(Québec) Québec débourse 500 millions afin de déployer un train de mesures financières, administratives et de « mieux-être » pour donner de l’air au personnel de la santé, dans le contexte « exceptionnel » de la cinquième vague de la pandémie de COVID-19. Bien qu’elles ne soient prévues que pour 12 semaines, ces mesures sont saluées par les syndicats.

Après avoir dépensé 1 milliard l’automne dernier, le gouvernement Legault délie à nouveau les cordons de sa bourse pour retenir et soutenir les travailleurs de la santé et des services sociaux, débordés par le tsunami Omicron depuis décembre. Québec ajoute 500 millions pour « augmenter la capacité des ressources du réseau et [de] certains partenaires privés ». Les nouvelles mesures seront en vigueur pour 12 semaines.

PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

François Legault, premier ministre du Québec

« C’est quand même des efforts financiers importants que les Québécois font aussi pour aider à passer au travers [de cette période] », a lancé jeudi le premier ministre, François Legault. L’annonce est par ailleurs le fruit d’une collaboration avec cinq grands syndicats de la santé (FTQ, CSN, FIQ, CSQ et APTS). De quoi réjouir le gouvernement alors que ses relations avec les syndicats ont parfois été houleuses, l’automne dernier.

Je pense que c’est important qu’on travaille tous ensemble pour passer au travers des prochaines semaines et je pense qu’avec ces mesures-là, ça va aider.

François Legault, premier ministre du Québec

La vague Omicron frappe durement le réseau de la santé et des services sociaux. Le nombre de travailleurs sur la touche en raison de la COVID-19 est néanmoins passé de 20 000 à 15 000 au cours des derniers jours.

Mais Québec cherche activement 2500 travailleurs (1000 dans les hôpitaux et 1500 en CHSLD) pour traverser les prochaines semaines alors que la pression se maintient en ce qui concerne les hospitalisations. On s’attend à ce que le week-end à venir soit particulièrement difficile pour le réseau. « C’est en fin de semaine qu’il faut que ça arrive », a indiqué le ministre de la Santé, Christian Dubé, parlant des renforts.

Les nouvelles mesures annoncées jeudi vont d’incitatifs financiers à l’ajout de ressources administratives, en passant par des ajustements pour améliorer les conditions de travail des travailleurs au front.

En voici quelques exemples :

  • Un remboursement des frais liés au travail lorsque la personne salariée fait des heures supplémentaires ;
  • Une demi-journée de vacances accordée à la personne pour toutes les journées travaillées au-delà de sa semaine normale de travail ;
  • Une rémunération à taux double pour la personne salariée à temps complet qui effectue une sixième ou une septième journée de travail dans la même semaine de travail ;
  • Un montant forfaitaire de 100 $ accordé à la personne salariée à temps partiel qui effectue au minimum 30 heures dans sa semaine de travail ;
  • Une rémunération à taux double pour la personne salariée à temps partiel qui effectue un quart de travail (soir, nuit, fin de semaine) en sus de sa journée de travail régulière.

Québec élargit par ailleurs la prime d’assiduité, qui était essentiellement offerte au personnel en soins infirmiers et cardiorespiratoires, à d’autres catégories d’emploi en CHSLD, en centre de protection de la jeunesse et en milieu hospitalier. « Cette prime s’appliquait à 65 000 employés et on élargit cette prime à 170 000 employés », a illustré M. Dubé. La prime d’assiduité prévoit l’attribution de différentes sommes si le travailleur offre une prestation de travail consécutive.

Ces incitatifs s’ajoutent à ceux déjà en place, comme les primes de 4 % et 8 % et les primes de rétention de 15 000 $ par infirmière. Le gouvernement s’engage aussi à ce que les « ajustements relatifs aux primes » soient payés le plus rapidement possible. On sait que certains travailleurs de la santé sont toujours en attente du versement de leurs primes liées à la COVID-19.

Lisez l’article « Des infirmières attendent toujours leurs primes »

« Ouverture » saluée

Le front commun syndical a salué l’« ouverture » du gouvernement Legault, qualifiant de « constructifs » leurs échanges. « La clé pour casser cette vague est de tout faire pour bien protéger le personnel et de déployer rapidement des mesures de reconnaissance pour agir sur l’attraction et la rétention », écrivent les représentants des syndicats.

« Plusieurs mesures annoncées par le gouvernement qui visent certaines catégories d’emploi permettront de soulager de façon appréciable, mais temporaire, la pression qui pèse depuis 22 mois sur le dos du personnel du réseau. L’intersyndicale invite donc le gouvernement à poursuivre les discussions dans le même état d’esprit afin de se sortir de la situation de crise liée à la pandémie et au manque de personnel. »

Certaines des mesures annoncées viseront aussi les partenaires privés du réseau public, comme les CHSLD privés, les résidences privées pour aînés, les maisons de soins palliatifs et les communautés religieuses. Québec indique que les détails des mesures les concernant leur seront communiqués prochainement.

Pas d’accord sur le masque N95

Bien que Québec précise dans son communiqué sans autre détail que « des précisions ont été apportées pour répondre aux préoccupations notamment sur les N95 », les syndicats estiment que Québec doit « continuer d’en faire davantage pour prôner des mesures plus fortes, claires et simples à appliquer pour assurer la protection du personnel ». Les syndicats réclament le port du masque N95 en tout temps, ce que ne permettent pas pour l’heure les autorités. « Tout au long des échanges, l’intersyndicale a indiqué que l’élément prioritaire pour faire face au variant Omicron est d’appliquer le principe de précaution et d’implanter toutes les mesures nécessaires pour bien protéger les travailleuses et travailleurs, à commencer par l’accès au masque N95 pour l’ensemble du personnel », souligne le front commun syndical.