(Québec) Le gouvernement Legault a fait preuve de laxisme dans l’implantation du passeport vaccinal, ce qui a ouvert la porte aux fraudeurs, accuse l’opposition. Surtout, il a négligé de resserrer les mesures sécurité alors que des problèmes avaient été décelés et médiatisés dès le départ.

Les trois principaux partis d’opposition sont catastrophés devant la facilité avec laquelle des milliers de passeports vaccinaux frauduleux ont pu être fabriqués comme l’a révélé La Presse jeudi.

Des employés du réseau de la Santé d’un peu partout au Québec ont inscrit à la tonne, contre de l’argent, des faux vaccins dans le registre de vaccination du gouvernement. Il n’y a pas de mesures de sécurité suffisantes pour entrer dans le système informatique, ne serait-ce que des noms d’usager et des mots de passe solides, a-t-on constaté.

Or ce n’est pas la première fois que la sécurité autour du passeport vaccinal soulève l’inquiétude. Le code QR d’élus, dont le premier ministre François Legault lui-même, avait été falsifié l’an dernier. Cette affaire aurait dû allumer un feu rouge et amener le gouvernement à revoir toute la sécurité du système informatique, y compris dans l’accès au système et la saisie des données à la base, estime la cheffe libérale Dominique Anglade.

Lorsque l’affaire des codes QR falsifiés est survenue, « très vite, le gouvernement est sorti en disant : non, non, il n’y a pas d’enjeu, tout est sous contrôle. Ils ont pris ça à la légère. Une fois que leur dynamique de communication est passée, le problème est demeuré et on ne le règle pas. »

Selon elle, « c’est le laxisme du gouvernement qui fait en sorte que ce genre de comportements ont pu se produire ».

Le gouvernement soutient qu’il a été avisé de « rumeurs » concernant de faux passeports vaccinaux l’automne dernier et qu’il « a avisé le ministère de la Sécurité publique, qui a alerté également les corps policiers ». « Le gouvernement aurait dû demander un état de situation, assurer un suivi », et corriger le problème à la source, soutient Dominique Anglade.

Elle est outrée que des employés ayant constaté des cas de fraude et invalidé le passeport vaccinal de certaines personnes dans le système se soient fait demander par des cadres de les revalider. « C’est plus que de la tolérance (envers la fraude, NDLR), c’est inacceptable comme manière de se gouverner », dit-elle.

De son côté, le Parti québécois rappelle que l’opposition avait demandé un débat parlementaire sur le passeport vaccinal, ce qui aurait permis d’analyser cette mesure sous toutes ses coutures y compris concernant la sécurité informatique. Le gouvernement avait refusé de faire cette consultation.

« Le gouvernement a fait l’économie de débats, et ce fiasco est complètement sur ses épaules. Alors que le gouvernement demande de faire des efforts et des sacrifices, il ne remplit pas sa part du contrat pour s’assurer que ce qu’il met en place est fiable. Les tricheurs s’en sortent. C’est une claque au visage que les vaccinés reçoivent aujourd’hui », tonne Martin Ouellet, porte-parole en matière de stratégie numérique et de sécurité publique.

Il est inacceptable pour lui que des mesures de sécurité adéquates n’aient pas été mises en place. « On est tous capables d’être doublement authentifiés lorsqu’on entre sur des réseaux informatiques. Mais le gouvernement n’a pas mis en place de mécanismes pour crédibiliser la vaccination et, surtout, l’utilisation du passeport vaccinal », soutient-il. « La faille est gigantesque », insiste le député, puisque des personnes d’un peu partout au Québec, sans lien entre elles, l’ont décelée et l’ont exploitée facilement.

Selon lui, « si des gens sont prêts à payer 1000 $ pour ne pas être vaccinés, pensez-vous que vaccimpôt va changer quelque chose sur leur volonté ou non d’être vaccinés ? Si tu es prêt à payer 1000 $ pour tricher, un vaccimpôt va-t-il te convaincre de te faire vacciner ? Qu’on me permette d’en douter. »

Pour Vincent Marissal, de Québec solidaire, le gouvernement a agi « dans la précipitation » avec l’implantation du passeport vaccinal, et comme il est « notoirement mauvais en système informatique, malheureusement, c’est peut-être un accident qui attendait d’arriver ».

« Si Éric Caire veut se trouver une crédibilité dans son rôle de ministre de la Cybersécurité, il faut qu’il sorte et qu’il s’explique », ajoute-t-il.

Une demande d’entrevue avec M. Caire est sans réponse jusqu’ici.