Décidément, la popularité des concerts de l'OSM dans les parcs ne se dément pas. Encore une fois hier soir, à l'Île-des-Moulins de Terrebonne, plus de 10 000 personnes étaient au rendez-vous pour entendre un programme léger consacré aux danses européennes: valses, polonaises, danses hongroises et autres morceaux de folklore sautillants. Des oeuvres fertiles en belles mélodies et en rythmes simples choisies de toute évidence pour séduire. Mais il y a des limites à entendre autant de pièces aux ambiances similaires en une seule soirée. Trop, c'est trop. La légèreté en devenait lourde.

Le maître de cérémonie, Charles Lafortune, est arrivé sur scène de belle humeur et détendu. Le ton rieur de la soirée fut donné avec l'ouverture de La chauve-souris de Strauss fils. Mais l'orchestre avait à peine commencé qu'une fine averse se mettait de la partie, comme pour nous narguer. Une musique de bal sous la pluie: la situation ne manquait pas d'humour. Heureusement, la pluie fut de courte durée.

Plus que jamais auparavant dans un évènement de ce genre, micros et amplification ont déformé la définition sonore, l'orchestre sonnant comme un bloc sans timbres ni textures, du moins dans les premières rangées de spectateurs. Par moments, on croyait presque entendre une fanfare. Naturellement, les concerts dans les parcs ne sont pas un endroit pour les puristes, et ils ont l'avantage d'être gratuits. On espère tout de même que les spectateurs qui s'y déplacent massivement viendront au moins une fois à la Maison symphonique afin de découvrir toutes les finesses dont leur orchestre est capable. Qu'à cela ne tienne: s'ils n'y vont pas, la musique est au moins venue à eux. C'est l'essentiel que l'on doit retenir de ces soirées.

Da Costa

Le plus beau moment d'intelligence musicale de la soirée fut le Tzigane d'Alexandre Da Costa. Ravel décrivait son oeuvre comme un «morceau de virtuosité dans le goût d'une rhapsodie hongroise», mais Tzigane ne se résume pas à sa virtuosité. De grands violonistes en donnent une version à peine intéressante. La longue introduction sans orchestre de 58 mesures a pour effet de révéler la personnalité de ses interprètes, qu'elle met à nu.

Tels les Tziganes, il faut avoir un peu de l'âme et de la liberté du vagabond pour imprimer à cette oeuvre l'allure d'une improvisation. Si certains y sombrent dans des lourdeurs romantiques, Da Costa a su éviter ce piège. Sa version est volontaire, d'une beauté rude et sans pathos. Au fil des petites danses qui varient ensuite le thème principal, il souligne avec habileté les subtils changements de caractère. La seule chose qui lui manque est une légère injection d'humour et de malice.

Photo: Alain Décarie, collaboration spéciale La Presse

Le plus beau moment d'intelligence musicale de la soirée fut le Tzigane d'Alexandre Da Costa.

Trop pressé

Le retour de la pluie dès les premières notes du Clair de lune a eu le don d'exaspérer la foule. Mise au programme à la faveur d'un vote du public, l'oeuvre de Debussy venait agréablement rompre la succession de pièces ponctuées de «oum-pa-pa» et s'achevant en codas tonitruantes. Il était beau de voir se déployer les parapluies sous cette musique mélancolique, à défaut d'une exécution émouvante de la part de l'orchestre, trop pressé par Nathan Brock. Ce dernier dirigea toute la soirée de manière uniforme et carrée, même le Boléro du rappel.

On pourra réentendre l'OSM ce soir sur le terrain de l'école secondaire des Patriotes-de-Beauharnois et demain soir au parc Charleroi de Montréal-Nord.

Photo: Alain Décarie, collaboration spéciale La Presse

Le maître de cérémonie, Charles Lafortune, est arrivé sur scène de belle humeur et détendu.