(Paris) Test anti-COVID-19 négatif et masque obligatoire pour danser dans la fosse. Le groupe Indochine esquisse samedi le retour espéré des foules dans les salles, lors d’un concert-test à Paris, longtemps attendu par un secteur à l’arrêt depuis mars 2020.

« C’est le partage du bonheur, du plaisir. Cette sensation qu’on vit quelque chose tous ensemble », s’imagine déjà Marjorie Vandervaeren, 36 ans, l’une des volontaires présélectionnées venue se faire tester dans la salle de concert de Bercy, transformée en grand centre de dépistage.

Même si ce sera sans bar et avec un horaire adapté au couvre-feu à 21 h, « ça va faire du bien », ajoute-t-elle, en se souvenant de son dernier « gros » spectacle : « Muse au Stade de France… en 2019 ».

Samedi, Indochine et ses tubes qui ont traversé les générations revient sur scène après avoir dû reporter d’un an, au printemps-été 2022, la tournée célébrant ses 40 ans.

Pour le live, l’enjeu est crucial. « Il y a toute une partie du secteur qui est à l’arrêt depuis le 20 mars 2020, ce sont les concerts debout, peu importe le niveau de la jauge », explique Malika Seguineau, directrice générale du Syndicat du spectacle musical et de variété (Prodiss), qui porte le projet avec l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) et le soutien du gouvernement.

« On nous dit qu’après le 30 juin, on pourra recommencer à reprogrammer des festivals debout, mais avec une contrainte très forte, une personne tous les 4 m2. Ça veut dire diviser la jauge par 12. Pour un secteur qui vit de la billetterie, c’est intenable », ajoute-t-elle.

Même s’il arrive tard, après plusieurs reports, et des expérimentations similaires en Espagne ou au Royaume-Uni, le but reste « de construire un protocole sanitaire pour une reprise à l’automne », explique-t-elle.

« Expérience scientifique »

Le volet scientifique est assuré par l’AP-HP. Avec pour hypothèse de base que « le fait d’être dépisté avant le concert suffit à limiter la transmission », résume Constance Delaugerre, professeure de virologie à l’hôpital Saint-Louis à Paris et coordinatrice de l’étude, dont de premiers résultats sont attendus fin juin.

Elle sera menée sur deux populations : d’un côté, 5000 spectateurs testés négatifs parmi des 18-45 ans, sans facteurs de risque de formes graves, danseront sur « L’aventurier », avec masque chirurgical, mais dans la fosse et sans distanciation physique ; de l’autre côté, 2500 participants seront invités à rester chez eux.

« Notre hypothèse, c’est que le nombre de positifs sera proche dans les deux populations et donc la reprise des concerts sans distanciation pourrait être mise en place, avec un protocole de testage en amont et en ne laissant entrer que des gens testés négatifs, le temps que la vaccination soit suffisamment élevée », explique Constance Delaugerre, qui prévient : « à la fin de l’été, on aura atteint un grand nombre de personnes vaccinées, mais pas l’immunité collective ».

Jusqu’à vendredi, tous les volontaires sont convoqués pour un premier test antigénique à Bercy, où leur sont remises deux enveloppes pour des tests salivaires le jour J et une semaine plus tard.

« Jusqu’ici, j’avais l’impression que j’irai à un concert. Mais avec tout le protocole, on comprend vraiment que c’est une expérience scientifique », raconte Romain Debenay, un Parisien de 33 ans, alors que l’arène de Bercy a pris des allures de laboratoire, avec des préleveurs en blouses et charlottes sur la tête.

L’expérimentation a aussi pour but de tester l’inclusion du test négatif dans l’application « tousanticovid », une préfiguration du futur passeport sanitaire. Enfin, des caméras doivent permettre de mesurer tout au long du concert si le masque est bien porté ou s’il y a un relâchement.

Le budget de l’opération s’élève à 1,4 million d’euros, financés par des fonds publics et privés. Pour l’occasion, Indochine se produira gratuitement.