Black Flies, de Jean-Stéphane Sauvaire

En état d’urgence

Production américaine réalisée par le cinéaste français Jean-Stéphane Sauvaire, Black Flies est un drame sous tension, campé dans le monde des ambulanciers à New York. Empruntant une approche quasi documentaire, filmant pratiquement tout caméra à l’épaule, le réalisateur nous entraîne dans la dure réalité de ce monde en suivant une recrue venue du Colorado (Tye Sheridan), qui s’engage comme ambulancier tout en poursuivant ses études en médecine. En faisant équipe avec un vétéran, incarné par Sean Penn, le jeune homme, peu expérimenté, sera bien entendu confronté à la misère humaine, sous toutes ses formes, souvent marquée par la violence. Dans cet univers où la reconnaissance se fait rare, les agressions verbales et physiques font partie du quotidien de professionnels qui doivent aussi répondre à un protocole très strict en toutes circonstances. C’est trash, souvent glauque, mais Jean-Stéphane Sauvaire succombe néanmoins à un dénouement plus optimiste qui, on le soupçonne, est en décalage avec la réalité. Dans ce long métrage en lice pour la Palme d’or, les acteurs sont excellents.

PHOTO FOURNIE PAR LES ACACIAS

Une scène tirée de Jeunesse (Le printemps), un film de Wang Bing

Jeunesse (Le printemps), de Wang Bing

Une illustration éloquente

À cause de contraintes d’horaire, je n’ai pu voir que la moitié de ce documentaire chinois d’une durée de 3 heures 31 minutes, le plus long film à concourir pour la Palme d’or cette année. Réalisé par Wang Bing (Les âmes mortes), l’un des chefs de file du genre dans l’empire du Milieu, Jeunesse (Le printemps) est le premier volet d’une trilogie ambitieuse consacrée à des adolescents et de jeunes adultes venus travailler dans une usine textile à Zhili, une ville située à 150 kilomètres de Shanghai. La démarche du cinéaste consiste à capter le quotidien de ces jeunes ayant les mêmes aspirations que tous les gens du même âge partout dans le monde, coincés pourtant dans un système où ils doivent travailler sans relâche devant leur machine à coudre. Les locaux dans lesquels ils s’exécutent sont aussi exigus que les dortoirs où ils s’entassent la nuit. Évoluant dans un contexte de censure, Wang Bing parvient ainsi à illustrer de façon éloquente – sans rien appuyer – comment un système peut aliéner une population. Après All the Beauty and the Bloodshed (Laura Poitras) à Venise et Sur l’Adamant (Nicolas Philibert) à Berlin, le jury cannois attribuera-t-il le plus beau laurier à un autre documentaire ? Cela n’est pas impossible.