Autrefois étroitement impliqués auprès des producteurs de fèves de cacao en Côte d’Ivoire, Lydie et Gogbeu Ouehi n’auraient pas cru en quittant leur pays, en 2007, qu’ils se retrouveraient une douzaine d’années plus tard artisans-chocolatiers, à l’autre bout de la chaîne d’approvisionnement. Coup d’œil à Amango Cacao et à sa gamme de chocolats aussi originaux qu’éthiques.

« On avait toujours eu à cœur de se lancer en affaires un jour, mais on ne savait pas trop dans quel domaine au départ, reconnaît Lydie Ouehi. Mais on n’aurait pas pensé démarrer une chocolaterie ! »

Le déclic s’est fait en constatant que certains chocolatiers québécois avaient décidé d’acheter des plantations de cacao pour assurer un approvisionnement éthique de fèves.

« En Côte d’Ivoire, je travaillais pour la seule entreprise locale qui exportait le cacao et notre objectif était de sécuriser les prix du marché local, explique Mme Ouehi. Mon mari était quant à lui représentant dans l’une des plus grosses coopératives de cacao, qui regroupait quelque 3000 membres ; il allait négocier le volume de vente pour que les producteurs puissent avoir de bons prix d’exportation. »

Fuir l’instabilité

C’est l’instabilité politique dans le pays d’Afrique occidentale qui a forcé le couple à émigrer au Québec, justement en raison d’un effondrement des prix du cacao qui a entraîné plusieurs producteurs à se tourner vers d’autres cultures, notamment l’hévéa pour produire du caoutchouc.

« Quand on est arrivés ici, on a fait comme tous les immigrants et on s’est reconvertis : j’ai un bac en gestion et mon mari a aussi suivi des cours en administration, nous raconte Lydie Ouehi. Mais pendant tout ce temps, on a toujours conservé le lien avec les producteurs. On a vécu avec eux, ce sont comme nos amis. »

Il n’était donc pas question de créer une plantation, on voulait plutôt aider, avoir un impact sur les producteurs existants et leur offrir un traitement équitable et profitable. C’est donc un peu comme ça que le projet s’est déclenché.

Lydie Ouehi

À la suite de la création de l’entreprise en 2018, Gogbeu est retourné à quelques occasions en Afrique pour assurer l’approvisionnement de fèves de cacao, mais aussi des autres ingrédients qui font le secret des chocolats Amango Cacao.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Le chocolat d'Amango Cacao est entièrement fabriqué en atelier à Montréal à partir de fèves importées d'Afrique. « Celles de Tanzanie ont un goût de citron avec une touche florale, elles offrent une belle longueur en bouche, même dans du chocolat noir concentré à 85 % de cacao, explique la copropriétaire, Lydie Ouehi. Quant aux fèves de la Côte d’Ivoire, elles donnent un chocolat au goût plus corsé avec de légers accents de noix. »

En effet, plusieurs des chocolats créés par le couple Ouehi contiennent tantôt de la mangue, tantôt de l’extrait du fruit du baobab. « On veut que les gens goûtent à des chocolats qui ont des goûts originaux, mais aussi qui offrent de bonnes valeurs nutritives, explique la chocolatière. Le baobab est riche en fibres, la mangue est une excellente source d’antioxydants, c’est pourquoi on les a choisis. Notre tablette à la mangue est d’ailleurs notre gros vendeur. » Suivie de la tablette à l’érable, parce que Amango s’approvisionne aussi auprès de producteurs québécois.

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Au-delà de leur goût original rehaussé de mangue, de baobab, d'érable ou de bleuets, les chocolats Amango Cacao se caractérisent par le fait qu'ils sont entièrement véganes et sans ingrédients allergènes.

C’est en développant une recette de praliné et de chocolat au lait végane que Lydie a choisi d’intégrer le baobab dans ses recettes. Privilégiant les ingrédients non allergènes, elle s’est tournée vers le lait de coco, mais voulait aussi donner une saveur unique à ses lapins de Pâques. Le petit côté acidulé qu’amène le baobab a en effet été apprécié au sein de notre petit groupe de testeurs, y compris par les enfants.

« Étant donné que l’on faisait jusqu’à tout récemment seulement du chocolat noir, on s’est dit qu’ajouter du baobab pouvait être un argument, notamment pour convaincre les gens qui disent que le chocolat blanc n’est pas du vrai chocolat », soutient Lydie Ouehi.

Poursuivre l’expansion

Depuis l’ouverture de l’atelier de la rue Masson, à Montréal, Amango Cacao s’est bâti une clientèle surtout grâce au bouche à oreille, notamment en faisant goûter ses chocolats dans les marchés publics de la grande région métropolitaine. « Le contact direct avec les gens nous a beaucoup aidés, affirme la jeune entrepreneuse qui reconnaît avoir appris sur le tas. Les Québécois sont habitués au chocolat, ils sont capables de faire la différence entre un bon produit et un autre de mauvaise qualité. Mais la réponse nous a surpris. Les gens sont intrigués, ils veulent goûter à notre chocolat blanc végane, à notre tablette à la mangue et à notre lapin origami au baobab, c’est différent. »

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La boutique Amango Cacao, dans le quartier montréalais de Rosemont, devrait pouvoir être agrandie quand l'atelier adjacent sera déménagé afin de mieux répondre à la demande croissante.

On peut maintenant retrouver les chocolats Amango Cacao dans une vingtaine de points de vente à Montréal et aux alentours. Aussi, Lydie et Gogbeu Ouehi nous confient qu’ils vont déménager leur atelier d’ici la fin de l’année afin d’accroître leur production. D’ici là, ils comptent incessamment engager un premier employé, en plus d’en ajouter un autre à l’été.

Tout ça sans compter l’effet bénéfique sur les producteurs en Afrique. « Plus on grossit, plus les gens ont le goût de travailler avec nous, nous dit Lydie Ouehi. On espère que d’ici les cinq prochaines années, on pourra avoir un impact sur 5000 producteurs en Côte d’Ivoire. »

> Consultez le site d’Amango Cacao