Dans l'esprit de Kent Nagano, la Pastorale de Beethoven semble un incontournable lorsque vient le temps d'évoquer la nature.

Le chef a inclus cet extrait de la sixième symphonie du maître allemand dans un programme sur ce thème en novembre 2006. La pièce a été également interprétée le 27 avril dernier dans un concert-conférence sur l'écologie, avec David Suzuki comme invité.

«La Pastorale est une expression de la force de la nature, répond le maestro. La nature et l'humanité sont impossibles à séparer. Même si l'on croit que l'on peut s'en isoler avec nos bureaux climatisés, notre chauffage dans la voiture, nos métros ou la lumière au bout du doigt, il y a des grandes occasions où la nature nous rappelle qu'elle possède une force beaucoup plus grande que la nôtre.»

À ce titre, Kent Nagano rappelle la triple catastrophe qui a frappé le Japon ces derniers mois. «Il n'y a rien à faire devant un si grand mouvement de la nature.»

Déjà, au début du XIXe siècle, Beethoven ressentait les dommages causés à la nature par l'espèce humaine. La pollution provoquée par l'urbanisation et la révolution industrielle était en train de détruire la forêt de Vienne.

«Dans ses mémoires, Beethoven a écrit qu'il adorait se promener dans les bois parce que son esprit était alors ouvert aux grandes idées. Et il était convaincu que ses endroits préférés allaient disparaître. Alors, il a écrit la sixième symphonie avec une grande sensibilité à la nature, à sa force et à son drame», explique le chef d'orchestre.

Le mot pastorale est relatif à la vie champêtre. Dans son long métrage musical d'animation Fantasia, Walt Disney a utilisé ce morceau pour des scènes de réjouissances sur le mont Olympe.

Innovation

Si La mer et la Pastorale sont des oeuvres bien connues du répertoire, le Water Concerto demeure une pièce à découvrir pour plusieurs mélomanes.

Créé vers la fin des années 80 par Tan Dun (créateur de la trame sonore du film Tigre et dragon), ce concerto intègre des bruits d'eau créés par trois percussionnistes avec des instruments conçus expressément pour l'oeuvre.

Bien qu'il reconnaisse la qualité du travail du compositeur chinois, Kent Nagano se garde bien de le considérer comme un innovateur. «À ce titre, Beethoven et Debussy furent de grands innovateurs», rétorque-t-il.

«La structure de la sixième symphonie, surtout dans les trois derniers mouvements qui s'enchaînent l'un à l'autre, était très innovatrice. Elle a changé la direction pour la musique classique pour tous les autres qui ont suivi», explique le vulgarisateur.

«Et avec La mer, avec les couleurs et les harmonies très nouvelles et exotiques, ainsi que la forme qu'on appelle aujourd'hui «impressionniste», Debussy a ouvert la porte au XXIe siècle dès le début du XXe», poursuit-il.

La tâche la plus difficile pour un artiste, selon Kent Nagano, c'est de choisir des pièces de la plus haute qualité à présenter pour son public.

«L'oeuvre de Tan Dun est d'une qualité extraordinaire. Personnellement, je crois qu'il y a une chance que cette oeuvre marque le temps parce que le son et les gestes musicaux sont uniques et inoubliables.

«Mais seul le temps nous dira si elle mérite une place dans le répertoire», conclut-il.