Il y a un paquet de trucs qu’un chroniqueur culturel n’écrit pas dans le journal à propos des vedettes de notre merveilleux monde du showbiz québécois.

Tel acteur super connu, si gentil dans ses apparitions télévisuelles, est vraiment le pire des trous de cul quand les caméras s’éteignent. Telle actrice sur le déclin blâme la vieillesse pour expliquer son absence du petit écran alors que plus personne à Montréal ne veut travailler avec elle en raison de son caractère exécrable.

Tel acteur chevronné pique des crises quand les vêtements de sa covedette sont placés avant les siens sur le support de l’habilleuse d’un populaire téléroman. Tel réalisateur refuse qu’un photographe autre que le sien le prenne en photo.

Ces anecdotes de divas, pas tant d’intérêt public, on les garde pour de grands portraits ou pour un futur livre qui ne verra jamais le jour.

Tous les producteurs et patrons en télé le répètent à micro fermé : un jour, ils publieront un bouquin explosif qui déboulonnera plusieurs monuments de l’industrie télévisuelle et cinématographique du Québec.

Ce livre d’anecdotes croustillantes se vendrait comme des petits Painchaud (Éloi ou Jonathan ?), dirait sûrement Jean Perron. Mais personne n’osera l’écrire. Parce que la colonie artistique québécoise est petite et tricotée serré. Parce que l’auteur du livre serait automatiquement expulsé du party et plus personne ne voudrait lui parler, ce qui n’est pas commode quand on est journaliste.

Et parce que cette culture du tabloïd n’est pas la nôtre. C’est très Britannique et Américain que cette obsession pour les photos prises sur le vif (sans maquillage, gasp !) ou pour les potins de stars qui n’allongent jamais de pourboire. Qui est le millionnaire le plus radin de Hollywood ? Cliquez ici pour le découvrir !

Délicieusement cynique, la série Flack d’Amazon Prime Video, Frime en version française, explore ces coulisses scabreuses du showbiz avec une ironie, une noirceur et un réalisme décapants. C’est une formidable série, trop courte, qui nous immerge dans une boîte de relations publiques spécialisée dans la gestion de crise de popstars, d’animateurs de téléréalité ou de sportifs professionnels.

En ligne depuis le 11 juin, la deuxième saison de Flack explore davantage le passé de ses personnages principaux, toutes des femmes surmenées au boulot, et pousse plus loin la réflexion sur la fabrication d’images complètement fausses – et trompeuses – dans le domaine du divertissement.

Qui croire maintenant que la moindre info passe à travers une série de filtres avant d’apparaître sur nos réseaux sociaux ? Plus personne. De nos jours, l’authenticité et la vérité se fabriquent dans les bureaux design de mercenaires à la Mirador, qui tirent chacune des ficelles.

Flack se déroule à Londres et suit un trio de relationnistes aux méthodes peu orthodoxes. L’héroïne Robyn (Anna Paquin de True Blood) en découd avec une dépendance à la cocaïne, aux amphétamines et à l’alcool. Ce cocktail ne l’empêche pas de se tenir bien droite dans ses escarpins. La fashionista Eve (Lydia Wilson, ma préférée) est aussi tranchante qu’un rasoir à six lames. Imaginez les dialogues d’Isabelle Langlois dans Lâcher prise, mais avec des sacres et des mots vulgaires et vous obtenez Eve, qui hérite des répliques les plus acides.

Et il y a Melody (Rebecca Benson), l’assistante de 25 ans encore émerveillée par le glam de cette industrie. Lentement, mais sûrement, Melody déchante sans toutefois perdre son éthique de travail, ce qui rééquilibre le trio qu’elle forme avec Robyn et Eve.

PHOTO TIRÉE D’IMDB

Caroline (Sophie Okonedo)

Leur patronne s’appelle Caroline (géniale Sophie Okonedo) et elle ferait passer Mme Lauzon (Véronique Le Flaguais) de Rumeurs pour une femme douce et adorable. Caroline sort ses griffes et les rétracte rarement.

Dans chacun des six épisodes de Flack, un client se met dans le pétrin (tweet raciste, enfant illégitime ou scandale sexuel) et les filles de l’agence MPPR volent à son secours. Le cinquième épisode – sur un total de six – raconte comment une page anonyme à la « Dis son nom » a détruit la réputation sans tache d’un présentateur de documentaires pratiquement à la retraite. Difficile de plus se coller sur l’actualité que ça.

Flack ressemble à Scandal, UnREAL et Ray Donovan. De plus en plus d’émissions s’affairent à lever le voile sur les pratiques douteuses de ce milieu encore mythique et merveilleux pour ceux et celles qui l’admirent de loin.

Le diffuseur de Flack, soit le géant Amazon, n’a pas toujours bonne presse, comme en témoigne le documentaire L’envers d’Amazon du Club illico. Au moins, Amazon double toutes ses séries au Québec. C’est déjà mieux que Netflix, qui préfère la version française de France, du coup.