Fondé par Les Trois Accords, le Festival de la poutine de Drummondville fête ses 15 ans cette année. Nous avons suivi les quatre musiciens dans leurs tâches d’organisateurs jeudi, jusqu’à leur spectacle sur la grande scène vendredi soir.

Le partage des tâches

Jeudi après-midi. Le site du festival va ouvrir dans quelques heures, à 17 h, mais partout il y a des gens qui travaillent, qui posent des pancartes, qui transportent des caisses de bière, qui remplissent des frigos. Une vraie fourmilière s’active dans le stationnement du Centre Marcel-Dionne, dans le cœur de la ville, à travers laquelle on voit circuler le chanteur Simon Proulx sur sa planche à roulettes, le batteur Charles Dubreuil au volant de sa voiturette, le guitariste Alexandre Parr sur sa trottinette électrique, le bassiste Pierre-Luc Boisvert à pied.

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Le chanteur des Trois Accords, Simon Proulx, est le directeur général du Festival.

Chacun travaille de son côté et sait ce qu’il a à faire : depuis 15 ans, les quatre musiciens et amis se partagent les tâches, qui n’ont pas vraiment changé. Simon, qui occupe les fonctions de directeur général, raconte que les choses se sont faites naturellement : lui chapeaute l’évènement et s’occupe des relations avec les partenaires, Charles est responsable de la programmation et de la technique, Pierre-Luc, des poutiniers, et Alexandre, des bars.

« On a juste chacun développé son secteur. »

  • Le Festival de la poutine de Drummondville fête ses 15 ans.

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    Le Festival de la poutine de Drummondville fête ses 15 ans.

  • Simon Proulx se promène sur le site pendant que se terminent les derniers préparatifs.

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    Simon Proulx se promène sur le site pendant que se terminent les derniers préparatifs.

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La première année, ils ne se doutaient pas de l’ampleur de la tâche qui les attendait, explique le chanteur. « Mais c’est comme quand tu organises une fête chez toi. Ou un mariage. Tu fais ce qu’il faut pour que ça fonctionne bien. » De son côté, il a vite compris que ce festival ne pourrait s’organiser sans le soutien de la communauté drummondvilloise.

« Quand tu commences un festival, tu ne vas pas appeler Hydro-Québec. Ça prend un appui des gens de la ville, c’est super crucial. On travaille fort sur ce sentiment de communauté. »

Les amis

En milieu d’après-midi, on fait la connaissance du responsable de la billetterie, Jean-Pierre Marcotte. Comme presque tout le monde ici, Jean-Pierre est un ami des gars des Trois Accords depuis sa jeunesse. « Il y a des gangs d’amis qui se voient pour un week-end de chasse chaque année, nous, on se fait un festival. »

De 100 à 150 bénévoles travaillent pour le festival – plusieurs personnes prennent même des vacances pour y passer quelques jours, tient à dire Simon Proulx. « C’est un festival qui s’est développé amicalement. Il y a des gens qui reviennent chaque année pour revoir tout le monde, pour revivre ça. On a le sentiment de bâtir quelque chose. »

On croise non seulement des amis des Trois Accords partout, mais aussi leurs enfants, qui ont aujourd’hui l’âge du festival et qui mettent la main à la pâte. « On forme la relève ! », s’exclame Alexandre Parr, qui s’occupe des bars et qui dirige la plus grosse équipe de bénévoles, environ une soixantaine de personnes.

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Le guitariste Alexandre Parr s’occupe des bars.

Après deux ans de pandémie, les festivaliers avaient hâte de revenir, « mais les bénévoles aussi ! », constate le guitariste, dont le père était très impliqué dans la ville à l’Association de soccer. Le fait que trois des quatre membres du groupe vivent encore à Drummond aide certainement à ce sentiment d’appartenance, croit-il. « On est très proches de la communauté. Ça nous aide d’être là, on est plus ancrés. »

Les artistes

À côté de la scène principale, une grande tente est installée, qui fait office de lieu de rassemblement pour les artistes et les techniciens. C’est là qu’ils peuvent se reposer, manger, boire. Pendant l’après-midi, après les tests de son, on y voit Zach Zoya étendu dans un hamac, Souldia attablé avec son équipe, et juste à côté Émile Bilodeau, assis devant sa loge avec ses musiciens.

