Dans leurs chansons, les femmes utilisent moins de mots que leurs vis-à-vis masculins, mais tant les chanteuses que les chanteurs parlent le plus souvent... d'amour, montre notre analyse des paroles des chansons en français et en anglais qui figurent dans les top 50 de 2018 de Billboard, de Spotify et de l'ADISQ.

Du côté des francophones, le nombre moyen de mots utilisés par les artistes féminines (144) est plus bas que chez les hommes (202). Même constat si on regarde l'utilisation de mots uniques. En moyenne, 67 mots différents se retrouvent dans une chanson chantée par une femme et 108 par des hommes. Après analyse du top 50 de Billboard et de celui de Spotify pour 2018, on observe exactement la même tendance chez les artistes anglophones (181 mots en moyenne pour les femmes contre 273 chez les hommes).

Des champs lexicaux bien différents

Pour se retrouver en tête des palmarès, mieux vaut parler d'amour ! En analysant les paroles des 50 chansons du palmarès de l'ADISQ et de celles du classement de Spotify, on se rend compte que l'amour (qu'il s'agisse des peines d'amour ou des jeux amoureux) occupe une place de choix chez les interprètes féminines, mais aussi chez les hommes, qui utilisent toutefois un champ lexical différent, plus charnel (embrasser, folie, corps, femme). Ces derniers ont tendance à favoriser les textes sur la vie entre gars et la vie de manière générale, tandis que les femmes se tournent plus souvent vers l'introspection (empirer, changer, reconstruire, etc.).

Le clivage se creuse du côté des artistes anglophones : les chanteuses parlent surtout du fait d'être amoureuse, de leurs peines d'amour et du style de vie typique du monde du rap (bitch, money, paradise, smack, kick). Les artistes masculins parlent aussi d'amour de manière plus charnelle (like, lover, kiss, feeling), et tout comme leurs confrères francophones, de la vie entre potes, mais dans un registre plus gangsta (shit, yeah, hard, gang, n***a).

Peu d'études sont disponibles sur le sujet (encore moins en français), mais dans le plus récent numéro du Journal of Popular Music Studies, deux chercheurs de la Lawrence Technological University au Michigan, Kathleen Napier et Lior Shamir, se sont penchés sur les paroles de plus de 6000 chansons du Billboard Hot 100 de 1950 à 2016. Leur étude montre que dans les années 50, les fans de musique préféraient les chansons joyeuses, alors que nos contemporains semblent plus friands de textes exprimant la tristesse ou la rage. Une tendance qui se renforce au fil des décennies. Le dégoût et la peur sont également des sentiments qui ont pris plus de place dans les chansons, mais dans une moindre mesure.