Les meilleures performances du Canadien lors des dernières années n'ont pas eu lieu sur la glace du Centre Bell, mais dans le reste de l'édifice.

L'équipe ne l'a pas crié sur les toits, mais elle s'est imposé un virage environnemental draconien qui a fait du Centre Bell un leader dans la LNH.

Qu'il s'agisse de recyclage, de compostage ou de réduction des gaz à effet de serre, le domicile du Tricolore a fait des progrès en un temps record.

«Durant le lock-out, on a eu plusieurs réunions préparant le Centenaire qui portaient sur le legs, sur ce qui allait rester», a expliqué Pierre Boivin à La Presse.

«On voulait que l'édifice lui-même fasse sa marque. Autour de la table, ce sont les plus jeunes qui ont demandé si le Centre Bell était vraiment axé sur l'environnement.

«On s'est tous regardés et on est devenus rouge de honte. On ne recyclait à peu près rien.»

C'est ainsi qu'est né le programme «Vert le but», qui s'est donné pour objectif d'obtenir trois certifications en environnement et développement durable pour l'année du Centenaire, dont la fameuse certification LEED.

«On a demandé à Xavier Luydlin (le directeur de l'exploitation du Centre Bell) de nous revenir avec un projet ambitieux, quelque chose qui nous ferait peur, raconte M. Boivin. En trois ans, on n'avait pas le temps d'y aller graduellement.»

Un Mont-Royal de plastique

Avant que «Vers le but» ne soit mis en branle, 25% des déchets du Centre Bell étaient recyclés. C'est aujourd'hui 85%, soit une augmentation équivalente à 1000 tonnes de déchets par année.

De plus, le Canadien composte entre 25% et 30% de ses déchets.

«Le verre de bière est l'exemple le plus flagrant, note le président de l'équipe. La pire sorte de plastique biodégradable prend 1000 ans à se décomposer alors que la meilleure et la plus chère -celle qu'on utilise-  prend trois mois. Quand on pense à la quantité de verres de bière que l'on sert chaque soir depuis 15 ans, c'est des montagnes de verres. C'est un Mont-Royal de plastique!»

Afin d'en arriver à 80% de recyclage, il a fallu que le CH incite ses fournisseurs à emboîter le pas. «On a dû refaire toute notre chaîne d'approvisionnement, depuis la nourriture jusqu'aux produits nettoyants, affirme M. Boivin. On a forcé nos fournisseurs à atteindre eux aussi 80% de matières recyclables dans leurs produits. On leur a dit qu'ils avaient deux ans pour s'y conformer, sans quoi ils perdraient le contrat.

«Ce n'est pas seulement ce que nous réussissons à faire. C'est aussi l'effet domino qui incite tout le monde autour à devenir meilleur.»

90 000 repas donnés

Le recyclage au Centre Bell ne se limite pas aux 945 bacs verts qu'on voit un peu partout. C'est aussi la récupération des excédents de nourriture provenant des concessions. Pas moins de 40 000 repas sont envoyés à la Maison du Père chaque année. «Et là où l'on a vraiment innové, c'est en récupérant la nourriture des loges, là où il y en a toujours trop, ajoute Pierre Boivin. Ça m'écoeurait de voir la quantité de bouffe que l'on jetait.»

Jean-François Archambault, créateur de la Tablée des chefs, a utilisé le Centre Bell pour parfaire son projet de redistribution alimentaire. Sous son impulsion, le Canadien a fait en sorte que les excédents de nourriture des loges se transforment en 50 000 repas de plus par année destinés aux sans-abri.

Une empreinte moins forte

Pierre Boivin soupçonne qu'il sera difficile pour le Centre Bell d'aller plus loin en termes de recyclage. C'est surtout en sauvegarde d'énergie que l'amphithéâtre va aller plus loin.

Le Centre Bell a déjà diminué de 28% son empreinte de gaz à effet de serre. Et il compte améliorer son rendement cette année en installant 1000 filtres réutilisables dans le système d'aération, et en remplaçant le chauffage au gaz naturel par un système à base d'eau chaude qui réduira de 1524 tonnes par année ses émissions de gaz à effet de serre.

Au terme de ces initiatives, Xavier Luydlin estime que le Centre Bell aura diminué son empreinte GES de près de 50%.

Ce projet de «plusieurs millions» permettra un jour au Canadien d'épargner quelques centaines de milliers de dollars par année.

Mais ce n'est pas là le but de l'affaire, soutient M. Boivin. «Ça fait partie de la mission sociale de l'entreprise d'être prudent au niveau environnemental, dit-il. Si l'on n'avait rien fait, on se serait mis à nous le reprocher avant longtemps. Ç'aurait été un manque de respect envers nos partisans.»