Il y a parfois, au milieu d’une saison théâtrale, marquée par la parole engagée, voire militante, une petite pièce qui sort des sentiers battus. Dont la parole réconfortante, surprenante, tranche avec le cri de révolte de plusieurs artistes contemporains.

Tel est le cas d’Old Orchard, une comédie dramatique signée Thomas Gionet-Lavigne (S’aimer, Basse-Ville…), un auteur de Québec qui a un véritable don pour les dialogues bien ciselés.

Cette pièce intime en un acte a de grandes qualités de cœur et d’esprit. L’auteur y traite avec bienveillance des contradictions, existentielles et sentimentales, de sa génération : les 30-40 ans.

PHOTO SÉBASTIEN BOUCHER, FOURNIE PAR LA PRODUCTION

François-Simon Poirier, Jean-René Moisan, Myriam DeBonville et Milène Leclerc dans Old Orchard

Certes, la nouvelle œuvre de Gionet-Lavigne, qu’il met lui-même en scène à La Licorne, n’est pas parfaite. Le dernier quart tranche abruptement avec le rythme de la représentation… On peut comprendre que les personnages vivent une épiphanie, mais pas au point de changer totalement de personnalité en 24 heures ! Sa mise en place des interprètes, dans l’étroit espace scénique de la salle, est un peu maladroite. L’auteur aurait tiré profit d’un regard extérieur pour la mise en scène.

Old Orchard, c’est l’histoire de deux couples d’amis qui se rencontrent lors d’un week-end à la plage, dans le populaire lieu de villégiature du Maine. Ils font d’abord connaissance dans un bar, puis poursuivent ça à l’hôtel… l’espace d’une nuit bien arrosée, avec des discussions très animées et moult rebondissements.

Deux gars de Québec, un travailleur social et un comptable (respectivement interprétés par Jean-René Moisan et François-Simon Poirier). Et deux filles du 450, une restauratrice réservée (Myriam DeBonville) et une policière qui n’a pas la langue dans sa poche (Milène Leclerc). Si les quatre interprètes maîtrisent bien leur partition, on fait une mention spéciale au jeu de Poirier pour le « pétage de coche » de son comptable chez Desjardins. Savoureux !

Qu’il est difficile d’aimer

« Comment savoir si notre vie nous ressemble ? » « Pourquoi choisir d’effleurer sa propre existence, plutôt que de s’y ancrer réellement, au risque de se tromper ? » Telles sont quelques-unes des questions soulevées dans Old Orchard. Contre toute attente, ces quatre solitudes, aux valeurs opposées, vont passer à travers leurs différends pour se rapprocher dans une belle quête de sens.

PHOTO SÉBASTIEN BOUCHER, FOURNIE PAR LA PRODUCTION

Myriam DeBonville et Milène Leclerc, deux amies en quête d’amour et de sens dans Old Orchard

À la fin de leur escapade balnéaire, les personnages auront découvert peut-être une âme sœur ; mais surtout de la chaleur humaine. Allumé par une nouvelle conscience, le quatuor contemple alors l’horizon avec des débuts de réponses à ses questions sur l’absurdité de la vie. Dans un épilogue qui rappelle la magnifique scène finale d’Albertine en cinq temps.

« Nous voulons raconter des histoires poétiques, imagées et sensibles qui feront rêver les spectateurs de tous les âges et de tous les horizons. Notre devise étant : tout ouvrir et rien fermer », écrit Gionet-Lavigne sur le site de sa compagnie, le Théâtre Hareng rouge. Avec Old Orchard, force est de constater que son objectif est bien atteint.

Consultez le site de La Licorne Consultez le site du Théâtre Hareng rouge
Old Orchard

Old Orchard

Texte et mise en scène de Thomas Gionet-Lavigne. Une production du Théâtre Hareng rouge.

À la Grande Licorne, jusqu’au 8 avril

7/10