Tel un Pasquale Vari qui replace une pile de feuilles gribouillées, mon choix est fait. Pas besoin de revoir ou de compiler mes notes (sauce trop liquide, viande coupée grossièrement, criage inutile en cuisine).

Et c’est chaud comme une salamandre dans un défi de crêpes de sarrasin farcies aux asperges.

Avant de poursuivre, truc de pro pour éviter aux Bretons et à Jean-Luc Boulay de faire une syncope ou d’avaler sa bouchée de travers : on cuit les crêpes avec du beurre et non de l’huile d’olive, merci.

De retour à nos fourneaux, deux concurrents se détachent du peloton dans la course au cordon bleu de la téléréalité Les chefs ! : L’affrontement, soit Luca Cianciulli, copropriétaire du Moccione, dans le quartier Villeray, à Montréal, et Anthony Vien, sous-chef au restaurant La Tanière de Québec.

Avec ses cheveux en bataille et sa sympathique nonchalance, Luca Cianciulli, 33 ans, découvert dans la deuxième année des Chefs !, demeure un de mes préférés.

Plus relax que Luca, tu bousilles quasiment tes pâtes fraîches dans le seul défi de la saison qu’un chef d’origine italienne n’a pas le droit de rater. Sous peine d’être banni à vie de l’épicerie Milano et du café Olimpico.

Anthony Vien, 27 ans, participant de la saison 11 (nous sommes rendus à la 13e), ne se plante pas souvent non plus. Comme Luca, il n’a pas encore été envoyé au duel ce printemps. Il est rapide, attentionné et inspiré. Et Anthony, un ancien du Saint-Amour de Jean-Luc Boulay, a élaboré l’un des plus beaux gâteaux en forme de cube Rubik.

Le minutieux Guillaume Couture, enseignant à l’École hôtelière de la Capitale, talonne Luca et Anthony, je trouve. Il cumule plusieurs victoires éclatantes, dont celle obtenue au premier épisode avec son Wellington de bison. Guillaume, 31 ans, a déjà œuvré dans les cuisines du Moccione de Luca Cianciulli, ainsi que dans celles du Toqué ! du juge Normand Laprise. Luca a aussi été formé chez Toqué !, et tout ce beau monde a déjà fraternisé autour d’un laminoir, c’est clair comme une sauce Mornay diluée.

PHOTO MARC-ANDRÉ LAPIERRE

Anthony Vien et Suzy Rainville

Après un départ tranquille, Sébastien Laframboise, 36 ans, chef exécutif à l’Assemblée nationale, ajoute régulièrement des récompenses à sa toque, dont son triomphe au dernier épisode grâce à ses agnolottis à la courge musquée et son carré de veau cuit dans une « pâte morte ». On apprend des techniques à tous les épisodes des Chefs !, c’est aussi amusant et stressant qu’instructif.

Malheureusement pour Suzy Rainville, 33 ans, cheffe copropriétaire du Baumann, à Sherbrooke, elle en arrache depuis quatre semaines et s’est battue deux fois en duel. Ça serait étonnant de la voir déclasser des concurrents plus stables comme Luca, Anthony ou Guillaume.

Ce n’est d’ailleurs pas une année faste et festive pour les cheffes. Ashley Thornton, 35 ans, a été évincée au tout début et Brenda Poirier, 31 ans, a été éliminée trois semaines plus tard. Ne reste que Suzy dans la compétition. Mais pour combien de temps ?

La formule des Chefs ! en affrontement, qui ramène – ou ramen, LOL – des candidats des 12 saisons précédentes (plus la recrue Collin Strohbach), a évidemment relevé le niveau des épreuves. Les duels n’ont jamais été aussi angoissants et cruels, particulièrement celui du bœuf Stroganoff, disputé à quatre personnes après le brunch gastronomique de la fête des Mères.

Cette pression a emporté Sidney Gordon, 34 ans, qui a accroché lui-même son tablier, lundi soir, citant notamment la compétition « très difficile ». C’est la première fois qu’un aspirant démissionne de son propre chef en 13 saisons. Sidney avait défendu sa place au duel à trois reprises, on s’entend que ça use les nerfs.

Au troisième épisode, Jean-Simon Petit, 38 ans, maître-charcutier de la Ferme des Quatre-Temps, a également quitté Les chefs !, mais pour des raisons médicales. Il souffrait d’une crise d’arthrose qui l’empêchait d’utiliser sa main droite.

PHOTO MARC-ANDRÉ LAPIERRE, FOURNIE PAR RADIO-CANADA

Sidney Gordon

Autre primeur de cette saison des Chefs ! : une collision dans l’atelier a fini par coûter la place à un cuistot, à cinq minutes de la fin du défi de gastronomie française. Dans un coup de feu, Brenda a accroché le plat de Sébastien et l’eau du bain-marie a complètement noyé ses crèmes brûlées. Comme une sauce gribiche, qui « splitte », personne ne souhaite ça à son pire ennemi.

La popularité des Chefs ! à Radio-Canada inspire visiblement les couples en difficulté de Si on s’aimait encore à TVA, une autre de mes grandes passions télévisuelles. Nous avons eu droit au spaghetti « lagendaire » de Guillaume, dixit sa copine Kathy. Nous avons eu droit au drame des épices italiennes et de l’origan pour la moussaka, la meilleure, de Madeleine et Michel.

Nous avons eu droit au poulet de Keven avec les bouts croustillants dont Stéphanie raffole. Puis, mardi soir, Gino et Christelle ont pratiqué une activité culinaire de rêve, le « donut BBQ », qui m’a redonné foi en l’humanité.

C’est quoi, exactement, ce truc ? C’est un petit bateau rond au milieu duquel trône un hibachi. Combiner nautisme et grillades, honnêtement, c’est aussi excitant que d’aligner parfaitement son axe tête-cœur-corps. Et vive les soupers du capitaine !