  • Zach Zoya se repose avant son spectacle.

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    Zach Zoya se repose avant son spectacle.

  • La tête d’affiche du Festival jeudi soir, Émile Bilodeau, a bien sûr mangé de la poutine avant de monter sur scène. Trois fois plutôt qu’une !

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    La tête d’affiche du Festival jeudi soir, Émile Bilodeau, a bien sûr mangé de la poutine avant de monter sur scène. Trois fois plutôt qu’une !

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« Ici, on est traités aux petits oignons. Ça paraît que c’est un band qui tourne beaucoup qui l’organise », nous dit Sébastien Collin, qui gère la tournée du groupe trad-punk Québec Redneck Bluegrass Project.

Charles Dubreuil se fait un point d’honneur d’offrir aux artistes l’accueil le plus agréable et chaleureux possible. C’est ce qui a fait la réputation du festival, croit-il.

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Le batteur Charles Dubreuil s’occupe entre autres de l’accueil des artistes.

« Comme groupe, sur le stage, on aime ça que ce soit super tight et c’est ce qu’on offre. Ça sonne très bien quand tu joues ici. Mais backstage, on aime que ce soit cool. »

Cette ambiance très amicale qui règne partout contribue certainement à ce sentiment de bien-être. « On dirait que tout le monde se connaît », dit Marilyne Léonard, qui s’apprêtait à ouvrir le festival à 18 h 30. « J’ai parlé au batteur des Trois Accords tantôt. C’est le fun d’avoir un contact avec les programmateurs, ça n’arrive pas si souvent. »

Pour Émile Bilodeau, qui joue pour la deuxième fois à Drummondville, les gars des Trois Accords sont une inspiration.

« Ils étaient à peine plus vieux que moi maintenant quand ils ont fondé le festival. Je ne me vois pas faire ça, mais une fondation, oui. Quand je les regarde, je vois que ça se peut, être un artiste et avoir un pied dans sa communauté. »

Erre d’aller

Même si en cette journée d’ouverture, c’est normal que ce soit « un peu le chaos », estime Charles, tout semble aller comme sur des roulettes. « On est vraiment plus relax qu’avant ! », rigole Simon.

Il peut toujours y avoir des surprises même s’ils ont déjà pas mal tout vu. Mais on est loin de la première année chaotique.

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Le bassiste Pierre-Luc Boisvert, grand manitou de la poutine

« On avait un seul endroit où on vendait de la poutine, la sauce était fournie par les restos de Drummond, on avait juste quatre friteuses… et trois ont sauté. C’était un cauchemar », se rappelle Pierre-Luc Boisvert. Comme les autres, le responsable des poutiniers a appris son travail d’organisateur « sur le tas ». « Je sais manger de la poutine, mais je ne suis pas restaurateur ! », rigole le bassiste, qui est depuis constamment en repérage pour dénicher les meilleures poutines du Québec.

Dès l’ouverture du site à 17 h, on voit les gens se diriger vers la dizaine de camions de cuisine de rue invités cette année. D’ailleurs, quand on demande aux festivaliers s’ils sont ici « pour la poutine ou pour les spectacles », la réponse est toujours… les deux. « Ah oui, ça mange ! », s’exclame Pierre-Luc.

  • Lors de la première journée jeudi, le site s’est rempli rapidement.

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    Lors de la première journée jeudi, le site s’est rempli rapidement.

  • C’est un retour à la normale pour le Festial de la poutine cette année, après l’annulation en 2020 et une version réduite en 2021.

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    C’est un retour à la normale pour le Festial de la poutine cette année, après l’annulation en 2020 et une version réduite en 2021.

  • La Fourchette d’or, trophée qui est remis au restaurateur ayant offert la meilleure poutine, selon les festivaliers

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    La Fourchette d’or, trophée qui est remis au restaurateur ayant offert la meilleure poutine, selon les festivaliers

  • La cantine Chez Ben on s’bour la bedaine, champion en titre de la Fourchette d’or

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    La cantine Chez Ben on s’bour la bedaine, champion en titre de la Fourchette d’or

  • Un des dix poutiniers invités cette année, Jerry – Casse-croûte du terroir. Beaucoup de festivaliers reviennent les trois soirs, afin de goûter à un maximum de plats, à plusieurs kiosques différents.

