Les chasseurs de phoque canadiens ont crié  victoire jeudi, affirmant avoir obtenu en justice la suspension de l'embargo de l'UE sur les produits dérivés du mammifère marin, mais l'Union européenne (UE) les a contredits, confirmant son entrée en vigueur vendredi comme prévu.

L'embargo entrera bien en vigueur vendredi, a affirmé une porte-parole de la Commission européenne, Maria Kokkonen.

La principale organisation inuit participant à la bataille judiciaire, Inuit Tapiriit Kanatami (ITK), a refusé de commenter cette déclaration, affirmant attendre un communiqué officiel de Bruxelles.

Cette organisation avait publié plus tôt dans la journée, sur son site internet, un document présenté comme une décision de la Cour européenne de justice (CEJ) suspendant l'interdiction du commerce des produits du phoque.

«L'application des conditions limitant la mise sur le marché des produits dérivés du phoque (...) est suspendue, en ce qui concerne les plaignants, jusqu'à l'adoption d'un ordre mettant fin à la présente procédure de référé», est-il indiqué sur ledit document mis en ligne par ITK.

L'embargo de l'UE, décidé en juillet 2009 sous la pression de défenseurs des animaux, dont Brigitte Bardot, qui dénonçaient la «cruauté» des chasseurs, avait été contesté auprès de la CEJ par ITK, et une quinzaine d'autres plaignants.

La plupart des plaignants représentent les Inuits, un peuple autochtone des régions arctiques, mais certains sont des sociétés de commercialisation de produits dérivés du phoque, tel le Groupe canadien de mise en marché du phoque, l'Institut de la Fourrure du Canada, ou le groupe norvégien GC Rieber Skinn AS. Une association basée au Groenland, la Conférence circumpolaire inuit (ICC), en fait également partie.

Le gouvernement canadien, qui a toujours soutenu les chasseurs et combattu l'embargo, s'est réjoui de ce «développement positif».

«Les cours européennes ont conclu que les Inuits avaient le droit d'être entendus et le statu quo sera maintenu jusqu'à ce qu'on leur accorde cette audience», a dit la ministre des Pêches, Gail Shea, lors d'un point de presse à Saint-Jean de Terre-Neuve.

De son côté, Ottawa continuera son combat à l'OMC contre l'embargo. Il demandera à l'Organisation mondiale du commerce de mettre en place un groupe spécial pour régler le différend, les premières consultations tenues en décembre dernier n'ayant pas abouti, a précisé la ministre.

Quant aux Inuits, ils paraissent décidés à repartir à l'attaque. «À nos yeux, l'embargo sur le phoque est à la fois illégal et immoral», a déclaré Mary Simon, présidente d'ITK, dans un communiqué, avant d'espérer que «le Parlement européen jugera approprié de faire ce qui est juste et de retirer cette loi».

En fait, l'embargo européen contient une clause autorisant la vente «à des fins non lucratives» des produits provenant de la chasse traditionnelle pratiquée par les communautés inuites.

Mais pour les autochtones, ce n'est qu'un leurre, les acheteurs européens n'entrant pas dans des distinctions délicates et ne voulant pas risquer d'aller à l'encontre d'une décision de l'UE.

Les eaux canadiennes comptaient en 2009 quelque 5,6 millions de phoques du Groenland    -l'espèce qui constitue le gros de la chasse commerciale- contre près de deux millions au début des années 1970.

Selon Ottawa, 6000 Canadiens pratiquent cette chasse qui devait leur rapporter environ 10 millions de dollars, selon les chiffres du gouvernement, dont 25% venant de leurs ventes en Europe.