Les professionnels et les travailleurs du savoir, en particulier ceux qui n’ont pas encore utilisé l’intelligence artificielle (IA), peuvent être enclins à avoir de fausses idées qui masquent l’ampleur des perturbations à venir.

Certains champs ont déjà sonné l’alarme. Journalistes. Universitaires. Les artistes en particulier sont les canaris de notre mine de charbon collective. D’autres, pas tant.

Lors d’une récente conférence, une panéliste a raconté cette histoire qu’elle avait entendue : imaginez un palais de justice doté de stations IA, où chacun prépare sa défense et où un avocat se tient prêt à aider. De nombreuses personnes présentes dans la salle ont ri. Car qui pourrait imaginer pouvoir remplacer l’expertise d’un avocat par un ordinateur ? Impossible ! Et ils ont raison. Mais les gens qui utiliseraient une station libre-service ne remplaceraient pas un avocat par une défense artificielle. Ils suppléeraient en fait au manque d’accès à la justice avec la possibilité de présenter une défense, aussi imparfaite soit-elle. Cela se produit déjà.

Du point de vue de la société telle qu’elle est aujourd’hui, avec tous ses défauts, ayons le courage de dénoncer certaines des fausses idées autour de l’IA et du travail du savoir.

L’IA pourrait remplacer mon assistant, mais pas moi. Faux. L’IA ne vise pas des tâches banales. Elle est conçue pour surpasser les meilleurs d’entre nous en matière de diagnostic, d’analyse, de synthèse et de recommandations⁠1.

L’IA est trop stupide/fausse pour être utile. C’est une idée trompeuse. L’IA s’améliore à pas de géant. De plus, les erreurs ont plus ou moins d’importance. Ces systèmes sont souvent plus disponibles et moins coûteux qu’un spécialiste⁠2,3.

L’IA me rendra plus efficace et me libérera ainsi pour d’autres tâches. Oui et non. Sur une base individuelle, des gains d’efficacité de 20 % sont considérables. En revanche, dans une profession, ce taux d’efficacité correspond à 20 % moins de pratiquants.

Que pouvons-nous faire, vous et moi, à ce sujet et dans le cadre de nos métiers ? ⁠4

  1. Soyez attentif à ce qui arrive aux autres dans votre domaine.
  2. Impliquez-vous directement dans les politiques autour de l’IA. Vous êtes déjà un ou une spécialiste dans votre domaine d’activité ? C’est suffisant. Découvrez quels types d’utilisation l’IA aura dans votre industrie, ainsi que les dommages qu’elle peut causer. Les outils pour s’impliquer sont nombreux.
  3. Assumez la responsabilité des besoins des personnes que vous servez dans votre métier. Comment pouvez-vous améliorer les résultats pour les personnes et la planète ? Comment pouvez-vous participer à ce que ça aille mieux ? Vous avez un point de vue unique et nous avons tous besoin que vous vous exprimiez.

Je suis militante pour les droits de la personne et la planète, ainsi que spécialiste dans la stratégie et la gestion de petites entreprises. Je m’implique dans la politique de l’IA parce que les effets prévus et planifiés sont majeurs – et encore plus ses effets imprévisibles. C’est bien trop pour qu’une élite les gère seule.

Même si nous pouvons difficilement imaginer arrêter l’avènement des outils d’IA, ils sont conçus par des personnes. La manière dont ils sont utilisés n’est pas une fatalité. On peut prendre en main la direction des développements.

Bien sûr, nous obtiendrons de nos machines intelligentes exactement la qualité de vie quotidienne et professionnelle que nous concevons.

Si vous n’avez pas encore utilisé l’IA dans votre travail, faites-le. Et impliquez-vous. Vous êtes essentiels à la conversation.

1. Lisez « Biggest Losers of AI Boom Are Knowledge Workers, McKinsey Says » (en anglais) 2. Lisez « See why AI like ChatGPT has gotten so good, so fast » (en anglais ; abonnement requis) 3. Lisez « 4 Charts That Show Why AI Progress Is Unlikely to Slow Down » (en anglais) 4. Lisez « Comment influencer les politiques publiques au Québec ? » Qu’en pensez-vous ? Participez au dialogue