Oubliez les élections municipales. Les grandes gagnantes de dimanche soir s’appellent Klô Pelgag – elle a même égalé un record de Céline Dion – et Roxane Bruneau, chacune ayant remporté deux importants suffrages lors du gala de l’ADISQ.

La première a été couronnée dans les catégories Auteur.trice ou compositeur.trice de l’année et Spectacle en ligne de l’année – francophone, tandis que la seconde a mis la main sur les Félix d’interprète féminine de l’année et de chanson de l’année, deux prix en partie décernés par le public.

La soirée télévisée, conduite par Louis-José Houde (alias Jos Louis selon FouKi) en direct de la salle Wilfrid-Pelletier, était marquée par le retour des spectateurs. « On est tellement beaux et nombreux qu’on devrait se partir notre propre variant », a blagué l’animateur, avant de livrer un monologue mordant sur fond d’appropriation culturelle et d’allégations d’inconduites sexuelles.

PHOTO ÉRIC MYRE, FOURNIE PAR L’ADISQ

Louis-José Houde

Le gala avait d’abord été introduit par un slam de David Goudreault, J’en appelle à la poésie, déposé sur les cordes d’Angèle Dubeau & La Pietà. Le chanteur innu Scott-Pien Picard, le musicien électronique CRi et la coqueluche des « cocos » Roxane Bruneau ont aussi participé au pot-pourri d’ouverture.

Aux côtés de Céline

Tôt dimanche soir, Klô Pelgag a cueilli un premier trophée pour son spectacle virtuel Vivre, puis un deuxième fort convoité pour son travail d’autrice et de compositrice sur le disque Notre-Dame-des-Sept-Douleurs. En 2017, la chanteuse était devenue la première femme à remporter une telle récompense en près d’un quart de siècle. La chouchoute des galas a été plus conservatrice qu’à l’habitude dans ses remerciements, invitant tout de même les radios commerciales à mieux jouer leur « rôle social » et à mettre de l’avant les talents québécois.

Grâce à son doublé de dimanche, Klô Pelgag porte sa collection 2021 à 13 statuettes sur une possibilité de 16, en incluant celles décernées lors du Gala de l’industrie. Mercredi, l’autrice-compositrice-interprète a mis la main sur quatre Félix, dont celui du Choix de la critique, pendant le Premier gala de l’ADISQ.

L’association estime que l’artiste a fait main basse, au total, sur six catégories dites « artistiques » (par opposition à « industrielles »), ce qui la place dans l’histoire aux côtés de Céline Dion. La célèbre chanteuse de Charlemagne avait agrippé six statuettes en 1985.

Roxane Bruneau voit double

Pelgag aurait clos le débat en remportant le prix d’interprète féminine de l’année, mais c’est plutôt Roxane Bruneau qui a ravi les honneurs, en partie grâce aux votes des internautes.

J’ai lâché l’école, j’ai lâché ma job. Ça, ça me prouve que c’est correct, je ne suis pas dans la marde.

Roxane Bruneau

PHOTO ÉRIC MYRE, FOURNIE PAR L’ADISQ

Roxane Bruneau

Ses « cocos » ont aussi plébiscité la chanson À ma manière, la préférée de l’académie et du public devant Sur mon épaule, des Cowboys fringants. En ajoutant ses deux Félix déjà en poche, Roxane Bruneau établit sa récolte à quatre récompenses.

Sans surprise, le quatuor qui a fait pleurer l’Amérique l’an dernier s’est rattrapé en allant chercher le Félix du groupe ou du duo de l’année. Plus incongru, mais ô combien réjouissant : CRi est devenu le premier musicien électronique à être désigné Révélation de l’année grâce à son excellent album Juvénile. « Il y a huit ans, j’étais dans le sous-sol de ma mère. Elle m’a dit : « Pousse, va en musique » », a-t-il raconté, avant de conclure avec un senti : « Enfin on peut danser, criss ! »

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CRi

Preuve que le hip-hop poursuit sa progression dans le domaine populaire et commercial, c’est le rappeur FouKi qui s’est levé pour empoigner la statuette d’interprète masculin de l’année. « Je ne pensais pas que j’allais gagner, alors je n’ai rien préparé », a-t-il avoué. C’était la deuxième fois que le versificateur foulait la scène, la première pour un numéro improbable aux côtés de Dominique Fils-Aimé et d’Élage Diouf.

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FouKi

FouKi, par contre, a vu ses projets Grignotines de luxe et Génies en herbe, avec Koriass, déclassés par Normal de l’est, premier disque complet de Connaisseur Ticaso, au rang d’album rap de l’année. Il s’agit d’un premier Félix pour la légende du street rap montréalais, absente dimanche.

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Anachnid

Première statuette également pour Anachnid, artiste autochtone de l’année, qui s’était contentée d’une nomination l’année dernière après le triomphe d’Elisapie. C’est cette dernière qui a présenté le Félix, majoritairement en inuktitut.

Après une performance country regroupant Léa Jarry, Guylaine Tanguay, Irvin Blais et Alex Burger, ce dernier allait être récompensé pour Sweet Montérégie dans la catégorie Album country. « Allez voir les bands que vous aimez », a-t-il plaidé, faisant écho à un appel similaire de Vincent Vallières. Ce dernier a par ailleurs sorti sa guitare le temps d’Homme de rien, de concert avec l’instrumentiste Simon Leoza.

Toujours sur le plan scénique, une Klô Pelgag ultra énergique a défendu sa pièce Mélanine, se déplaçant au travers des spectateurs épars alors qu’une danseuse s’agitait dans une espèce de boule à neige. Charlotte Cardin, qui a remporté ses trois premiers Félix mercredi lors du Premier gala de l’ADISQ, a quant à elle offert la poignante ballade piano-voix Anyone Who Loves Me, chœur à l’appui. « L’album est disponible partout, les billets sont disponibles… nulle part », avait rigolé Louis-José Houde lors de la présentation.

C’est Louis-Jean Cormier qui a reçu le premier Félix de la soirée. L’auteur-compositeur-interprète s’est distingué grâce à son quatrième album solo, Le ciel est au plancher, dans la catégorie Album de l’année – adulte contemporain. Daniel Bélanger a pour sa part remporté son 23Félix en carrière pour l’album instrumental Travelling. Il n’était toutefois pas présent pour recevoir son prix.

Au total, 12 Félix ont été remis dimanche soir au cours d’une soirée sans grand éclat mais réglée comme du papier à musique.