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J’en ai assez de me faire regarder comme un criminel quand j’enlève un pissenlit. Je veux avoir des preuves de biologistes qu’enlever nos quelques pissenlits sur nos terrains a un impact réel sur la pollinisation…

Marc-André Lalonde

Pour Félix Leclerc, le printemps signifiait notamment les crapauds qui chantent la liberté, les nouveau-nés qui crient dans l’étable et les bourgeons qui sortent de la mort.

S’il avait à réécrire l’Hymne au printemps de nos jours, il ajouterait peut-être que c’est aussi la période des pissenlits qu’il ne faut pas couper.

Depuis quelques années, les appels se font nombreux à ce sujet. L’idée est de conserver les pissenlits dans son gazon autant que faire se peut pour donner un coup de pouce aux insectes pollinisateurs.

Récemment, notre chroniqueur Boucar Diouf disait avoir signé un « pacte de non-agression avec le pissenlit ».

Lisez la chronique de Boucar Diouf

Il n’est pas le seul biologiste à penser que c’est une riche idée.

« La conscience environnementale est personnelle. Chacun fait ce qu’il peut et veut bien faire comme action environnementale », affirme d’emblée le titulaire de la Chaire de leadership en enseignement en sciences apicoles à l’Université Laval, Pierre Giovenazzo.

Il confirme toutefois que les efforts pour éviter de couper les pissenlits ne sont pas vains.

« Le nectar et le pollen des fleurs sont les seules sources nutritives pour les pollinisateurs (nectar = glucides/pollen = protéines et lipides). Au printemps, les populations de pollinisateurs sont en croissance et l’abondance des fleurs de pissenlits arrive juste à temps », explique-t-il.

Préposé aux renseignements entomologiques de l’Insectarium de Montréal, André-Philippe Drapeau Picard précise que « des études démontrent que quand on réduit la fréquence de tonte, il y a une augmentation de l’abondance et de la diversité autant des fleurs que des insectes pollinisateurs ».

Il cite une méta-analyse à ce sujet effectuée par trois chercheurs de Berlin, Anja Proske, Sophie Lokatis et Jens Rolff.

Cela dit, tous les pissenlits ne sont pas d’égale importance. « C’est sûr que si on habite en région, entouré de forêts et de champs, quatre pissenlits, ça ne changera pas grand-chose », illustre André-Philippe Drapeau Picard.

Il y a en revanche d’autres gestes qu’on peut poser pour augmenter la diversité et la quantité de nourriture pour les insectes pollinisateurs. Comme planter « des espèces nectarifères, idéalement indigènes, c’est-à-dire qui poussent au Québec », suggère l’expert.

Profitons-en pour rappeler à quel point les temps sont durs pour les insectes. On assiste à un effondrement tout simplement catastrophique de leurs populations.

Le nombre d’insectes aurait chuté de moitié au cours des 30 dernières années sur la planète, nous ont appris les scientifiques au cours des dernières années. Il est grand, le défi que nous devons relever si on veut freiner leur déclin.