L'hospitalité britannique n'a plus sa place dans le métro bondé de Londres. L'enfer de l'heure de pointe transforme les usagers en brutes qui refusent de céder leur siège à une femme enceinte ou une personne âgée, indique une étude publiée cette semaine. Dans la foulée, notre collaboratrice a pris le pouls des passagers du plus vieux métro du monde.

Jeudi, 18h10, station King's Cross. De jeunes parents attendent le prochain service de la ligne Northern avec leur poupon. La mère bécote le bébé de 3 mois pendant que son conjoint range la poussette contre le mur.

 

«Tous les gens dans le métro sont bêtes avec nous, confie Carl Attard, 19 ans. Ils ne nous aident pas à monter les escaliers. Ils ne nous laissent pas de place pour circuler. C'est l'enfer.»

Loin de faire des sourires au petit Reco, les passagers dans les wagons rouspètent. «Ils grognent ou soupirent parce que la poussette prend trop de place à leur goût», explique Lisa Attard.

Même écho du côté d'une femme enceinte de 20 semaines. «Pas une personne ne m'a encore offert son siège», dit Suzi Morris.

La loi de la jungle s'est installée dans le plus vieux métro du monde, confirme une étude publiée cette semaine par la mairie de Londres.

À couper au couteau

Wagons pleins à craquer, pannes, interruptions de service: un trajet à l'heure de pointe est une expérience quotidienne éprouvante pour 3,5 millions de Londoniens. Environ 80% se disent affectés par le surpeuplement du réseau. Sur certaines lignes, la densité est telle que quatre personnes occupent un espace d'un mètre carré, révèle la recherche.

La moitié des passagers laissent passer un ou deux trains avant de monter à bord.

La situation n'est pas sécuritaire, selon un employé de la station Kentish Town. «Chaque année, ça empire, dit Gerry Day, 28 ans. Le métro est toujours plus fréquenté. Le matin, la tension est à couper au couteau. Il y a juste trop de monde.»

Résultat, l'hospitalité se fait rare. Les femmes enceintes, les personnes âgées et les voyageurs à mobilité réduite n'ont plus priorité, constate le rapport.

Fracture du crâne

Le contraire est plutôt la norme, à en croire les histoires rapportées dans la presse.

En novembre 2008, un vieil homme en détresse a été enjambé par des douzaines d'usagers. Ernest Griffiths, 81 ans, s'était fracturé le crâne en tombant à la station Holborn. De longues minutes se sont écoulées avant qu'une étudiante en médecine lui porte secours. Il est mort plus tard à l'hôpital.

Le personnel du métro ne prêche pas d'exemple. La crise de rage d'un employé contre un homme âgé, dont le bras s'était coincé entre les portes d'un wagon, a fait les manchettes en octobre après s'être retrouvée sur YouTube.

L'agence de transport de Londres, Transport for London, a rappelé qu'elle investissait à coup de milliards pour augmenter la capacité du métro de 30% d'ici 2018. Elle planifie «plus de trains, des trajets plus rapides et des stations élargies», a expliqué un porte-parole à The Guardian.

L'agence et le gouvernement britannique mettent les bouchées doubles pour que le métro puisse accueillir les spectateurs des Jeux olympiques de 2012.