Évidemment que la traque du violeur aux cordons colorés n’allait pas se résoudre aussi facilement qu’avec l’intervention du SWAT et de l’équipe du GICCS qui poireautait, sur le gros nerf, dans une camionnette noire peu subtile.

Trop simple, trop prévisible. S’il y a une leçon à retenir de cette frissonnante troisième saison de Doute raisonnable à Radio-Canada, c’est que l’intrigue se retournera au moins deux ou trois fois avant sa résolution. D’ailleurs, le premier suspect qui apparaît dans la ligne de mire de la vaillante cellule d’Alice Martin-Sommer (Julie Perreault) est rarement le coupable.

Aviez-vous vraiment cru que le raciste et misogyne Alex Gravel (Jean-Moïse Martin) avait attaqué, seul, les joggeuses et récupéré les cordons de leurs shorts de sport ? Sur papier, il cochait toutes les cases du maniaque au mousqueton. En grande forme physique, employé du service d’urbanisme (il connaît les parcs !) et frustré de son remplacement par une jeune femme racisée, Alex Gravel flashait rouge pompier dans nos écrans.

Mais Doute raisonnable, c’est encore plus tordu, glauque et fucké grâce à l’auteur Pierre-Marc Drouin. Lors d’un interrogatoire extrêmement tendu et habile, Alice a joué dans la tête d’Alex Gravel en mettant en doute sa virilité et sa puissance. Cette scène d’affrontement psychologique a été écrite et jouée avec une précision remarquable.

Alex a craqué et dirigé les policiers vers l’appartement crasseux où il suspendait les cordons de ses victimes comme des trophées de chasse. Affaire classée ? Pas vraiment. À la fin de l’épisode de lundi soir, autre revirement : pendant qu’Alex Gravel avouait ses crimes à Alice et à son partenaire Fred (Marc-André Grondin), une joggeuse subissait une violente agression dans le même parc, frappée à coups de bâton de baseball.

Visiblement, Alex le détraqué opère avec un complice. Mais qui ? Tout de suite, j’ai repensé à Thomas Archibald (Max Lafferiere), 42 ans, l’ex-pompier recyclé en prof d’arts martiaux mixtes qui patrouillait dans les parcs dans l’épisode de la semaine dernière. Il a été écarté trop rapidement du radar du Groupe d’intervention sur les crimes à caractère sexuel (GICCS). Et lui aussi se plaignait de politiques d’immigration trop laxistes.

Le prochain épisode de Doute raisonnable, déjà en ligne sur l’Extra de Tou.tv, plonge dans la psyché du désaxé Alex Gravel, et c’est aussi épeurant que dégueulasse. Un détail important à propos de la sexualité déviante d’Alex poussera Alice et Fred sur une piste d’enquête prometteuse.

Le champion des fous furieux de Doute raisonnable demeure toutefois Yvan Belzile, qu’interprète avec brio François Papineau. Quel être épouvantable avec ses dents brunes, ses pulsions de tueur en série et son allure graisseuse. Chargés, les moments de confession entre Yvan et Alice évoquaient Mindhunter, l’excellente minisérie de Netflix dans laquelle des détectives du FBI interrogent longuement des assassins célèbres pour comprendre d’où provient leur folie et comment la détecter chez d’autres sociopathes potentiels.

Parfois, on avait l’impression de rejouer dans Le silence des agneaux quand l’agente Clarice Starling (Jodie Foster) tirait les vers du nez au dérangé DLecter (Anthony Hopkins).

Parlant de la mystérieuse Alice, lentement, elle se débarrasse de sa carapace, épaisse et froide. Elle a confirmé à Fred avoir subi un viol collectif. Et elle a baissé sa garde devant l’agent immobilier Rémy Deblois (Pierre-Yves Cardinal), à qui elle a révélé des choses que l’on entend rarement à la télé québécoise.

Alice n’a jamais « fait l’amour ». Elle n’a jamais eu de « vraie relation ». Elle est incapable d’être intime « sexuellement » avec un homme. Et elle doit toujours avoir le contrôle.

Les téléséries exposent souvent l’inverse, soit des personnages qui carburent au sexe débridé et qui enchaînent les conquêtes d’une nuit.

C’est d’ailleurs une mini-tendance d’abstinence qui se dessine cet hiver à la télé québécoise. Dans le téléroman Sorcières, de TVA, la journaliste d’enquête Joe Bussières (Céline Bonnier) a raconté à sa demi-sœur Agnès (Noémie O’Farrell) qu’elle n’avait pas eu de relations sexuelles depuis son adolescence, alors qu’elle fréquentait Luc Tougas (Stéphane Gagnon) à la commune de Sainte-Piété.

Parenthèse, ici : le lien génétique partiel entre le menuisier Luc et le bébé abandonné aux chutes ressuscite l’hypothèse voulant que Charlot, l’enfant qu’ont eu Luc et Joe il y a plus de 30 ans, ne soit pas réellement mort.

De retour à la chronique « sexe-conseil », en toute intimité avec mes 450 000 auditeurs, il y a aussi la procureure Gabrielle Laflamme (Ève Landry), d’À cœur battant, qui ne laisse entrer ni hommes ni femmes dans son lit. Cette possibilité n’est même jamais effleurée.

Christophe L’Allier (Roy Dupuis) n’a pas plus de vie intime, remarquez. Il y a tellement de gros drames à gérer dans À cœur battant qu’un problème matrimonial paraîtrait bien banal à côté d’un père de famille violent qui a eu le crâne défoncé à coups de canne de conserve.

Je lévite

Avec The Traitors sur Crave

La deuxième saison de la version américaine, tournée dans un château écossais, est savoureuse. Il s’agit, en fait, d’une partie géante de meurtre et mystère impliquant une vingtaine de vedettes de téléréalité, dont des Housewives, des gagnants de Survivor et des champions de Big Brother. Bref, des gens habitués de mentir et de magouiller. Comme dans le jeu de société Loups-Garous, les traîtres assassinent incognito des pauvres innocents et il faut les démasquer ! Karine Vanasse pilotera l’adaptation québécoise, Les traîtres, au printemps, sur les ondes de Noovo. Très hâte de visionner ça.

Je l’évite

La pub radiophonique de 1-877-KARS-4-KIDS

La cause est noble. Vous donnez votre vieille auto à cet organisme, qui vous refile ensuite un reçu fiscal (pour don de charité) de la valeur du véhicule. Super ! Mais la ritournelle qui accompagne les pubs radiophoniques de Kars 4 Kids est carrément insupportable. C’est quasiment de la torture. Après les premières notes de piano, on a le goût de hurler : prenez-le, mon char, prenez tout mon argent, mais épargnez mes tympans !