La seule entreprise au Canada qui fabrique des vinyles est située... à Saint-Lambert. Et le seul homme derrière les presses vient du monde... des finances.

L'usine de RIP-V a ouvert ses portes il y a deux ans. Philippe Dubuc a quatoze presses, mais seulement six sont en fonction. «Ce sont des presses d'époque qui ont 30 ou 35 ans. Ça coûterait trop cher d'en faire des neuves, explique le père de famille. Je fais 2000 disques par jour. Mais un jour, quand j'aurai des employés, j'espère en faire 5000.»

Le copropriétaire-ouvrier de 43 ans vient de faire les vinyles du nouveau disque d'Alkatine Trio («mes premiers en couleur»), et ceux du prochain album live de The Weakerthans. Il s'apprête à imprimer ceux du deuxième album du groupe montréalais Plants&Animals, ainsi que plusieurs rééditions de disques de Tom Waits.

Ce sont des amis du distributeur FAB qui ont convaincu Philippe Dubuc d'investir avec eux. «Ils voyaient que le vinyle revenait, mais qu'il y avait de gros problèmes d'approvisionnement.»

Ses futurs partenaires lui ont expliqué que ce ne sont pas des baby-boomers qui sont derrière la deuxième vie du vinyle. «Quand j'ai compris que l'intérêt venait des jeunes, je me suis dit: il y a quelque chose là.»

Philippe Dubuc a donc quitté le domaine des chiffres en complet-cravate pour apprivoiser un tout autre métier: les presses à vinyle. C'était un grand changement, dont il est très heureux. «C'est romantique de presser un vinyle. J'ai fait le disque de Patrick Watson. C'était l'fun de le tenir dans mes mains. Et j'aime ça quand je reçois les labels qui vont au centre.»

RIP-V coordonne toutes les étapes de la production. La laque du disque est découpée à Chicago ou à New York, puis le moule est fait au New Jersey, puis Philippe Dubuc presse les vinyles. Quant aux pochettes et aux centres, ils sont imprimés respectivement chez Ross-Ellis et Markham Printing. «La plupart du temps, le tout est assemblé ici, mais certains clients préfèrent le faire eux-mêmes», souligne Philippe Dubuc.

Aux États-Unis, environ huit compagnies fabriquent des vinyles, dont «trois qui sont sérieuses», indique le seul Mohican du vinyle au pays, mais peut-être pas le dernier.