(Vélizy-Villacoublay) « C’est un véritable compagnon de voyage interactif » : la marque française DS Automobiles propose à partir de jeudi à ses clients de dialoguer au volant avec l’intelligence artificielle ChatGPT, première initiative du genre en Europe.

Dans l’habitacle feutré d’une DS9, la voix un tantinet métallique et hachée retentit : « Pour l’anniversaire de votre petite cousine qui aime les BD de science-fiction, je peux vous conseiller ces trois ouvrages ».

Elle, c’est Iris, le système de reconnaissance vocale équipant la plupart des véhicules de DS Automobiles (groupe Stellantis), et appelée à devenir un véritable assistant vocal, depuis que des ingénieurs de la marque française se sont penchés sur son berceau pour lui faire don de l’intelligence artificielle (IA).

« On a intégré ChatGPT à nos voitures pour qu’Iris puisse répondre à toutes les questions sur tous les sujets », explique aux journalistes présents pour un test Laurent Pognon, responsable Produit reconnaissance vocale. « Histoire, géo, culture, les possibilités sont infinies », vante-t-il. D’autant qu’elles peuvent s’associer à des fonctions de conduite.

Au volant, on peut ainsi rebondir sur ses conseils littéraires, en introduisant sa demande d’un « OK Iris » : lorsqu’on lui demande où acheter l’un des titres cités, plusieurs librairies à proximité s’affichent sur l’écran de bord, à portée de clic pour lancer le guidage GPS.

20 000 clients

À partir de jeudi, les 20 000 premiers clients à se manifester parmi ceux disposant d’une DS3, DS4, DS7 ou DS9 pourront connecter à distance leur système de reconnaissance vocale au dialogueur d’OpenAI, afin de participer à une phase de test qui durera six mois.

Avec cette phase pilote, disponible en France, Royaume-Uni, Italie, Espagne et Allemagne, « DS Automobiles va être la première marque en Europe à intégrer ChatGPT à ses véhicules », vante Philippe Houy, responsable Services connectés.

À ce stade, seul le constructeur allemand Mercedes a pratiqué un test similaire cet été aux États-Unis, sans annoncer depuis les résultats de cette phase pilote.

« Les bénéfices pour le client, c’est d’avoir à portée de voix la réserve gigantesque de savoir de ChatGPT pendant son trajet », et « en totale sécurité, puisque vous gardez les yeux sur la route », affirme M. Houy.

Pour lui, « ça va même au-delà : avec l’IA, Iris devient un véritable compagnon de voyage interactif ». « Vous pouvez lancer une conversation, lui demander un quiz ou une histoire pour vos enfants, la contredire, compléter ses réponses », énumère-t-il, « et en fait, à la fin de votre voyage, vous vous apercevez que vous parlez avec votre voiture ! »

« Révolution » ou gadget ?

Avec cette nouvelle fonctionnalité, DS Automobiles veut renforcer son positionnement premium sur le marché, où elle cherche depuis sa création en 2014 à incarner « l’art du voyage à la française », pariant sur le luxe et le savoir-faire tricolore.

Dans son communiqué de lancement, la marque de Stellantis parle d’une « révolution dans l’univers automobile ». Mais qu’en est-il vraiment ?

« C’est difficile d’anticiper tout ce qui pourra être bouleversé par l’IA », a indiqué à l’AFP Flavien Neuvy, directeur de l’Observatoire Cetelem, selon lequel cependant « on est au début de quelque chose ».

Ce qui va faire la différence, c’est « l’acceptabilité des automobilistes » : « comment ils vont s’approprier cet outil » et si « l’apport de ChatGPT dans la voiture va instantanément être vu comme quelque chose d’incontournable ».

Il faudra aussi surmonter leur inquiétude sur l’utilisation des données personnelles générées lors des échanges. « Bien sûr, le constructeur va tenter de rassurer » - DS Automobiles a déjà précisé utiliser une version payante de ChatGPT qui protège les données –, « mais il y a quand même cette inquiétude », estime M. Neuvy.

Lors de l’essai du véhicule, quelques difficultés persistaient : l’assistant vocal était indisponible lorsque le réseau était mauvais. En outre, son utilisation accapare en partie l’attention du conducteur.

Il partage aussi logiquement les défauts de ChatGPT : « s’il ne prend pas les bonnes sources, il peut se tromper », admet Philippe Houy, qui invite cependant à « challenger » l’IA en le lui faisant remarquer. « C’est un pilote, donc tout n’est pas parfait », souligne-t-il.

Si le test est concluant, cette fonctionnalité sera déployée dans d’autres pays dès le deuxième trimestre 2024. Elle serait commercialisée dans un ensemble contenant d’autres fonctionnalités, coûtant environ 100 euros/an après trois années gratuites.