Toutes les rumeurs ayant entouré la mise en chantier de Don’t Worry Darling ont presque fait en sorte d’occulter le film lui-même. Malgré tout ce qui s’est passé dans les coulisses, le long métrage d’Olivia Wilde reste intéressant. Et très actuel.

C’était l’évènement le plus couru du festival en ce lundi. Pour la première fois depuis la publication d’articles faisant état d’une mésentente entre la cinéaste et son actrice (entre autres choses), les artisans de Don’t Worry Darling ont fait face aux questions de la presse internationale. La conférence de presse s’est tenue avant la projection officielle, en primeur mondiale, de ce film sélectionné hors compétition. Florence Pugh n’y était pas.

Olivia Wilde a cependant précisé qu’elle était très heureuse à la pensée que l’actrice, « une force », a-t-elle dit, puisse venir passer quelques heures à Venise, le temps de déambuler sur le tapis rouge avec elle. À l’instar de Timothée Chalamet, Florence Pugh tourne présentement Dune 2 à Budapest.

PHOTO VIANNEY LE CAER, ASSOCIATED PRESS

Florence Pugh sur le tapis rouge de Don’t Worry Darling

Je remercie la production de Dune 2, et particulièrement Denis Villeneuve, de permettre à Florence [Pugh] de venir nous rejoindre. Je sais à quel point ce genre de chose peut perturber un tournage.

Olivia Wilde, réalisatrice

Quant à la polémique, elle fut abordée succinctement : « Tous les potins, les tabloïds, tout le bruit que ça provoque font que l’internet se nourrit lui-même, et je ne ressens pas le besoin de l’alimenter. Il est déjà suffisamment bien nourri », a-t-elle dit.

La condition des femmes

Quand un journaliste du Hollywood Reporter a tenté de poser une question à propos de Shia LaBeouf, qui devait d’abord tenir le rôle que joue Harry Styles, la modératrice est tout de suite intervenue pour dire qu’une réponse avait déjà été donnée à cette question. Elle a ensuite relancé la discussion sur les décors et les costumes.

Cela dit, peu importe les tractations de coulisses et le langage diplomatique pour tenter de minimiser les controverses, Don’t Worry Darling reste un long métrage intéressant, ne serait-ce que grâce aux parallèles qu’on peut facilement établir entre l’époque évoquée dans l’histoire — les années 1950 — et la nôtre, particulièrement à propos de la condition féminine. À cet égard, on peut assurément y voir un film social et politique.

La promotion est beaucoup axée sur Harry Styles, superstar de la musique pop qui tient ici un rôle important au cinéma pour la première fois, mais ce long métrage est d’abord et avant tout l’affaire de Florence Pugh. Cette dernière excelle dans le rôle d’une jeune femme qui tombe dans un monde en apparence parfait mais qui, sous le vernis, en cache un autre beaucoup plus sinistre. Dans cette petite communauté construite en plein désert à la faveur d’un projet mystérieux, pour lequel tous leurs maris travaillent, les femmes, entièrement dévouées à leur homme, sont tenues dans l’ignorance et doivent suivre des règles très strictes. Certains territoires leur sont carrément interdits.

« Avec la scénariste Katie Silberman, l’écriture a commencé au moment où l’on commençait à entendre parler du mouvement Make America Great Again [le slogan de Donald Trump], a souligné Olivia Wilde. Qu’est-ce que cela veut dire au juste ? Nous avons beaucoup pensé aux générations de femmes qui nous ont précédées, mais aussi, malheureusement, aux femmes d’aujourd’hui et à leur liberté de disposer de leur corps. »

Très actuel

Il est vrai que, même si l’histoire de Don’t Worry Darling se déroule dans les années 1950, les discours prônant le retour aux valeurs « traditionnelles » ressemblent étrangement à ceux qu’empruntent aujourd’hui certains leaders ultraconservateurs un peu partout dans le monde.

Don’t Worry Darling est malheureusement très actuel, mais il est aussi intemporel. Je ne crois pas qu’un jour viendra où l’idée de contrôler le corps de quelqu’un ne méritera pas d’être combattue.

Olivia Wilde, réalisatrice

« J’ai volontairement mis dans ce film un aspect provocant et j’espère qu’il suscitera la discussion. Cela dit, nous avons voulu qu’il soit divertissant avant tout », a ajouté la réalisatrice.

À ce chapitre, Olivia Wilde, qui avait offert l’excellent Booksmart, a réussi son pari. Les scènes de fêtes, de rassemblements dans un endroit paradisiaque en apparence, ces vieilles voitures rutilantes qui sortent toutes des entrées de garage au même moment, bref, la direction artistique ramène l’iconographie de l’époque dans tout son éclat. On nous réserve également des revirements inattendus, qui ajoutent à la pertinence de l’histoire. Outre les deux têtes d’affiche, Don’t Worry Darling met aussi en vedette Chris Pine. Ce dernier prête ses traits à un leader charismatique qui dirige le fameux projet au service duquel tous les hommes de la communauté mettent leur expertise.

« Je n’ai pas composé mon personnage à partir de quelqu’un en particulier, mais tous les leaders de ce genre utilisent les mots comme une arme », a-t-il déclaré.

Don’t Worry Darling (Ne t’inquiète pas chérie) prendra l’affiche le 23 septembre au Québec.