L'opéra baroque, banni pendant 18 ans de la scène du prestigieux Opéra de Vienne, a connu dimanche soir un retour en force avec la première représentation de l'histoire au Staatsoper de l'une des compositions pourtant les plus connues de l'Allemand Georg Friedrich Händel (1685-1759), Alcina.

Cette renaissance du baroque, décidée par le nouveau Directeur général, le Français Dominique Meyer, a été marquée par une autre «révolution»: pour la première fois, dans la fosse d'orchestre, en lieu et place des habituels musiciens-maison de l'Orchestre philharmonique de Vienne, se trouvaient Les Musiciens du Louvre-Grenoble du chef d'orchestre français Marc Minkowski, spécialisé dans la musique baroque.

Jamais encore dans le passé, un Directeur général du Staatsoper avait osé faire jouer une formation étrangère et, pour cette innovation sans précédent, Dominique Meyer a pu s'appuyer sur son Directeur de la musique, le chef d'orchestre autrichien Franz Welser-Möst, pourtant chef attitré du Philarmonique.

Après quatre heures de spectacle dans une salle archi-comble, le difficile public de l'Opéra de Vienne a accueilli par des applaudissements frénétiques ce retour de la musique baroque.

Dans une mise en scène du Britannique Adrian Noble, des artistes lyriques ayant fait leurs preuves dans l'opéra baroque avaient été rassemblés pour l'occasion par Dominique Meyer et Marc Minkowski: la soprano allemande Anja Harteros dans le rôle-titre, la mezzo-soprano bulgare Vesselina Kasarova en tant que Ruggiero et la soprano argentine Veronica Cangemi incarnant Morgana.

Alcina sera encore donné à quatre reprises jusqu'au 26 novembre.

Pour Dominique Meyer, arrivé aux commandes seulement le 1er septembre, c'est le troisième triomphe en quelques semaines: d'abord avec un opéra rarement joué du compositeur allemand Paul Hindemith (1895-1963), Cardillac, puis un programme de danse résolument contemporain, d'inspiration américaine, intitulé Joyaux du Nouveau Monde, avec des chorégraphies du Russo-Américain George Balanchine (1904-1983), de l'Américaine Twyla Tharp et de son compatriote William Forsythe.

Comme l'opéra baroque, banni de la scène viennoise pendant les 18 ans de règne de l'Austro-Roumain Ioan Holender, la danse était la parente pauvre du Staatsoper. En choisissant de faire venir à Vienne comme Directeur du ballet l'ex-danseur-étoile français Manuel Legris, Dominique Meyer a délibérément lancé un signal fort en faveur de la danse.

Et, dans la foulée, le 20 novembre, Manuel Legris, sur la scène cette fois du Volksoper, l'Opéra populaire, va lancer sa troupe dans une création mondiale du chorégraphe né en Allemagne Patrick de Bana: Marie-Antoinette, un ballet à thématique franco-autrichienne sur la princesse autrichienne puis reine de France, décapitée en 1793 pendant la Révolution française.