Il y a des mauvaises pratiques au volant qui ont la vie dure. Laisser tourner son moteur au ralenti en est une. Pendant que l'on attend son fils à la sortie de l'école ou que l'on patiente pour être servi au volant, on gaspille à outrance, on pollue énormément et on perd beaucoup d'argent. Curieusement, ce problème environnemental et économique est tombé dans l'oubli. Et sans qu'on le sache, utiliser le service au volant d'un resto-minute peut coûter très cher...

Jusqu'à quel point peut-on laisser tourner le moteur de sa voiture? Dépense-t-on plus d'essence en coupant le contact puis en redémarrant presque aussitôt?

Contrairement à la croyance populaire, laisser son moteur tourner au ralenti n'est pas une façon efficace de le faire chauffer, même par temps froid. «La meilleure façon de le faire chauffer consiste à conduire», rappelle l'Office de l'efficacité énergétique (OEE). De même que faire tourner le moteur au ralenti pendant plus de 10 secondes seulement fait consommer plus de carburant que couper et redémarrer le moteur.

Ce sont là quelques faits. Les chiffres quant à eux sont implacables et impressionnants. Selon le ministère fédéral des Ressources naturelles, si chaque automobiliste canadien évitait de faire tourner au ralenti son moteur pendant en moyenne 6 minutes par jour, cela permettrait de réduire collectivement de 916 millions de litres la consommation annuelle de carburant! Soit d'épargner collectivement (à 1,40$ le litre) la bagatelle de 1,3 milliardannuellement! Ou encore de réduire de 2,2 millions de tonnes les émissions annuelles de gaz à effet de serre.

Le moteur tourne au ralenti le plus longtemps «lorsqu'il s'agit de réchauffer un véhicule, d'effectuer une course et d'attendre au service au volant des établissements de restauration rapide», dénonçaient déjà à la fin des années 90 ce ministère et l'OEE dans le Rapport sur le comportement au volant influençant la consommation d'essence.

Faire tourner son moteur pour réchauffer son véhicule, effectuer des courses ou attendre une personne est un comportement qui peut être corrigé individuellement. L'arrêt effectué à un service au volant est par contre induit par une offre de service. Qui répond elle-même à une demande, objecteront certains. Quoi qu'il en soit, en 1996, le service au volant représentait moins d'un repas sur dix, selon l'Association canadienne de l'industrie de la restauration. Il devait atteindre l'an dernier la proportion d'un sur quatre.

Coupables, les services à l'auto

Autant dire que les services à l'auto des McDo et autres, de même que les lave-autos automatiques, peuvent être montrés du doigt. Une étude de l'Université Clark, au Massachusetts, a ainsi mesuré que, durant une journée type, 272 voitures et 131 camions utilisant le service au volant d'un McDonald's à Worcester avaient tourné au ralenti pendant 2237 minutes, soit 5 min 30 s en moyenne par véhicule. À ce restaurant, la moyenne quotidienne des émissions de gaz a ainsi été évaluée à 10,7 kg pour un total annuel revenant à près de 4 tonnes rejetées dans l'atmosphère.

Selon Clean Air Partnership, organisation non gouvernementale vouée à l'amélioration de la qualité de l'air, les 300 clients quotidiens que peut recevoir un seul service au volant de restauration rapide consomment plus de 30 litres de carburant par jour et génèrent presque 30 tonnes de gaz à effet de serre par année.

Une infraction passible d'une amende à Montréal

Service au volant ou pas, la marche au ralenti est un problème qui est tombé dans l'oubli depuis plusieurs années, reconnaît l'Association québécoise de la lutte contre la pollution atmosphérique. «Il n'y a pas de réglementation là-dessus au Québec», ajoute son président, André Bélisle.

Bien des villes et des municipalités au pays ont adopté un règlement interdisant de laisser tourner au ralenti un véhicule. «Mais ce n'est pas un problème majeur pour elles, ce n'est pas sur leurs radars» pour autant, regrette Gabriella Kalapos, directrice des programmes de sensibilisation de Clean Air Partnership.

Depuis 2008, à Montréal, «constitue une nuisance le fait de laisser fonctionner pendant plus de trois minutes, par période de 60 minutes, le moteur d'un véhicule immobilisé». C'est une infraction punie par une amende de 50$. Cela peut faire cher le burger si l'on fait le pied de grue indéfiniment? Pas vraiment, puisqu'on ne serait pas plus de 30 secondes à l'arrêt quand on passe la commande, et pas plus d'une 1min 30s à la réception et au paiement. C'est pour sortir du de l'allée du service à l'auto que l'attente serait la plus longue.

Les lave-autos automatiques et les fast-food représenteraient-ils malgré tout un jackpot pour le Service de police de la Ville de Montréal? «En théorie, un constat peut être émis quand les gens attendent en ligne à un lave-auto, par exemple, s'ils sont plus de 3 minutes immobilisés», précise le sergent Sylvain Dubois, superviseur à la sécurité routière du SPVM. Mais, en pratique, l'application du règlement est un peu compliquée: «Il faudrait minuter chaque arrêt des véhicules.» Sachant qu'avancer de trois pieds oblige à remettre le chronomètre à zéro...

Quand on disait qu'un burger peut coûter cher...

Un avantage à couper le moteur...

La hausse du prix de l'essence contraindrait 82% des conducteurs canadiens à chercher à réduire leurs dépenses de carburant d'une manière ou d'une autre, selon un récent sondage commandé par Canadian Tire. De petits changements comme l'entretien périodique du véhicule et des habitudes de conduite appropriées peuvent permettre de réaliser des économies d'essence allant jusqu'à 20%. Laisser tourner quotidiennement son moteur au ralenti pendant 10 minutes entraîne une augmentation annuelle de 5% de la consommation de carburant, ajoute pour sa part le grand détaillant. Tiens, tiens...