Dave Gahan tournoyait sur scène en chantant Policy Of Truth, le pied leste, les baguettes en l'air, un mince sourire collé au visage. Depeche Mode officiait depuis une trentaine de minutes déjà et il est vrai que le chanteur avait toutes les raisons de se réjouir: une bonne partie de la foule était debout depuis le début, hurlant comme si on était en 1990, et sa voix tenait le coup. Mieux que ça, même.

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Sa performance vocale de mardi soir, au Centre Bell, contrastait avec celle d'il y a six ou sept ans au même endroit. On se rappelle en effet que lors de la tournée Playing the Angel, Gahan avait invité la foule à chanter à sa place dès le troisième morceau, pas tant pour la mettre dans l'ambiance que pour pallier sa propre défaillance. Dire que c'est les doigts croisés qu'on a fait le chemin jusqu'au Centre Bell serait à peine exagéré.

Il a étonné derrière le micro, en plus de jouer les meneurs de piste avec le charisme qu'on lui connaît et qui manquera toujours à ses collègues Andrew Fletcher et Martin Gore. Ce dernier a néanmoins agréablement surpris en entonnant But Not Tonight (habituellement chantée par Gahan) de manière dépouillée (et un peu appuyée tout de même, c'est Gore). Il s'est fait pardonner en chanson la platitude (The Child Inside) qu'il avait interprétée avant.

Baisse d'énergie

Après cet intermède, on attendait que Depeche Mode passe à la vitesse supérieure, car le niveau d'énergie baissait dramatiquement. Le spectacle avait pourtant commencé de belle manière avec deux chansons de Delta Machine (paru plus tôt cette année) et un chapelet de chansons anciennes dont Policy Of Truth, Walking In My Shoes et Black Celebration. Seule Precious a été gâchée par une rythmique inutilement matraquante, alors que cette chanson touchante commande de la délicatesse.

Soothe Your Soul a donné un petit coup de chaleur, avant que la quelconque Pain That I'm Used To ne refroidisse de nouveau l'atmosphère. Avec Question Of Time, l'irrésistible Enjoy the Silence et Personal Jesus, Depeche Mode a toutefois terminé en force. Ça n'allait pas changer au rappel avec des canons comme I Feel You et Never Let Me Down Again.

Retour dans les années 80

La synth pop de Depeche Mode, ponctuée d'éléments de musique industrielle typiquement années 80, a bien sûr pris un coup de vieux. Le mot «nostalgie» mériterait d'être écrit quelque part ici en lettre majuscule. Avec le répertoire qu'il possède, le groupe aurait aussi pu mettre de côté quelques banalités et interpréter encore plus de ses tubes, ce qu'il n'a sans doute pas fait précisément pour tenter de contourner cette même idée de nostalgie.

Dave Gahan est, cela dit, un showman de première classe. Puisque les spectacles de Depeche Mode reposent presque entièrement sur ses épaules, quand sa voix est au rendez-vous, son groupe et lui méritent les tonnerres d'applaudissements sous lesquels ils ont été noyés hier par plus de 12 000 admirateurs. La conclusion s'imposait d'elle-même lorsque, près de deux heures après l'entrée en scène de son groupe, il chantait I Just Can't Get Enough.