Après une pause de trois ans, le réalisateur chinois Zhang Yimou revient sur les écrans avec une comédie A Simple Noodle Story, un remake du premier film des frères Coen: mais si le succès est au rendez-vous, la critique a la dent dure.

Après s'être notamment consacré aux cérémonies des Jeux olympiques de Pékin de 2008 et avoir prêté son concours aux festivités des 60 ans du régime communiste en octobre dernier, Zhang Yimou est de retour.

Il a tourné, en numérique, sa nouvelle oeuvre - et première comédie - en gardant la trame de Blood Simple (1984) de Joël et Ethan Coen, une histoire de mari trompé qui recrute un tueur pour se débarrasser de sa femme et de l'amant.

Mais il l'a transposé dans un restaurant de nouilles de l'ouest désertique de la Chine, dans le Gansu, à l'époque impériale.

Pour agrémenter la recette, il a fait appel à des acteurs comiques de la télévision et parsemé les dialogues d'expressions popularisées par internet.

«J'ai introduit mes propres éléments dans ce remake, si les frères Coen voient ce film, ça les amusera certainement de voir la manière dont Zhang Yimou l'a repris, c'est tout à fait autre chose», a expliqué le réalisateur dans un entretien accordé aux Nouvelles de Pékin.

«Si un réalisateur étranger adaptait Le sorgho rouge, je serais sûrement très curieux de voir le résultat, plus on met des choses qui n'ont rien à voir ensemble, plus c'est intéressant», a ajouté le réalisateur de 57 ans qui avait obtenu en 1994 le Grand Prix ex-aequo du jury du Festival de Cannes avec Vivre.

Le film (Trois coups de pistolet en chinois) a ouvert la semaine dernière la traditionnelle saison des «hesuipian» - les films populaires réalisés pour les fêtes de fin d'année -, qui s'achève après le Nouvel an chinois, à la mi-février.

Et A Simple Noodle Story a démarré en trombe, dépassant les 100 millions de yuans (16 millions $) de recettes en quatre jours.

Zhang Yimou n'avait plus tourné depuis La cité interdite en 2006 (The Curse of the Golden Flower).

Cependant, si le succès populaire est au rendez-vous, les commentateurs font la fine bouche.

Sur son blogue, l'écrivain vedette des jeunes chinois, Han Han, a ironisé sur une oeuvre datée, ressemblant plus à un téléfilm.

«Je donnerai une note de 1 au film, 1 car il a renoncé à utiliser des foules de figurants et certains acteurs ne sont pas mauvais», a-t-il écrit.

«C'est un film qui convient parfaitement pour des cinémas de villes de province», a jugé l'écrivain.

Pour le Quotidien du Hunan, «en dehors du côté attrayant dû au fait que c'est une adaptation du film des frères Coen, le contenu culturel semble plutôt vide».

Hung Huang, une diva de la télévision chinoise, a jugé que le film était «trop vulgaire».

Zhang Yimou s'est défendu en se présentant comme «un cinéaste ordinaire cherchant juste à faire ce qu'il aime faire».

«Quand j'ai filmé Vivre ou Qiu Ju, une femme chinoise, tout le monde m'a acclamé, on disait que c'était plein d'humanisme, dès que j'ai fait un film commercial, tout le monde a dit que j'étais tombé bien bas, que j'avais perdu de la profondeur», a-t-il souligné.

«Les jeunes réalisateurs sont aussi comme ça, peu de gens vont oser dire qu'ils veulent faire des films commerciaux, mais plutôt des films confidentiels pour obtenir des prix», a-t-il affirmé.

Face aux critiques, le producteur de Zhang Yimou, Zhang Weiping, a lancé: «On peut résumer en trois mots la manière dont le milieu du cinéma a toujours considéré les films de Zhang Yimou: envie, jalousie et haine».

Si à ses débuts, Zhang Yimou avait eu des ennuis avec le régime communiste, il est devenu ces dernières années l'un des personnages culturels officiels.

Outre les JO de Pékin, il a contribué aux cérémonies des 60 ans de la Chine communiste en octobre dernier, donnant un coup de main pour un grand spectacle sur la place Tiananmen.