Le ministre Norman MacMillan reconnaît qu'un organisateur libéral a fait des argumentations auprès de lui pour que son fils soit nommé juge en 2003. Il admet même avoir discuté avec le ministre de la Justice de l'époque, Marc Bellemare, de cette candidature, que le gouvernement a retenue peu de temps après.

Marc Bisson est l'un des juges nommés à la Cour du Québec sous le court règne de Me Bellemare à la Justice, d'avril 2003 à avril 2004. Son père, Guy Bisson, est un organisateur libéral de longue date en Outaouais.En entrevue à Radio-Canada, Guy Bisson a dit avoir parlé avec Norman MacMillan, député dans l'Outaouais (Papineau), pour que son fils accède à la magistrature en 2003. M. MacMillan était à l'époque président du caucus des députés libéraux. Il assistait à ce titre aux réunions du Conseil des ministres, qui nomme les juges à la suite d'une recommandation du titulaire de la Justice.

«Oui, M. Bisson lui a parlé pour dire que son fils allait postuler pour devenir juge. Il l'a fait parce que ce sont des amis. Je ne peux pas dire s'il y a eu autre chose», a dit à La Presse l'attaché de presse de M. MacMillan, Dany Hubert.

Norman MacMillan a rappelé à M. Bisson «le processus qui existe» concernant la nomination des magistrats, a-t-il ajouté. Mais selon la version de Guy Bisson, M. MacMillan lui «a dit que ce serait le temps qu'il y ait des procureurs de la Couronne qui soient nommés juges parce qu'il est spécialiste en criminel».

À la suite des argumentations de M. Bisson, Norman MacMillan a discuté de la candidature avec Marc Bellemare. «Il lui en a parlé comme collègue, pour lui dire qu'il y avait quelqu'un dans sa région qui passait les tests», a affirmé Dany Hubert. Ce n'est pas une forme de pression, selon l'attaché de presse. «Tu sais comment ça marche» pour devenir juge, «il faut passer par un comité de sélection», a-t-il dit.

Marc Bellemare a annoncé la nomination de Marc Bisson comme juge de la Cour du Québec à Longueuil le 27 novembre 2003. M. Bisson occupait jusque-là le poste de substitut en chef adjoint du procureur général à Hull.

Selon le Règlement sur la procédure de sélection des personnes aptes à être nommées juges, un comité étudie les candidatures soumises à la suite d'un appel lancé par le ministre de la Justice. Ce comité de sélection est composé de trois membres nommés par le ministre: un magistrat (recommandé par le juge en chef), un avocat (proposé par le Barreau du Québec) et une personne qui n'occupe aucune de ces deux fonctions. Il évalue notamment les «qualités personnelles et intellectuelles» du candidat ainsi que son expérience. Le comité remet un rapport sur les candidats «jugés aptes» à devenir juges. Le ministre fait une recommandation au Conseil des ministres, qui fait finalement la nomination.

Ministre délégué aux Transports depuis le 18 décembre 2008, Norman MacMillan a plongé son gouvernement dans l'embarras en décembre dernier en révélant que chaque ministre, y compris le premier ministre, doit recueillir chaque année 100 000$ en dons pour le parti. Il a alors ajouté que les dons d'entreprises sont légaux, que son parti ne peut les refuser. «Il y a une loi qui gère tout ça. On ne peut pas empêcher une compagnie X de donner 3000$ au Parti libéral», a-t-il dit. Or, en vertu de la loi électorale, seul un électeur peut verser une contribution. Le maximum permis est de 3000$ par année. Le Directeur général des élections mène toujours des vérifications au sujet de ces déclarations.

Une poursuite de 700 000$

Jean Charest met ses menaces à exécution. Il lance une poursuite de 700 000$ en dommages et intérêts contre son ancien ministre de la Justice Marc Bellemare. S'il gagne sa cause, le premier ministre entend donner l'argent à une oeuvre de charité. Marc Bellemare a manifesté l'intention, mercredi, de prendre contact avec la Sûreté du Québec pour faire une déposition. - Tommy Chouinard