La jeune et blonde soprano allemande Lydia Teuscher était la seule femme parmi les quatre solistes annoncés par Bernard Labadie pour son Messie 2011, donné d'abord à Québec puis à Montréal hier après-midi.

Au ténor et à la basse s'ajoutaient en effet un troisième homme: un haute-contre pour les solos d'alto, suivant une formule déjà utilisée par M. Labadie. Mais Matthew White se désista il y a quelques jours et fut remplacé par la mezzo (c'est-à-dire alto) torontoise Krisztina Szabo. Il s'agissait d'un troisième remplacement puisque le ténor et la basse d'abord annoncés venaient aussi d'être remplacés...

Ce qui fait de Mme Teuscher l'unique survivant du quatuor original. Les circonstances lui furent-elles favorables? Chose certaine, elle se révéla à tous égards supérieure aux trois autres. La voix est petite mais très belle et extrêmement agile et, des quatre, c'est la seule qui ait de la personnalité.

Cette fois encore, Labadie donnait la partition intégralement, la dirigeait par coeur et choisissait l'édition Bärenreiter, où les 53 numéros des éditions courantes sont regroupés différemment et où certains solos sont confiés à des voix autres que celles entendues habituellement. Et, comme toujours, il utilisait de petites formations (28 choristes encerclant l'orchestre de 22 instrumentistes), limitait le vibrato à l'essentiel et axait son interprétation sur ce que j'appellerais la légèreté (tempi allants, clarification des lignes) tout en laissant passer ici et là de l'expression et même de l'émotion.

Les Violons, aux sonorités très fines et augmentés de quelques bois, de sèches timbales baroques et d'un impeccable trompettiste, livrèrent là une autre exécution de la plus haute tenue professionnelle. Néanmoins, cette fois, la première mention va au choeur. Puisant chez les choristes de Montréal autant que de la Vieille Capitale, et portée par l'acoustique de la nouvelle salle de la PdA (excellente hier des deux endroits où j'écoutais), la Chapelle de Québec se distingua à la fois par une rare virtuosité collective, le relief des groupes et une délicatesse d'expression qu'on retrouvait parfois à l'orchestre mais jamais chez les solistes, sauf chez la soprano.

Il y a d'ailleurs peu à dire sur les autres solistes. Le ténor a du style et ornemente beaucoup; il est d'ailleurs à peu près le seul à le faire, ce qui produit un déséquilibre dont on s'étonne qu'il ait été toléré par le rigoureux Labadie. La basse est un chanteur sérieux (j'entends encore son «... trumpet shall SOUND!!!»), mais la voix a tendance à se détimbrer dans les mélismes. Quant à la mezzo, dernier en date des trois remplacements, elle semblait faire de son mieux - dans les passages où on réussissait à l'entendre, bien sûr!

L'audition totalisa près de trois heures, entracte et pause compris, et avait attiré quelque 2000 personnes. Pour le fameux choeur Hallelujah!, qui clôt la deuxième des trois parties, on vit se lever la majorité des auditeurs, selon la tradition.

MESSIAH, oratorio en trois parties, texte anglais de Charles Jennens d'après la Bible, musique de George Frideric Handel (1742). Édition Bärenreiter (1965).Les Violons du Roy et la Chapelle de Québec. Lydia Teuscher, soprano, Krisztina Szabo, mezzo-soprano, James Gilchrist, ténor, et Kevin Burdette, basse. Dir. Bernard Labadie. Hier après-midi, Maison symphonique, Place des Arts.