Les libraires français ont choisi d’accorder leur prix annuel au premier roman d’Éric Chacour, Ce que je sais de toi, lors d’une cérémonie qui a eu lieu mercredi au Centre national du livre, à Paris. L’auteur montréalais devient ainsi le deuxième Québécois à remporter cette récompense depuis Anne Hébert, en 1971, avec Kamouraska.

« J’ai rarement été ému pour un prix, mais là, j’ai été ému aux larmes. C’est parce que ça en dit tellement sur la vie de ce livre », a confié à La Presse Éric Chacour.

Le roman d’Éric Chacour, qui raconte le destin d’un jeune médecin dans Le Caire des années 1960 à 1980 jusqu’à son exil, est paru l’an dernier chez Alto puis en août en France, chez l’éditeur Philippe Rey. Il est également en lice pour le Prix des libraires du Québec, qui sera dévoilé ce jeudi.

Je dois l’essentiel du succès de ce roman aux libraires qui l’ont porté des deux côtés de l’Atlantique, en France, mais au Québec aussi.

Éric Chacour

« Ce sont vraiment les libraires du Québec qui l’ont incroyablement défendu à une époque où l’attention médiatique était bien moindre qu’aujourd’hui. Ils en ont parlé avec tellement de passion que quand on a demandé à mon éditeur français ce qui avait porté son regard sur ce roman écrit par un Québécois inconnu, il a répondu qu’il l’avait repéré par l’abondance des coups de cœur de libraires du Québec sur les réseaux sociaux. C’est vraiment ça qui lui a mis la puce à oreille ! », a souligné Éric Chacour.

Un succès qui dépasse les frontières

Ce que je sais de toi a dépassé depuis sa publication le cap des 110 000 exemplaires vendus des deux côtés de l’Atlantique – un chiffre de ventes qui dépasse toutes les espérances de l’auteur qui travaille dans le milieu financier et qui planchait sur son roman dans l’ombre depuis une dizaine d’années.

« Quand j’ai terminé d’écrire ce texte, j’avais le sentiment d’avoir raconté une histoire qui était belle dans ma tête ; c’était à peu près tout, nous a raconté avec émotion Éric Chacour. Et quand Alto en a voulu, je me suis dit que ça pourrait peut-être plaire à des critiques, à des gens qui étaient un peu portés sur la littérature. Mais jamais au grand jamais je n’aurais cru avoir fait quelque chose de populaire. Et s’il l’est devenu, c’est grâce aux libraires, parce qu’ils ont été la petite étincelle qui a commencé ce bouche-à-oreille un peu fou. »

PHOTO FOURNIE PAR L’ÉDITEUR

Ce que je sais de toi

Des souvenirs « complètement fous » de sa tournée des librairies dans l’Hexagone, l’automne dernier, l’auteur en a plein la tête, justement. Il se rappelle entre autres cette librairie de Nantes qui avait fait une pyramide humaine pour défendre le livre. Ou encore cette Maison de la Presse, à Mérignac, où le libraire-propriétaire avait tapissé l’espace d’affiches, de coupures de presse et de photos du roman pour la séance de dédicaces, en plus d’offrir à ses clients une garantie « Satisfait ou remboursé » lorsqu’ils achetaient le livre – dont il a fini par vendre plus de 500 exemplaires. « J’ai plein de souvenirs comme ça. Et je ne compte pas le nombre de libraires qui en ont parlé à la télé, dans les journaux, à la radio quand on les interrogeait, chez nous, au Québec, mais aussi en France, en Suisse, en Belgique. »

En plus de s’être rendu jusqu’aux deuxièmes sélections des prix Femina et Renaudot, Ce que je sais de toi a accumulé près d’une dizaine de récompenses ici comme en France, dont le Prix des cinq continents de la Francophonie, le Femina des lycéens, le Prix du CALQ – Œuvre de la relève à Montréal et la Bourse de la découverte de la Fondation Prince Pierre de Monaco.

Le roman est déjà traduit ou en cours de traduction dans une douzaine de langues, notamment en anglais (pour une sortie prévue en septembre), en espagnol, en arabe, en allemand, en grec, en suédois, en danois et en néerlandais.

Parmi les cinq finalistes de cette 70édition du Prix des libraires français figuraient également les romans Et vous passerez comme des vents fous, de Clara Arnaud (Actes Sud), Du même bois, de Marion Fayolle (Gallimard), Pour mourir, le monde, de Yan Lespoux (Agullo), et L’enfant dans le taxi, de Sylvain Prudhomme (Éditions de Minuit).

Éric Chacour sera par ailleurs cette fin de semaine au festival Étonnants Voyageurs à Saint-Malo, en France, où le Québec est de nouveau à l’honneur après avoir été la vedette du Festival du livre de Paris en avril.