Pour The Black Keys, la musique coule de source, c’est une affaire d’instinct qui pousse naturellement Dan Auerbach et Patrick Carney à créer. La Presse s’est entretenue avec ce dernier, à quelques jours de la sortie de Dropout Boogie, 11album studio du duo d’Akron, en Ohio.

Bien que les deux musiciens n’aient jamais cessé de se réclamer de leur patelin du Midwest américain, ils sont tous deux installés à Nashville depuis des années. Malgré cela, ils travaillent dans le studio de Dan Auerbach de la même façon que lorsqu’ils s’amusaient à composer dans le sous-sol de Patrick Carney, à Akron. « Nous avons jammé pendant une semaine ou deux, et quand on trouvait quelque chose qui nous plaisait, on l’enregistrait, nous apprend le batteur en riant au bout du fil. On est sortis de cette première séance avec 17 idées de chansons, après quoi on a pris une pause de quelques semaines. Quand on est revenus en studio, on s’est finalement retrouvés avec 20 chansons, on en a conservé 10 pour l’album. »

On parle donc de 20 pièces pondues en quelque six semaines de travail, où le groupe n’avait absolument rien sur la planche, mis à part un furieux goût de composer.

On avait enregistré Let’s Rock de la même façon, mais la démarche est plus proche de celle de Brothers. On avait peut-être trois ou quatre chansons en tête, mais sinon, tout le reste a été réalisé en studio. C’était la première fois à l’époque que l’on travaillait d’une telle façon.

Patrick Carney

Après quelques écoutes de Dropout Boogie, on peut témoigner que le résultat est aussi inspiré que celui de Brothers, la méthode sied donc bien aux Black Keys. Toutefois, le plus récent album a été fait selon des horaires un peu différents que ceux observés il y a 12 ans : « On commençait vers midi et on rentrait à la maison à 17 h pour s’occuper des enfants », nous dit Carney, qui est père d’un poupon de 3 mois et d’un bambin de trois ans et demi, sans compter l’adolescente de 16 ans de sa conjointe Michelle Branch. « On a donc consacré environ 25 heures par semaine à notre travail en studio, c’était un emploi à temps partiel, ajoute-t-il en rigolant. Pour Brothers, on finissait tard en soirée, on faisait des heures supplémentaires ! »

Maestro Billy Gibbons

Il y a une dizaine d’années, The Black Keys avait eu l’occasion de passer du temps en studio avec Billy Gibbons, mais la collaboration avec le légendaire leader de ZZ Top n’avait débouché sur rien de concret. Ce n’était que partie remise : « Quand on a entendu dire que Billy était en ville, on lui a demandé de passer nous voir et on s’est aussitôt mis à jammer, nous raconte Patrick Carney. C’était la première fois que j’improvisais comme ça avec une vraie rock star, la première fois que je faisais de la musique avec une idole. On a enregistré tout ça, Dan a par la suite ajouté des mots à la musique et on s’est retrouvés avec une chanson. En fait, on a aussi commencé deux autres pièces de la même façon, je pense honnêtement qu’on aurait pu faire un album complet avec Billy ! »

Le son caractéristique de la guitare de Gibbons enjolive Good Love de superbe façon, de même que l’on retrouve certaines intonations propres au rock classique à la Bad Company ou Cheap Trick dans d’autres pièces, notamment Baby I’m Coming Home.

« On n’écoute pas vraiment ce genre de musique, mais on a grandi à Akron et le rock classique occupait toute la place à la radio. J’ai donc tenu cet héritage pour acquis jusqu’à ce que je déménage, mais je sais aujourd’hui qu’on est mieux avec du rock classique qu’avec le mauvais country qu’on entend sur les ondes ici à Nashville ! »

Le rock classique a quelque chose de réconfortant, c’est comme une grosse doudou. Et c’est amusant, et justement, la musique devrait toujours être amusante !

Patrick Carney

Le plaisir est évidemment une constante chez The Black Keys, autant dans Dropout Boogie que dans le premier album du duo, The Big Come Up, lancé il y a 20 ans presque jour pour jour.

Patrick Carney ne voit donc pas de raison de changer une recette gagnante. « C’est avec plaisir que j’ai vu le monde changer, que j’ai vu la musique changer, mais le mieux pour nous est de continuer d’évoluer à notre propre rythme, sans tenter de suivre les tendances populaires, soutient le batteur de 42 ans. Il y aura toujours des gens qui vont apprécier ce que l’on fait, en restant authentiques. Justement, beaucoup de personnes sont en quête d’authenticité, les adolescents en particulier, qui ont bien du mal à saisir ce qui est vraiment sincère. Parce que la ligne est fine entre la bullshit et ce qui est authentique… »

The Black Keys sera de passage à Toronto en septembre, aucune date n’est prévue pour l’instant pour Montréal, mais Patrick Carney promet qu’ils vont revenir au Québec dans l’année à venir.

Dropout Boogie

Rock

Dropout Boogie

The Black Keys

Nonesuch Records
Sortie le 13 mai