Hier, dans un Lion d'or archi-bondé, était lancé le 15e concours des Francouvertes, à l'intention de la scène émergente francophone. Artistes, gens de l'industrie, bénévoles, tous mettaient la main à la pâte pour qu'un des concours les plus déterminants qui soient se poursuive - après tout, ne nous a-t-il pas révélé aussi bien Les Cowboys Fringants, Loco Locass et Karkwa que Bernard Adamus ou Damien Robitaille... entre autres?

Quand on demande à Sylvie Courtemanche, directrice générale des Francouvertes, ce qu'elle a prévu pour célébrer les 15 ans d'existence du concours, elle répond: «Continuer à faire les Francouvertes.» Et elle le dit sérieusement. Car le concours, pourtant établi et reconnu sur la scène musicale québécoise, est toujours en butte à des difficultés en matière de financement. Que la cuvée des participants 2011 soit particulièrement prometteuse, si on en juge par les extraits entendus hier, n'y change pas grand-chose...

En effet, le financement public, tous ordres confondus, qui était de 15 000 $ il y a quelques années, est revenu à... 15 000 $. Si ce n'était du financement privé (le présentateur officiel, Sirius Radio Satellite, investit près de 10 fois la même somme dans l'affaire) et des revenus de l'organisme lui-même (billetterie, frais d'inscription des participants, etc.), les Francouvertes n'existeraient plus ou n'auraient aucun prix à remettre aux gagnants. Exit, le concours qui a révélé Kaïn et Alfa Rococo, Dobacaracol et La patère rose (qui est d'ailleurs l'un des porte-parole des 15es Francouvertes).

Tous les concours musicaux - que ce soit celui de Granby ou de Petite-Vallée - sont touchés par cette réalité (en raison d'une refonte d'un programme de MusicAction, entre autres). Pour les Francouvertes, en tout cas, la situation pourrait être fatale. C'est d'autant plus dommage que le concours est un lieu de rencontres fertiles entre artistes émergents et gens du milieu: «J'étais contente que les Francouvertes pensent à moi, explique par exemple l'auteure-compositrice-interprète Marie-Pierre Arthur, deuxième porte-parole de l'événement, parce que ça me permet de côtoyer de nouveaux musiciens, de fouiner dans de nouveaux projets, de voir quelles pourraient être les collaborations possibles avec certains des participants.»

50-50

Rappelons qu'une des forces des Francouvertes est son mode de scrutin: les participants sont jugés et choisis à 50 % par le public et à 50 % par un jury professionnel. Pour être valide, chaque bulletin de vote doit absolument comprendre des commentaires sur la performance des artistes. La logique du vote n'est pas de nommer un gagnant chaque soir: il est déjà arrivé que les trois artistes présentés un soir de préliminaire se retrouvent aux demi-finales. C'est la qualité de la performance qui compte.

Parmi les 213 inscriptions reçues pour 2011, 21 artistes ou formations ont été sélectionnés pour participer aux préliminaires, qui se poursuivront jusqu'au 21 mars au Lion d'or, avant les demi-finales (11, 12, 13 avril) et la finale (au Club Soda le 3 mai). Les règlements ont été, comme toujours, affinés: au moment de leur inscription au concours, les participants ne doivent pas avoir vendu plus de 1000 exemplaires d'albums (ventes numériques comprises), albums qui doivent être produits de façon indépendante (donc sans soutien d'une maison de disques reconnue). «Mais si pendant le concours, une maison sonde un artiste pour le signer, on l'encourage, indique Sylvie Courtemanche. Dans la vraie vie, on travaille fort pour que les musiciens puissent travailler et que les gens de l'industrie viennent les voir en spectacle, on n'est pas pour leur mettre des bâtons dans les roues une fois le concours lancé!»

Comme c'est le cas depuis cinq ans, le principal commanditaire, Sirius Radio Satellite, remet une bourse de 10 000 $ au gagnant, à utiliser pour la production d'un album, et finance également la diffusion de la finale sur Bande à part. L'an dernier, c'est Bernard Adamus qui a remporté le concours. Comme le veut la tradition, il a offert une courte performance chaleureuse hier, avant le début officiel des préliminaires des Francouvertes 2011. C'est le même Adamus qui a lancé «Devil câlice, pis vive la vie» lorsqu'il a remporté un Félix lors du dernier gala de l'ADISQ. Eh bien, «devil» et que vivent les Francouvertes, peut-on ajouter dans les circonstances.

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Les 15es Francouvertes, au Lion d'or. Info: francouvertes.com