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    Un des dix poutiniers invités cette année, Jerry – Casse-croûte du terroir. Beaucoup de festivaliers reviennent les trois soirs, afin de goûter à un maximum de plats, à plusieurs kiosques différents.

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Alexandre Parr est le seul qui n’avait pas de poste précis pendant la première édition, mais il a été « promu aux liquides alcoolisés et non alcoolisés » dès l’année suivante. Avec le temps, le guitariste a raffiné ses méthodes de service et d’approvisionnement.

« Cette année, les festivals ont recommencé. Nous, comme groupe, on fait le tour, et des fois on se fait dire : hier, on a manqué de bière. Moi, si ça arrivait, je m’immolerais ! Je regarde toujours comment ça marche ailleurs et j’essaie de voir ce qui est bon ou pas. Je ne fais que de l’espionnage industriel ! »

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Alexandre Parr, derrière un des bars

Il a donc développé une logistique qui s’est rodée « avec le temps, les cicatrices, le sang et la sueur », dit-il en passant derrière le bar principal. « Ici, c’est la guerre, je n’ose même pas rentrer dedans… »

Les quatre gars travaillent maintenant toute l’année sur leur festival et sont fiers du travail accompli, mais surtout de celui de toute l’équipe. « J’essaie de rester humble, comme en musique, dit Pierre-Luc. C’est un trip de chums. Pas juste Les Trois Accords, tout le monde. »

Et leur objectif reste que tout le monde se sente bien : les artistes, le public – pour Charles Dubreuil, la sécurité est une priorité –, les organisateurs, soutient Simon Proulx. « On a envie que le festival soit le fun, et pour nous, ça doit être le fun à organiser. »

Le spectacle

L’objectif du Festival de la poutine a toujours été d’offrir une diversité de spectacles aux gens de Drummondville. Pour 45 $, les festivaliers peuvent voir 18 artistes en trois soirs, dont Koriass, Lou-Adriane Cassidy et Ariane Moffatt… ainsi que Les Trois Accords eux-mêmes vendredi.

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Les gars des Trois Accords, réunis autour d’une poutine le temps d’une photo

Après deux ans de pandémie et de « vidanges absolues », dixit Charles Dubreuil, ce spectacle avait quelque chose de symbolique pour le groupe, qui n’a joué que quatre fois dans son festival en 15 ans.

Le groupe est monté sur scène à 21 h 30, la pédale au plancher, pour se produire devant le public mixte et très relax du festival.

Le site était plein à craquer pour célébrer ses enfants chéris, et il n’a fallu qu’une chanson pour que le feu prenne, du devant de la scène jusqu’à la tente V.I.P.

  • Un public enthousiaste

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    Un public enthousiaste

  • Les Trois Accords ont livré un spectacle à un rythme effréné vendredi soir.

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    Les Trois Accords ont livré un spectacle à un rythme effréné vendredi soir.

  • Retrouvailles avec le public de leur ville natale

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    Retrouvailles avec le public de leur ville natale

  • Simon Proulx

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    Simon Proulx

  • L’ambiance de fête du Festival de la poutine

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    L’ambiance de fête du Festival de la poutine

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Accompagné de Mélissa Lavergne aux percussions et de Gabriel Gratton aux claviers, le groupe a enchaîné les hymnes libérateurs à un rythme effréné : Corinne, Hawaïenne, J’aime ta grand-mère, pour n’en nommer que quelques-uns.

« Merci d’être là, merci de faire vivre cet évènement », a dit Simon Proulx au public, touché. Sur le côté de la scène, des bénévoles et des proches assistaient au spectacle de près, et le chanteur et organisateur les a invités à venir les rejoindre pendant Saskatchewan. C’était franchement émouvant à voir. Même s’il reste une journée de festival, ce samedi, on peut dire que la boucle est bouclée, tout en plaisir et en amitié.