriture et en soins médicaux essentiels.

« S’il fallait une preuve [montrant] que la loyauté l’emporte sur la méritocratie dans la Chine de Xi Jinping, la promotion de Li Qiang en est une », estime Richard McGregor de l’institut Lowy de Sydney, en Australie.

« Li est peut-être suffisamment compétent et peut faire un bon premier ministre, mais il est difficile de comprendre comment il en est arrivé là autrement que par les faveurs personnelles de Xi », ajoute-t-il.

Dans son pays, Li Qiang véhicule l’image d’un dirigeant facile d’approche, comme en témoigne Hu Shuli, fondateur du média économique Caixin, qui l’a décrit comme « discret et pragmatique » après une interview en 2013 quand il était gouverneur de la province du Zhejiang (est).

Il est « particulièrement doué pour écouter et intégrer les points de vue de toutes les parties au moment de prendre des décisions », avait également déclaré un de ses collègues, dans le Zhejiang, à un média local en 2016.

« Favorable aux entreprises »

Même s’il n’est pas inhabituel qu’un ancien chef du parti à Shanghai soit promu à un échelon élevé du parti, Li Qiang ne dispose d’aucune expérience au niveau du gouvernement central, contrairement à la quasi-totalité des ex-premiers ministres.

Il a cependant accompli un parcours riche au sein de l’administration locale : Li Qiang a endossé d’importantes fonctions de direction dans les riches provinces côtières du Zhejiang (est) et du Jiangsu (est).

Fait décisif, il était le chef de cabinet de Xi Jinping lorsque celui-ci était à la tête du parti dans le Zhejiang entre 2004 et 2007.

Ses promotions rapides depuis reflètent le haut niveau de confiance que lui accorde Xi Jinping.

Li Qiang a été parachuté en 2016 dans le Jiangsu par le président chinois, après qu’une affaire de corruption a conduit à la chute de plusieurs responsables provinciaux. Il est devenu l’année suivante secrétaire du parti à Shanghai.

Le premier ministre chinois est à la tête du Conseil d’État, souvent décrit comme le gouvernement chinois. Sa fonction est traditionnellement associée à la gestion quotidienne du pays et à la conduite de la politique macroéconomique.

« (M. Li) était vu comme un responsable local favorable aux entreprises mais on peut se demander si ces compétences se prêteront bien à la supervision de la [gestion] macroéconomique et aux politiques de régulation (menées) en tant que premier ministre », s’interroge Neil Thomas, spécialiste de la Chine chez Eurasia Group.

Ralentissement économique

Li Qiang prend ses fonctions à un moment où la deuxième plus grande économie du monde fait face à un net ralentissement, affaiblie par près de trois ans d’une inflexible politique dite du « zéro COVID-19 ».

Pour 2023, le gouvernement se fixe un objectif de croissance du PIB d’« environ 5 % », l’un des plus faibles depuis des décennies.

Selon certains analystes, la nomination de Li Qiang devrait permettre à Xi Jinping de faire passer un programme économique conservateur.

Le premier ministre sortant, Li Keqiang, un économiste de formation, avait vu ses projets de réformes économiques entravés par l’autorité grandissante de Xi Jinping.

Pour Steve Tsang, de l’institut SOAS China à l’Université de Londres, même si Li Qiang est un « lieutenant de confiance » du président, il ne pourra pas faire comme bon lui semble.  

« Xi Jinping va donner à Li Qiang plus de marge de manœuvre [qu’à Li Keqiang] pour diriger le Conseil d’État », estime M. Tsang.

« À condition que Li Qiang fasse ce que Xi veut, sans dépasser le périmètre fixé ».