La scène se passe dans une assemblée de quartier d’une municipalité québécoise.

PRÉSIDENTE DE L’ASSEMBLÉE : Bonjour, tout le monde ! Bienvenue à la réunion du comité des fêtes de la Saint-Jean-Baptiste de notre quartier.

CITOYEN no 1 : Pardon, Madame la Présidente, mais le Québec étant désormais un État laïque, on ne peut plus dire SAINT-Jean-Baptiste. Le Québec ne peut plus avoir de saint patron. On peut juste avoir des patrons qui ne sont pas des saints, comme François Legault, mettons.

PRÉSIDENTE DE L’ASSEMBLÉE : OK… Alors bienvenue à la réunion du comité des fêtes de la Jean-Baptiste.

CITOYEN no 1 : Baptiste aussi, il faudrait l’enlever. Le baptême, c’est religieux.

PRÉSIDENTE DE L’ASSEMBLÉE : Bon. Donc bienvenue à la réunion du comité des fêtes de la Jean.

CITOYEN no 2 : Je pense qu’il faudrait dire des fêtes du Jean.

CITOYENNE no 3 : On peut dire de la Jean. Il est temps que le féminin l’emporte. De plus, la règle grammaticale, c’est les Jean bons sont de bonnes Jean.

CITOYEN no 2 : La règle, ça ne s’applique pas pour les Jean comme ça. Ça s’applique pour les gens comme dans gens du pays, pas les Jean comme dans Jean Chrétien.

CITOYEN no 1 : Chrétien, c’est pas laïque ! Le Québec est laïque !

CITOYEN no 4 : Vous vous obstinez pour rien. Ça s’appelle même plus la Saint-Jean-Baptiste, ça s’appelle la fête nationale.

CITOYEN no 1 : La fête nationale, c’est trop exclusif. Les gens qui viennent d’ailleurs ne vont pas se sentir concernés.

CITOYEN no 4 : Ben voyons ! Une fête nationale, ça englobe tout le monde. Tous les pays ont une fête nationale.

CITOYEN no 1 : Oui, mais le Québec n’est pas un pays. Donc, il ne peut pas avoir une fête nationale.

CITOYEN no 4 : Ben oui, ici, ça marche de même. On a ce qui va avec avant d’avoir ce qu’il y a. C’est comme à Québec, on a un nouvel aréna, mais on n’a pas d’équipe de hockey. On a la fête nationale, mais on n’a pas la nation.

CITOYENNE no 5 : Je m’excuse, mais le Québec est une nation !

CITOYEN no 4 : C’est quoi, la nation québécoise ?

CITOYENNE no 5 : Ben, c’est nous. Les francophones d’Amérique du Nord.

CITOYEN no 4 : Ça veut dire que les Québécois qui ne parlent pas français, ce n’est pas leur fête nationale puisqu’ils ne font pas partie de la nation québécoise ?

CITOYENNE no 5 : Ben, ils peuvent parler d’autres langues, pourvu qu’ils écoutent du Paul Piché.

CITOYENNE no 6 : Heille, la gang, oubliez la Saint-Jean-Baptiste et la fête nationale, pourquoi on n’appellerait pas ça la fête du Québec ? C’est clair, c’est la fête du Québec. Ça inclut tout le monde qui vit au Québec.

CITOYEN no 2 : J’aime ça.

CITOYENNE no 3 : C’est pas fou.

CITOYEN no 4 : J’adhère à ça, moi, la fête du Québec.

CITOYEN no 1 : Je m’oppose ! Québec est un mot amérindien, c’est de l’appropriation culturelle !

CITOYENNE no 3 : Ben là ! On peut plus dire Québec ?

CITOYENNE no 6 : Le Québec, c’est notre nom. C’est les Français qui nous ont appelés comme ça.

CITOYEN no 1 : Non, Monsieur ! Tout le temps que le Québec a été une colonie française, le Québec ne s’appelait pas le Québec.

CITOYENNE no 6 : Il s’appelait comment ?

CITOYEN no 1 : Il s’appelait le Canada.

CITOYENNE no 7 : Donc, le 24 juin, c’est la fête du Canada ?

CITOYEN no 2 : Non. La fête du Canada, c’est le 1er juillet.

CITOYENNE no 3 : Je résume. On ne peut pas dire la fête de la Saint-Jean-Baptiste, parce qu’on est laïques. On ne peut pas dire la fête nationale, parce qu’on n’est pas un pays. On ne peut pas dire la fête du Québec, parce que c’est de l’appropriation culturelle. Qu’essé qu’on peut dire, d’abord ?

CITOYEN no 8 : La fête du solstice d’été.

CITOYENNE no 7 : La fête du quoi ?

CITOYEN no 8 : La fête du solstice d’été. L’été, c’est à tout le monde.

CITOYEN no 2 : Moi, je pense qu’il y a du monde qui va chialer.

CITOYEN no 8 : Ben non ! Tout le monde aime l’été.

CITOYENNE no 3 : Ça, c’est vrai.

CITOYEN no 1 : La fête du solstice d’été, ça va pas ? Et les Québécois qui vivent en Australie, y avez-vous pensé ? Ils ne pourront pas se sentir concernés, c’est l’hiver là-bas.

CITOYEN no 8 : Ben là, tu exagères !

CITOYEN no 1 : Toé, mon solstice, je pense que tu as pris trop de soleil !

CITOYEN no 8 : Toé, mon laïc, m’a te sonner les cloches !

PRÉSIDENTE DE L’ASSEMBLÉE : À l’ordre, tout le monde ! À l’ordre ! Le temps est écoulé. La réunion est terminée.

CITOYENNE no 6 : Alors, on fait quoi ?

PRÉSIDENTE DE L’ASSEMBLÉE : On fait rien.

CITOYEN no 4 : Ça, c’est parfait. Pour rien faire, on est toujours d’accord.

CITOYENS no 1, no 2, no 3, no 5, no 6, no 7 et no 8 : On est d’accord !

Bonne fête à tous !