La crise du crédit ne concerne plus que l'immobilier, à en juger par la décision de GM et de Chrysler (aux États-Unis) de ne plus proposer la location à long terme. Cette politique forcera maintenant les consommateurs à se procurer un véhicule correspondant à leurs moyens ou à courir le risque de se faire rouler.

Comment expliquer le fait que GM se retire de la location à long terme? Simple. Vendredi, à la publication de ses résultats du deuxième trimestre, le plus important constructeur automobile américain a fait état d'une perte équivalente au budget annuel du ministère de l'Éducation du Québec. Une contre-performance attribuable en partie à la baisse de la valeur résiduelle des camions et VUS -60% de son chiffre d'affaires- que le constructeur avait accepté de financer à long terme.

Les pertes sont bien réelles. «La semaine dernière, à l'encan, un Chevrolet Trailblazer 2005 entièrement équipé n'a pas trouvé preneur pour 15 000$», souligne Jean St-Onge, représentant d'un marchand de véhicules d'occasion dans l'Ouest de l'île de Montréal.

En fait, la valeur résiduelle présumée et garantie par GM au moment de la transaction initiale, en 2005, était de 30% supérieure à la somme exigée à l'encan.

Voilà le risque (et les pertes) que GM ne veut plus assumer. Chrysler et Ford non plus, même si ces deux constructeurs adoptent des positions plus nuancées. En effet, même si Chrysler maintient son programme de location au Canada, il faut savoir que les valeurs résiduelles ont été corrigées à la baisse et que les taux d'intérêt ne sont plus aussi avantageux.

Ce n'est pas fini, mais...

La valeur résiduelle, c'est l'épine dorsale de la location à long terme. Ce qui complique tout, c'est qu'elle varie d'un véhicule à l'autre. Seule certitude, elle est garantie, quoi qu'il advienne. Il faut retenir que plus la valeur résiduelle est faible, moins la location à long terme est intéressante. Mais l'inverse est également vrai: plus la valeur résiduelle est élevée, plus les mensualités sont basses.

C'est d'ailleurs pourquoi, grâce à la location, certains véhicules de prestige sont soudainement devenus plus accessibles. Certains consommateurs ont pu rouler de «beaux carrosses» qu'ils n'auraient pas été en mesure de se procurer autrement. Par exemple, s'offrir en location une X3 de BMW aux mêmes mensualités qu'une Subaru Tribeca. Avec la location, tout est possible.

Peut-on maintenant penser que d'autres constructeurs emboîteront le pas à GM? Sans doute, mais il y a fort à parier que ceux qui proposeront toujours ce mode de financement rendront les conditions moins avantageuses pour le consommateur. Des indices de cette future politique: l'écart entre les taux d'intérêt proposés pour l'achat et la location s'accentuera au détriment de cette dernière et, plus important encore, la valeur résiduelle (au terme du bail de location) de plusieurs véhicules (pas tous) sera révisée à la baisse.

Pourquoi avoir subventionné la valeur résiduelle des véhicules, demandez-vous? Plutôt que de s'attaquer aux véritables problèmes, c'est-à-dire restreindre leur production tout en rendant les véhicules plus abordables, les constructeurs ont préféré subventionner la valeur résiduelle. Une stratégie qui a rendu la location à long terme financièrement intéressante pour le consommateur (mensualités plus basses).

Cette approche a été valable jusqu'au jour où les véhicules ont commencé à rentrer au bercail avec des valeurs résiduelles qui, trop souvent, ne correspondaient pas à la réalité du marché. Avec le prix de l'essence, cette réalité a frappé de plein fouet l'industrie automobile - l'américaine surtout, dont certains produits sont incapables de passer devant une station-service sans s'y arrêter.

Maintenant, que faire de ces milliers de véhicules que les locataires rendent au terme de leur bail et dont les concessionnaires, qui pourraient les revendre (ou les relouer) sur le marché de l'occasion, ne veulent pas parce qu'ils sont trop chers? Ils seront soldés à l'encan. Au constructeur d'éponger la perte financière. Voilà ce que GM et Chrysler, aux États-Unis, ne veulent plus faire.

Sachez aussi que la valeur résiduelle fixée au moment de la prise de possession du véhicule était garantie. Un avantage pour le consommateur qui, à la signature du bail, n'avait pas à se soucier de quoi que ce soit si ce n'est de respecter les clauses particulières (usure normale, entretien, etc.) De son contrat.

Avec le retrait de GM, plusieurs firmes de location (anciennes ou nouvelles) vont tenter de récupérer ce marché encore très captif en offrant des locations dites ouvertes, c'est-à-dire où la valeur résiduelle ne sera pas garantie par le locateur. Au consommateur maintenant de se soucier des fluctuations du marché (modèle peu en demande ou dont la fabrication a cessé, etc.), donc de la valeur marchande réelle du véhicule à une période donnée. On ne remettra plus les clés en disant «Merci, bonsoir». Il faudra aussi parfois laisser un chèque à la sortie puisque vous devrez assumer le manque à gagner autrefois épongé par le constructeur.

Maintenant, comment parviendrez-vous à faire le calcul de ces paramètres qui échappent aujourd'hui à tout calcul prévisionnel rigoureux de l'industrie? Vous devez être fort!