Le quatrième programme de la série El Duende Flamenco n'a pas fait mentir les pronostics les plus optimistes : nous venons de passer une semaine presque parfaite au Théâtre du Nouveau Monde, le tout coiffé par la formation de Juan Carmona, sublime en cette fin de parcours.

En demi-cercle autour de ce guitariste virtuose, des musiciens habités et d'autant plus compétents ont offert vendredi (et samedi, ultime représentation de la série) une éclatante prestation, pour ainsi coiffer cette immersion de grande culture ibérique. Certes l'un des meilleurs éléments de cette programmation en salle au 31e FIJM, j'insiste.

Aux côtés de Juan Carmona se trouvent le guitariste Paco Carmona (en soutien au soliste), le flûtiste Domingo Patricio, le percussionniste Sergio Martinez, le bassiste Didier Del Aguila, le chanteur Rafael De Utrera, le danseur Rafael De Carmen.

Comme le guitariste gitan (de nationalité française et de parents andalous) l'avait annoncé en interview, ce concert présente la forme musicale telle que ses plus brillants praticiens la conçoivent en 2010. Ce flamenco nuevo, en fait, trace le même sillon que celui du super guitariste Paco de Lucia, grand réformateur du genre depuis les années 70. Mais aussi des Tomatito, Vicente Amigo, Gerardo Nunez et autres Carlos Pinana, soit cette mouvance de guitaristes espagnols de haut niveau qui ne cessent de s'ouvrir à de nouvelles sonorités musicales... tout en préservant la tradition flamenca.

Plus précisément, leur démarche consiste à conserver les harmonies et rythmes originels de leur expression ancestrale en en étoffant les rythmes, harmonies et trajectoires mélodiques de musiques plus modernes. Chez Carmona, par exemple, les épices du jazz moderne sont parfaitement identifiables.

Ainsi, on savoure cette musique toujours brûlante malgré ses réformes. Ces mélodies recherchées de la flûte traversière, ces interventions très jazzy de la basse électrique, ces rythmes appuyés de la percussion, ces chants déchirants, félins. Et, il va sans dire, ces grandes qualités de soliste dont témoigne Juan Carmona. Même s'il a passé la majorité de son existence dans le Midi français, ce virtuose a parfaitement intégré l'esprit flamenco.

Tributaire d'un patrimoine transmis oralement, le guitariste leader et compositeur peut prétendre faire de la grande musique. Et ainsi se positionner parmi les plus grands du flamenco nuevo.