À la fin de la projection de presse de Rodin, spectaculaire ratage du cinéaste français Jacques Doillon, un festivalier a crié «cinema viejo» (vieux cinéma). C'est le moindre des problèmes de ce film désespérément académique et verbeux, mais surtout horriblement machiste.

Cette hagiographie du célèbre sculpteur de L'âge d'airain, qui débute au moment de la commande par l'État français de La porte de l'enfer, est une révision masculiniste du mythe. Selon le récit de Doillon, Rodin (Vincent Lindon) n'aurait rien eu à se reprocher dans sa relation avec Camille Claudel, jalouse compulsive prise d'un délire de persécution paranoïaque. Point à la ligne.

C'est un homme droit et en colère, pratiquement sans reproches, «qui aime les femmes» presque autant que sa statue de Balzac (en particulier ses modèles qui parlent un français du XXIe siècle et présentent une pilosité pour le moins moderne...)

Dans ce « Rodin 101 pour les nuls », le maître rencontre constamment des contemporains, grands artistes de leur temps: ici Claude et Paul (Monet et Cézanne), là Rilke ou Hugo. Succession de «name dropping», comme on dit à Juan-les-Pins, d'un ridicule consommé. Presque autant qu'un ménage à trois improvisé, figure imposée du cinéma de mononcle. Bref, on est aux antipodes de l'interprétation de la relation Rodin-Claudel par Bruno Nuytten dans Camille Claudel et du portrait torturé de l'élève-muse de Bruno Dumont dans Camille Claudel, 1915. De précédentes oeuvres (Raja, notamment) avaient révélé le caractère macho exacerbé du cinéaste de Ponette, mais cette fois-ci, Jacques Doillon se surpasse. Et ce n'est pas un compliment.