La série supernaturelle Manifest, qui m’a joliment secoué cet été, n’a pourtant pas plané très haut depuis son décollage sur les ondes de NBC, en 2018.

Cousine éloignée de Lost, Manifest a même été débranchée en plein vol après sa troisième saison, sans que le créateur puisse boucler toutes ses intrigues, qui devaient initialement se déployer sur une période de six ans. Bref, l’atterrissage d’urgence de Manifest a abandonné ses fans sur le tarmac, avec de lourdes valises remplies de questions.

Comme dans la saga de la vente d’Air Transat, un rebondissement imprévu a réactivé les moteurs en panne de cette télésérie aussi mystique que mystérieuse. En juin dernier, Netflix a mis en ligne les deux premières saisons de Manifest, qui raconte l’histoire d’un avion qui a disparu des écrans radars, entre la Jamaïque et New York, avant de réapparaître miraculeusement cinq ans et demi plus tard, avec les mêmes 191 passagers à bord.

Dans les semaines qui ont suivi son apparition sur la plateforme américaine, kaboom !, Manifest a fracassé des records de visionnement en se hissant dans le top 10 des contenus les plus regardés, comme Tiger King, Virgin River ou Ginny & Georgia. Ç’a été le phénomène Cendrillon de l’été. En français, vous trouverez les deux premières saisons de Manifest dans l’Extra de Tou.TV sous le titre Turbulences.

À la manière de Schitt’s Creek ou de Kim’s Convenience, Manifest a profité à fond de l’effet Netflix, capable de propulser au sommet des émissions qui n’ont pas tant cartonné à leur première diffusion. Avec son bassin de 209 millions d’abonnés payants (sans compter tous ceux qui partagent leur code d’accès), Netflix dispose de ce pouvoir incroyable.

Dans le cas de Manifest, l’offre en bloc de tous les épisodes – versus sa diffusion à la semaine sur NBC – a contribué à son deuxième essor. Manifest est une série touffue et complexe, à mi-chemin entre Lost et The Twilight Zone. En rafale, le fil conducteur ne se brise jamais. On peut bouffer tous les épisodes sans avoir à attendre un jour précis pour résoudre la grande énigme.

Sans crier au génie, je n’ai pas boudé mon plaisir en bouclant ma ceinture pour le voyage de Manifest. La prémisse est hyper séduisante. Un avion rempli de vacanciers traverse une zone de turbulences et, quand il se pose, cinq ans et demi se sont écoulés.

Tous les proches des voyageurs pensent (à tort) qu’ils ont péri dans un écrasement inexpliqué en plein océan Atlantique. Qu’est-il réellement arrivé aux passagers du vol 828 de Montego Air ? Personne ne comprend. Chose certaine, ils n’ont pas vieilli d’une seule journée. Et pour eux, ce vol n’a duré que quelques heures.

Mais pour leur famille, il s’est écoulé plus de cinq ans. C’est long, longtemps, quand on s’imagine que son frère ou sa conjointe sont morts dans un accident aérien. La réinsertion en société des miraculés du vol 828 se fait péniblement.

Autre aspect étrange dans la deuxième vie des « survivants » : ils entendent des voix qui leur ordonnent de faire des gestes très précis. Comme si une force supérieure les guidait dans l’accomplissement de gestes de bonté. Ce sous-texte quasi biblique – références aux versets et aux anges – agace parfois. Il reste que l’ensemble de la série nous accroche à la guérite de départ.

Pour le moment, Netflix n’entend pas rescaper Manifest et commander une quatrième saison, comme elle l’a fait pour les titres Lucifer et You, abandonnés par leur diffuseur d’origine. La pression à l’intérieur de la cabine demeure toutefois très forte, car les fans veulent savoir comment la série finira.

Affaire Pascale Nadeau, la suite

En récoltant des témoignages pour ma chronique sur le climat malsain au Téléjournal de Pascale Nadeau, trois sources m’ont confié avoir avisé verbalement leurs gestionnaires de cette ambiance de travail difficile. Des drapeaux rouges ont bel et bien été agités dans les dernières années.

Maintenant, est-ce que ces signalements sont remontés jusqu’à la haute direction de Radio-Canada ? Et si oui, pourquoi les patrons n’ont-ils pas tenté de juguler la crise à l’interne avant que ça ne dégénère en plainte officielle ?

Le diffuseur public refuse de commenter « les témoignages ou les situations spécifiques reliés au climat de travail du Téléjournal week-end ». Quant à l’arbitrage accéléré demandé par Pascale Nadeau, Radio-Canada affirme collaborer avec le syndicat pour hâter « le processus dans un souci d’équité pour les autres arbitrages en attente », dit le porte-parole de la société d’État, Marc Pichette.

Du côté syndical, de nombreux membres déplorent que leur président, Pierre Tousignant, porte à bout de bras la cause de Pascale Nadeau sans se soucier des travailleurs qui ont été victimes du climat malsain au Téléjournal.

Ces employés, qui exercent leur métier dans l’ombre (technicien, rédacteur, etc.), se sentent abandonnés, comme si ce qu’ils avaient vécu était moins important que la suspension d’un mois sans salaire de la cheffe d’antenne.

Le syndicat des travailleuses et des travailleurs de Radio-Canada « défend vigoureusement le droit à un environnement de travail sain ainsi que le droit à la confidentialité des plaignantes et des plaignants. Cependant, ce droit à la confidentialité ne peut justifier à lui seul ni l’opacité du processus d’enquête mené unilatéralement par la direction de Radio-Canada ni les mesures disciplinaires qui en découlent et qui nous paraissent excessivement sévères », soutient la secrétaire générale et trésorière du syndicat, Isabelle Montpetit.

Le syndicat juge que son rôle « n’est pas de trancher entre une version des faits ou une autre opposant des syndiqués entre eux, mais de soutenir les employés qui ont des droits à faire valoir, celui à un climat de travail sain, tout comme celui de contester une suspension jugée abusive ».

Vous remarquerez aussi qu’aucune tête d’affiche de l’information de Radio-Canada – j’en ai joint plusieurs le week-end dernier – n’a fait de sortie publique pour se positionner dans un camp ou dans l’autre. Le sujet est explosif et radioactif, peu importe la version qui est endossée ou crue.

Dimanche soir encore, des bandeaux annonçaient le Téléjournal avec Pascale Nadeau sur les ondes de RDI. Radio-Canada assure que ce problème technique avec les câblodistributeurs a été réglé.