Le chef et bassoniste Mathieu Lussier a mille tours dans son sac, et la pandémie lui a permis d’en ajouter quelques-uns de plus. Discussion avec le volubile directeur artistique de l’ensemble baroque Arion.

« Un des projets qui m’étaient vraiment chers quand j’ai pris la direction artistique d’Arion était qu’il devienne un petit peu un genre de porte-étendard de tous les travaux qui se font en France depuis la création du Centre de musique baroque de Versailles, qui fait un travail hallucinant de revalorisation du patrimoine musical français que je trouve très excitant. Ces gens-là ont au moins 25 ans d’avance sur nous », s’enthousiasme le musicien montréalais.

« Au Québec, cela reste notre héritage culturel d’une certaine façon, poursuit-il. Je trouvais qu’il y avait peu d’organismes qui décidaient de prendre résolument cette couleur-là », d’où le partenariat tissé avec l’institution française, avec projets d’enregistrements chez ATMA et prêts de partitions à la clé.

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Des membres de l’ensemble Arion

Le prochain concert, La Chapelle du Roi-Soleil, qui aura lieu les 19, 20 et 21 novembre à la salle Bourgie, mettra en valeur cet héritage français de la plus belle des manières en collaboration avec le Studio de musique ancienne de Montréal. Les chanteurs et les musiciens interpréteront quelques-uns des joyaux écrits pour la Chapelle royale par Lully, Charpentier et autres.

Et, surprise, l’orchestre comptera en son sein un serpent. Un quoi ? Il s’agit d’un instrument de la famille des cuivres dont le nom dérive de sa forme en « s ». De timbre grave, il était notamment utilisé pour doubler les voix à l’église. « Dans un orchestre, c’est comme la voix de Dieu, ça enrobe tout ! », décrit Mathieu Lussier.

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Un vieux serpent

Mais les joueurs de serpent ne courent pas les rues. Un peu par hasard, la musicienne et animatrice Catherine Perrin, conjointe du directeur d’Arion, a appris qu’un de ses propres ancêtres jouait de cet instrument à la cathédrale de Québec sous le Régime français. Elle a décidé d’en offrir un à sa douce moitié.

Jouer d’un cuivre quand on joue d’un bois ne va cependant pas de soi. « Je me suis amusé à souffler dedans, j’y ai pris goût, c’était la pandémie et j’avais du temps », raconte celui qui est d’abord formé comme bassoniste. « Je me suis rendu compte qu’il y avait un joueur de serpent à Montréal, un Américain qui fait son doctorat à McGill sur le serpent en Nouvelle-France. Je me suis mis à prendre des cours et, maintenant, je sais jouer du serpent. Ce fut mon épiphanie covidienne ! », affirme le musicien.

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Les violons de l’ensemble Arion

Il s’agit du genre de valeur ajoutée auquel veulent avoir recours Arion et son directeur pour faire venir le public. Car il ne suffit plus d’être bon pour remplir les salles. « La musique baroque, de nos jours, c’est une musique qui touche, c’est une musique qui plaît, explique le bassoniste. Mais les gens ne vont pas se déplacer si on joue le 4e ou le 5e concerto de tel compositeur obscur. C’est vraiment l’expérience, l’énergie, la façon avec laquelle la musique est livrée qui est déterminante. »

Cette énergie sera sans doute au rendez-vous aussi pour les concerts des 18 et 19 décembre de l’ensemble, qui prennent place au sein de l’intégrale des cantates de Bach organisée par la Fondation Arte Musica. L’instrumentation généreuse – incluant cors et trompette – demandée par les œuvres au programme exigera d’utiliser une extension à la scène de la salle Bourgie.

Entre son serpent, son basson et sa baguette, Mathieu Lussier ne chômera pas dans les prochains mois, lui qui vient également d’acquérir un ophicléide (une sorte de serpent à clés) et un basson russe ! « Je ne sais pas encore quoi faire avec ça, mais je cogite », conclut-il en riant.

D’autres rendez-vous

Le Conservatoire sur les flots du Rhin

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Le chef Jacques Lacombe

Les étudiants du Conservatoire de musique de Montréal auront la chance de se produire à la Maison symphonique le dimanche 14 novembre (14 h 30) sous la direction du chef Jacques Lacombe et de deux de ses étudiants pour interpréter un programme de chefs-d’œuvre du romantisme, dont la fougueuse Symphonie n3, dite « Rhénane », de Schumann. Également au programme : le Concerto pour violon n3 de Saint-Saëns (soliste : Elsa Barozzi) et le Concerto pour violoncelle de Schumann (soliste : Marion Portelance).

L’Orchestre symphonique de Longueuil joue Mozart

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Le violoniste et chef de l’OSL Alexandre Da Costa

Après l’Orchestre symphonique de Laval, c’est au tour de l’autre OSL de venir se produire à la Place des Arts. Sous la direction du violoniste Alexandre Da Costa, l’Orchestre symphonique de Longueuil rendra hommage à Mozart à la Cinquième Salle le dimanche 28 novembre à 14 h 30. En plus de la Symphonie n40, le concert mettra en lumière le Concerto pour piano n24 du compositeur autrichien. La soliste sera la jeune Élisabeth Pion, ancienne élève du Conservatoire qui vient de faire ses débuts au Wigmore Hall de Londres.

Marie-Nicole Lemieux : sérieusement lyrique

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Marie-Nicole Lemieux

Besoin de faire le plein de beauté avec l’obscurité automnale qui s’installe ? Marie-Nicole Lemieux sera de passage à la salle Bourgie le 1er décembre à 19 h 30 dans un programme recherché qu’elle interprétera avec son complice, le pianiste Daniel Blumenthal. Nul doute que la contralto saura creuser les ténèbres des Quatre chants sérieux de Brahms et planer sur les cimes des délicieuses Expressions lyriques de Massenet. En bonus : la participation de l’altiste Victor Fournelle-Blain dans les Deux chants, op. 91, de Brahms.

Un phénomène du clavier au LMMC

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Stewart Goodyear

Qualifié de « phénomène » par le Los Angeles Times, le pianiste torontois Stewart Goodyear est un habitué de la métropole. Et c’est tant mieux, car l’hyperactif musicien qui, à 43 ans, a déjà à son actif une intégrale des sonates de Beethoven, propose chaque fois des programmes intelligents préparés avec une remarquable minutie. Pour sa venue à la salle Pollack le dimanche 5 décembre (15 h 30) pour le Ladies Morning Musical Club, il interprétera trois massifs du répertoire pianistique : la Sonate de Berg, Gaspard de la nuit de Ravel et les Tableaux d’une exposition de Moussorgski.