« Football is life ! » Le football, c’est la vie ! Tel est le credo de Dani Rojas, joueur vedette du AFC Richmond, club de soccer anglais fictif de la série Ted Lasso, dont la deuxième saison a débuté vendredi sur Apple TV+.

À la suite d’un malencontreux accident – alors qu’il tire un pénalty contre Nottingham Forest –, Rojas découvre que le football peut aussi « être la mort ». Non, la comédie réconfortante mettant en vedette Jason Sudeikis (ex-Saturday Night Live) n’a pas changé de ton. Ou presque…

On retrouve Ted Lasso (Sudeikis), ancien coach de football universitaire (américain) à Londres, son fidèle coach adjoint Beard à ses côtés. Ce qui a changé, c’est que le AFC Richmond a été relégué de la Premier League à la deuxième division anglaise, le Championship. Et que le soccer prend moins de place dans l’intrigue.

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Jason Sudeikis dans la série Ted Lasso

J’avais dévoré l’an dernier la première saison de Ted Lasso, l’histoire d’un roger-bontemps moustachu du Kansas, jeté dans le bain du soccer professionnel européen alors qu’il n’y connaît rien. Scénario improbable pour un succès tout aussi improbable. La sitcom a valu à Sudeikis un Golden Globe et vient d’être nommée pour 20 prix Emmy, un record pour une nouvelle comédie.

La propriétaire du AFC Richmond, la récemment divorcée Rebecca, avait ses raisons – pas forcément louables – d’embaucher un tel néophyte au poste d’entraîneur-chef. Un an plus tard, comme bien d’autres, elle a succombé au charme vieille école de cet éternel optimiste à l’air bonasse, adepte de calembours, d’aphorismes et de références populaires.

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Cristo Fernández dans la deuxième saison de la série Ted Lasso, qui a débuté ce vendredi 23 juillet sur Apple TV+

La deuxième saison de Ted Lasso s’amorce alors que le club est au beau fixe. Plus personne ne conteste le leadership du coach dans le vestiaire. La presse, très hostile à son arrivée dans la capitale anglaise, ne le méprise plus ouvertement. Sauf qu’après sept verdicts nuls consécutifs en début de saison, il est peut-être temps de faire des changements.

Les Greyhounds comptent de nouveaux joueurs (parmi lesquels un Québécois !), mais c’est l’arrivée d’une psychologue du sport, la Dre Fieldstone, dont Ted se méfie, qui va le plus bousculer les habitudes du club et du coach.

La starlette Jamie Tartt, retournée à son club parent de Manchester City, participe à une téléréalité de type Occupation double célébrités. Son ex-copine Keeley travaille au service de marketing du club, dirigé par sa nouvelle confidente Rebecca, et elle est toujours en couple avec le rival de Jamie, Roy Kent, maintenant à la retraite.

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Brendan Hunt, Cristo Fernández et Jason Sudeikis

Lasso l’anticynique est plus gentil, affable, généreux et bienveillant que jamais. Parfois à l’excès. Derrière l’enthousiasme contagieux de ce joyeux drille verbeux se cachent des parts d’ombre révélées par les crises d’anxiété de la première saison. Cette vulnérabilité, comme celle de l’ensemble des personnages, sera davantage exploitée dans les nouveaux épisodes.

On a retenu, pour expliquer le succès étonnant de cette série, son humour bon enfant, ses bons sentiments, la légèreté pimpante de son intrigue, parfait antidote à la pandémie. Ce que confirme cette deuxième saison, c’est que la richesse de Ted Lasso tient surtout à l’ensemble de ses personnages, attachants, imparfaits et davantage au premier plan.

Ils représentent des archétypes. La blonde propriétaire, reine de glace, le coach candide, poisson projeté hors de son bocal, l’influenceuse exubérante, que l’on croit à tort écervelée, l’attaquant narcissique, qui fait passer ses intérêts avant ceux de son équipe, le dur à cuire bourru au cœur tendre.

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Hannah Waddingham joue le rôle de la propriétaire du club AFC Richmond.

Chaque personnage est pourtant moins caricatural qu’il ne le semble. Les auteurs, Bill Lawrence (Scrubs) en tête, se sont beaucoup amusés à déjouer les stéréotypes. Lawrence et Sudeikis recevront par ailleurs, la semaine prochaine, le prix de la meilleure comédie de l’année dans le cadre du volet anglo du festival Juste pour rire, Just For Laughs.

Mon personnage préféré de la série est Roy Kent, librement inspiré de l’ancien capitaine de Manchester United Roy Keane. Une blessure à un genou l’a forcé à la retraite et il ronge son frein en entraînant l’équipe de sa nièce de 9 ans… avec l’intensité et le vocabulaire d’ordinaire réservés à des professionnels.

C’est hilarant, tout comme l’avalanche de références à la culture populaire. John Stamos, Arnold et Willy, Tom Cruise, Renée Zellweger, Ted Danson, le litige de Pearl Jam contre Ticketmaster sont autant de prétextes à des blagues nichées, destinées à « des hommes blancs nés dans la première moitié des années 1970 », comme le précise lui-même Ted Lasso. Cette émission, en effet, semble faite sur mesure pour moi, biberonné à la culture américaine à l’adolescence et fan de soccer anglais.

J’ai ri tant aux références populaires qu’à celles sur le soccer, à propos de l’incompréhension de Ted devant un match contre Sheffield Wednesday prévu le samedi ou de la colère sourde de Roy devant un soi-disant « fan fini » qui soutient United ou City (les deux clubs de Manchester), « selon qui gagne ou perd ». En revanche, au sommet de ce qu’il y a d’invraisemblable dans cette série, et que l’on embrasse de bon cœur, il y a le soccer, plus près du calibre d’une ligue de garage que de celui d’une ligue professionnelle.

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Brendan Hunt, Jason Sudeikis et Nick Mohammed, dans la série Ted Lasso

On n’en tiendra pas rigueur à cette sitcom sans prétention, qui ajoute cette saison une couche de profondeur à ses personnages, versant parfois dans la comédie dramatique, sans toutefois forcer la note. Ted Lasso ne flirte d’ailleurs pas qu’avec la comédie dramatique. Un épisode au complet, délicieux, rend hommage à la comédie romantique.

« Je suis un communiste », dit Lasso à ses joueurs, intrigués. « Un rom-communiste », ajoute-t-il, avant d’élaborer une théorie vaseuse sur la vie et le sport qui, comme une comédie romantique, sont faits de revers et de creux de vague après le coup de foudre initial, mais finissent toujours bien.

Ce n’est pas encore la fin pour Ted Lasso, qui se conclura en principe au terme d’une troisième saison. D’ici là, il est possible de rattraper la première saison et de suivre la deuxième, à raison d’un épisode de 30 minutes le vendredi, pendant 12 semaines sur Apple TV+ (en français et en anglais). La plateforme est d’ailleurs accessible gratuitement si vous avez acheté un produit Apple dans la dernière année. Parce que le football, c’est la vie.