Quelques-uns des films vus par notre envoyé spécial à la 79Mostra de Venise.

Saint Omer

Puissant

Ayant déjà fait sa marque dans le domaine du documentaire, notamment grâce à Nous, Alice Diop se lance maintenant dans la fiction en mettant à profit son expertise. En s’inspirant d’une histoire d’infanticide ayant fait les manchettes en France il y a quelques années, la cinéaste française propose un film à la fois sobre et puissant, qui confronte le spectateur à ses certitudes. Le récit de Saint Omer, sélectionné en compétition officielle, consiste essentiellement en un procès, vu du point de vue de Rama (Kayije Kagame), une autrice ayant le projet d’écrire un ouvrage en traçant un parallèle avec Médée, personnage de la mythologie grecque. Il appert pourtant que le témoignage de Laurence (Guslagie Malanda), l’accusée qui impute son geste inexplicable à la sorcellerie, viendra remuer bien des choses chez cette femme qui s’apprête aussi à devenir mère. S’étant intéressée à un procès qu’elle a elle-même suivi en présentiel après avoir vu une photo de l’accusée dans Le Monde, Alice Diop aborde certains traits de société de façon très subtile, notamment à propos des aprioris collectivement entretenus envers les citoyens venus d’ailleurs. Au procès, on s’étonne en outre que l’accusée, franco-sénégalaise, s’exprime « aussi bien ». Grâce à une approche naturaliste, très dépouillée, une mise en scène dénuée de tout artifice, Alice Diop se concentre sur la vérité des sentiments, appuyée par deux actrices remarquables.

Beyond the Wall

Trop, c’est comme pas assez…

Retrouvant Venise cinq ans après avoir obtenu le prix de la mise en scène dans la section Orrizonti (grâce à Cas de conscience), le cinéaste iranien Vahid Jalilvand présente cette fois un thriller immersif dont l’approche n’est pas sans rappeler celle qu’a choisie Romain Gavras pour Athena. Dans ce film dont l’histoire est centrée sur celle d’un homme aveugle suicidaire chez qui se réfugie une inconnue fuyant la police, on nous plonge en effet dès le départ dans le drame en montrant la tentative du protagoniste pour mettre fin à ses jours. Sans donner plus de répit au spectateur, le cinéaste plonge ensuite dans l’histoire de la fugitive, notamment en nous ramenant au moment où elle fut prise au milieu d’un mouvement de foule lors d’une manifestation violente, filmée nerveusement de l’intérieur. La rencontre entre ces deux êtres provoque d’évidence des revirements inattendus, mais il n’est pas dit que la manière qu’adopte le cinéaste, agressante par moments, produise l’effet escompté. Beyond the Wall est en lice pour le Lion d’or.

III

Prometteur

PHOTO FOURNIE PAR METAFILMS

Une scène tirée de III, premier court métrage de Salomé Villeneuve

Salomé Villeneuve a un œil de cinéaste. C’est l’évidence même. Dans III, son tout premier court métrage (sélectionné dans la section Orizzonti), elle nous offre un film de 12 minutes sans dialogues (ou presque), où trois enfants d’une même famille entrent en conflit. L’enjeu ? L’un d’entre eux aurait voulu garder le poisson qu’il venait de pêcher pour, éventuellement, le manger, mais sa sœur aînée en a décidé autrement en rejetant la prise de son frère à l’eau. Faisant écho aux sentiments exacerbés vécus dans l’enfance, la réalisatrice a su faire confiance à la puissance des images, préférant l’évocation à l’explication. Il y a là quelque chose de très prometteur.