(Paris) L’écrivain français Michel Houellebecq est retourné vendredi au contact de son public, dédicaçant dans la bonne humeur des bandes dessinées dans une galerie d’art à Paris après une phase qu’il disait la plus difficile de sa vie.

« Si j’avais su, je ne serais pas venu », a-t-il plaisanté au moment d’être interrogé devant la caméra de l’AFPTV. Mais, malgré sa phobie notoire des évènements publics, il s’est prêté de bonne grâce au jeu des signatures, auprès de quelques fans.

Fin mai et début juin, il s’était livré à une tournée médiatique inhabituellement intense pour la sortie de son récit Quelques mois dans ma vie, octobre 2022-mars 2023.

Il avait dû répondre à des questions difficiles autour d’une période qu’il a décrite comme catastrophique pour sa réputation et sa santé mentale, après des démêlés avec un réalisateur néerlandais qui tente de sortir un film pornographique dont il est acteur, et des accusations d’islamophobie.

Le film, intitulé Kirac 27, n’est pas encore sorti. L’écrivain, acteur improvisé, et le réalisateur, Stefan Ruitenbeek, doivent se mettre d’accord sur les scènes qui pourront être diffusées.

À ce jour, « il n’y a pas d’accord », a dit Michel Houellebecq, interrogé par l’AFP sur l’état de la procédure.

Rare

Vendredi après-midi, dans le quartier des galeries d’art du Marais, dans le centre de Paris, l’auteur de Sérotonine semblait très loin de cette préoccupation. S’il était venu, répétait-il, c’était par amitié pour le coauteur de la BD.

Rares sont les occasions où l’auteur s’est rendu accessible à ses lecteurs depuis qu’il est devenu archicélèbre avec Les particules élémentaires en 1998. Les aficionados retiennent son passage en 2011 dans une librairie parisienne.

Après les attentats de janvier 2015 en France, concomitants avec la sortie de son roman Soumission, Michel Houellebecq s’est fait discret.

Mais, vendredi, l’écrivain était au vernissage d’une exposition-vente des planches originales du roman graphique adapté de La carte et le territoire, à la galerie Romero Paprocki, qui se tient jusqu’au 29 juillet.

Sortie en novembre, elle est l’œuvre de Louis Paillard, un passionné de dessin issu de l’école Boulle, qui exerce la profession d’architecte et urbaniste.

La carte et le territoire, cinquième roman de l’auteur, avait été l’évènement de la rentrée littéraire 2010, éclipsant les 700 autres titres publiés. La critique en avait salué la dose d’autodérision, à travers un personnage d’artiste contemporain légèrement agoraphobe qui rencontre Houellebecq.

« Un lecteur au départ »

Louis Paillard, « c’est un lecteur au départ », explique le romancier. « Je n’ai pas la mémoire des dates », répond-il quand on lui demande à quand remonte cette amitié. Le dessinateur précisera que cela fait 12 ans qu’ils discutent.

« Je l’aime bien, en fait. Ce n’est pas tellement que je lui fais confiance. Pourquoi on fait confiance aux gens ? Je ne sais pas », confie Michel Houellebecq à l’AFP.

L’écrivain s’est étroitement impliqué dans ce projet, validant les planches à la fin et discutant dès le départ l’apparence des personnages, surtout du protagoniste, l’artiste Jed Martin.

« Le premier Jed Martin me plaisait moins. […] J’avais des idées. Je le voyais plus blafard que le premier personnage, plus blafard avec des cheveux noirs », détaille-t-il.

Un roman graphique, selon lui, « c’est un peu comme une adaptation au cinéma, en fait. Ça ressemble quand même beaucoup ».

Dans La carte et le territoire, Jed Martin peint un portrait intitulé Michel Houellebecq, écrivain, qu’il offre au romancier.

Dans la vraie vie, Houellebecq a choisi les planches de Louis Paillard qu’il compte accrocher au mur chez lui : « J’en ai réservé trois. Trois, ce n’est pas exagéré ».