Le chercheur torontois en infographie Jos Stam n'a rien à envier à Martin Scorsese.

Alors que le célèbre réalisateur américain a un seul Oscar dans sa collection, M. Stam s'apprête à recevoir son troisième, samedi, pour son travail sur un système d'exploitation pour les graphiques en trois dimensions et les effets spéciaux, utilisé sur de grands succès du grand écran, dont Le Seigneur des Anneaux.

Il est l'un des deux Canadiens à recevoir un prix de l'Académie des arts et des sciences du cinéma pour la cérémonie des Oscars scientifiques et techniques.

L'autre lauréat est Derek Bradley, un chercheur de Smiths Falls, en Ontario, qui est récompensé pour sa création d'une technologie capable de reconstruire en haute résolution la forme du visage des acteurs en mouvement.

Cette soirée est celle des «geeks», a déclaré en riant M. Stam lors d'une entrevue téléphonique.

«Ma première fois, c'était Rachel McAdams (l'animatrice). Je ne savais pas qui elle était. Maintenant, elle est assez populaire, n'est-ce pas ? On se disait: "Elle est canadienne, alors c'est cool"», s'est-il souvenu.

«La deuxième fois, c'était Jessica Alba. Elle était très enceinte, c'était assez drôle, elle devait s'asseoir... Ma fille était complètement dingue (d'excitation), parce qu'elle avait cinq ans à l'époque. J'ai une photo d'elle avec Jessica Alba. Certaines personnes sont très impressionnées par ça.»

C'est un honneur qu'il espérait recevoir depuis qu'il s'intéresse aux effets visuels.

«C'était vraiment mon objectif dans la vie», a-t-il confié depuis Zurich, où il travaille pour Disney Research.

Jos Stam - accompagné du cofondateur de Pixar, Ed Catmull, et du scientifique principal du studio d'animation, Tony DeRose - recevra une plaque de l'académie pour leur travail novateur sur une technologie utilisée par des artistes numériques dans la plupart des maisons de production pour modéliser et animer selon une méthode appelée les surfaces de subdivision.

«Ce que je fais, c'est que je crée les pinceaux, en quelque sorte. Je cache les mathématiques à travers l'animateur», a illustré M. Stam, qui est né à Genève, mais qui est arrivé au Canada en 1989 pour obtenir sa maîtrise et son doctorat à l'Université de Toronto. Il avait ensuite quitté la Ville Reine pour aller travailler à l'étranger, mais y est revenu en 2003.

«Ce que vous voyez à l'écran est essentiellement le travail de la maison de production et nous venons de leur donner les outils avec lesquels ils pourraient créer ces effets.»

Derek Bradley - en compagnie de Thabo Beeler, Bernd Bickel et Markus Gross - recevront quant à eux le certificat pour leur contribution technique à la conception et l'ingénierie du système de capture d'interprétation Medusa, développé pour Disney.

Medusa capture des versions détaillées en trois dimensions des visages des acteurs et suit leurs mouvements, dans le but de produire des effets visuels dans un film.

Cette technologie a été utilisée dans des films tels que Star Wars: Épisode VII-Le réveil de la forceLe livre de la jungleAvengers: la guerre de l'infini et Solo: Une histoire de Star Wars.

Lorsqu'il a appris qu'il gagnait ce prix, Derek Bradley a immédiatement appelé ses parents à Smiths Falls.

«Ils sont incroyablement fiers et enthousiastes», a confié M. Bradley, qui a obtenu son doctorat à l'Université de la Colombie-Britannique, à Vancouver.

«Chaque fois que je rentre à Smiths Falls, chaque fois que je rencontre quelqu'un, ils me disent toujours que mes parents parlent de moi. Même avant les prix, mais beaucoup plus maintenant. Et ma soeur aussi.»

M. Bradley prévoit emmener ses parents, sa soeur et son beau-frère à la cérémonie qui se tiendra à Beverly Hills.

«Pour moi, ce sera probablement un peu émouvant de faire venir tout le monde, mais je vais essayer de passer à travers», a-t-il déclaré.

Pour M. Stam, ce sera en fait sa quatrième cérémonie. Il y a été invité pour la première fois en 2003, alors qu'il travaillait pour l'entreprise torontoise de graphisme 3D Alias, qui a remporté une statuette qui ne portait pas son nom.

Au cours de ses deux voyages suivants, il a reçu des certificats qui lui étaient spécifiquement destinés - l'un en 2006 et l'autre en 2008.

Ce nouveau prix est beaucoup plus significatif à ses yeux.

«C'est pour un plus long terme, donc c'est un impact plus important», a relevé M. Stam.

«Ce genre de choses est en fait utilisé dans la plupart des films, par exemple dans les ''blockbusters''. Tous (les films) qui utilisent des infographies utilisent cette technologie.»