Pourquoi diable fallait-il que le Festival de jazz se termine comme les Francos? Que le public des Maliens Amadou et Mariam se fasse arroser comme l'a été celui de Roch Voisine 15 jours plus tôt?

Dimanche soir, tout était en place pour une belle fête animée par de grands ambassadeurs de ce qu'on appelle les musiques du monde. Ce rôle, Amadou et Mariam s'en acquittent si bien que le Festival de jazz a remis en après-midi au «couple aveugle du Mali» le Prix Antonio-Carlos-Jobim créé en 2004.

«Ce soir Savana Bamako Club, Amadou et Mariam» pouvait-on lire sur un panneau jaune illuminé installé du côté gauche de la scène. Amadou Bagayoko et Mariam Doumbia ont fait comme s'ils étaient chez eux. «Nous allons faire la fête» a lancé le chanteur et guitariste en annonçant la deuxième chanson au programme, Batoma, le prénom d'une dame qui préférait justement la faire, la fête, quitte à laisser son bébé seul à la maison. Un rythme irrésistible, avec percussions à l'appui, et on a vu des festivaliers se déhancher sous les parapluies qui se sont fermés progressivement, la pluie se faisant heureusement un peu moins intense. Pour l'instant.

La chanson Africa mon Afrique - «c'est le changement politique, le changement écologique, le changement éthique» chantait Amadou - a suivi, histoire de nous rappeler que les deux Maliens sont d'incorrigibles optimistes malgré la crise politique et la violence qui déchirent leur pays.

«Ça commence à aller, ils vont trouver une solution», disait Mariam quelques heures plus tôt en conférence de presse. «Notre contribution consiste à chanter et à parler aux gens, ajoutait son mari. On a réuni des artistes maliens pour chanter et parler de la paix.» C'est justement ce que devait faire avec eux au rappel leur jeune compatriote Fatoumata Diawara, dont Mariam à dit qu'elle est presque leur fille tellement ils l'ont connue jeune.

Si la musique d'Amadou et Mariam voyage si bien, c'est qu'outre ses rythmes entraînants et ses mélodies accrocheuses, elle peut compter en Amadou sur un guitariste inventif qui ne joue surtout pas au guitar hero. Son jeu coulant, sans effort apparent, et parfois même hallucinant, force l'admiration.

Mais la plus grande force de cette musique c'est encore sa capacité d'intégrer toutes sortes de styles et d'influences qui sont diverses au Mali, rappelle Amadou. Sur disque, la multiplicité des invités peut parfois agacer, mais en concert les Maliens se réapproprient totalement cette musique qui est encore plus convaincante. Tant et si bien qu'elle peut faire oublier le temps maussade à une foule compacte de Montréalais, le temps de l'un des concerts en plein air les plus jubilatoires de l'histoire du Festival.