Notre journaliste se balade dans le Grand Montréal pour parler de gens, d’évènements ou de lieux qui font battre le cœur de leur quartier.

C’est en grand que se prépare Mural. Si le festival a lieu du 8 au 18 juin, le public peut déjà voir l’œuvre phare de sa 11tenue.

Des airs, l’immense fresque gazonnée dévoilée lundi au pied du mont Royal est spectaculaire. Signée par l’artiste français Saype, elle reproduit deux mains tendues et entrelacées l’une dans l’autre.

Or, le public n’a que deux semaines pour admirer la peinture sur herbe, car elle est éphémère. Il faut savoir que Saype est une star de l’art urbain et un maître de la création d’immenses tableaux reproduits sur des canevas naturels à l’aide d’une peinture écoresponsable qui finira par s’effacer avec la végétation qui pousse.

Montréal n’est pas la première ville où Saype a eu accès à l’un de ses espaces les plus emblématiques. À Paris, en 2019, c’est sur le Champ-de-Mars, au pied de la tour Eiffel, qu’il a peint une première paire de mains soudées, ce qui allait lancer son projet de plus grande chaîne humaine au monde, qu’il a appelé Beyond Walls.

Voyez le projet

Montréal est la 19étape du circuit après Andorre, Berlin, Ouagadougou, Istanbul, Venise, Brumadinho, etc. Ensuite, la chaîne humaine se poursuivra notamment au pied des pyramides d’Égypte.

« C’est en suivant la progression de ses œuvres à travers le monde que Mural s’est dit qu’on devait faire partie du parcours et du dialogue », a déclaré lundi en conférence de presse Nicolas Munn Rico, président du festival Mural.

« Ses œuvres d’art, qui font la promotion de la cohabitation, de la coopération et de la paix dans le monde, sont des valeurs qui sont au cœur de Mural. Nous avons tout fait pour l’avoir à Montréal », a-t-il insisté au sujet de la présence de Saype dans la métropole et en invitant le public à immortaliser en images son œuvre de nature éphémère.

PHOTO CHARLES WILLIAM PELLETIER, LA PRESSE

Saype fait du land art.

J’espère que c’est quelque chose qui vivra dans votre mémoire pour longtemps.

Saype

« C’est tellement extraordinaire d’avoir une œuvre réfléchie en harmonie avec la nature », a pour sa part déclaré Ericka Alneus, conseillère de la Ville de Montréal dans Rosemont–La Petite-Patrie et membre du comité exécutif responsable de la culture et du patrimoine.

Elle a rappelé comment l’art urbain n’a pas toujours été considéré comme étant « noble », alors qu’un festival comme Mural fait aujourd’hui la fierté de Montréal. Elle a remercié Saype pour sa venue à Montréal et pour la force de son œuvre. « Aujourd’hui, tous les Montréalais peuvent se l’approprier. »

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L’artiste Saype, la conseillère de la Ville de Montréal Ericka Alneus et le président de Mural, Nicolas Munn Rico

Le parcours fascinant de Saype

Saype a pour sa part remercié tous les gens qui ont rendu sa fresque possible, de ceux qui ont entretenu la pelouse à son équipe rapprochée de quatre personnes.

Son parcours explique sa démarche au message rassembleur alors que le monde se polarise.

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Vue aérienne de la murale

Saype, né Guillaume Legros, a commencé à faire du graffiti à l’âge de 14 ans. Dès lors, il a eu la vocation de laisser une trace dans la société. Tout en continuant à peindre, il est devenu infirmier. Il a travaillé 10 ans dans un hôpital, et cela demeure une période de sa vie essentielle à son travail d’artiste. « Prendre soin des gens dans la société par le biais de l’art », expose-t-il.

Le monde de l’art et le milieu des galeries peuvent être déconnectés de certains remous sociaux, souligne celui qui vante l’importance de garder les deux pieds sur terre.

C’est de 2012 à 2015 qu’il a peaufiné sa recette de la peinture écoresponsable, nous a-t-il expliqué après la conférence de presse.

J’essaie d’avoir un impact dans la vie des gens, mais pas sur la nature.

Saype

En 2018, il a été bouleversé par un documentaire présentant des citoyens allant sauver des migrants sur la Méditerranée, soit les bénévoles de SOS Méditerranée. Cela lui a inspiré une œuvre à Genève d’une petite fille qui tend (ou qui récupère, c’est selon) un bateau.

L’œuvre a tellement eu d’impact – même sur le plan politique – que Saype a eu envie d’aller plus loin… et encore plus quand il a vu le coût du mur en milliards de dollars que l’ancien président américain Donald Trump voulait construire entre le Mexique et les États-Unis.

Ce fut alors une révélation de créer la plus grande chaîne humaine au monde comme antidote au repli sur soi.

« L’art peut faire bouger les choses », a-t-il déclaré lundi.

Importante logistique

Il a fallu quatre jours – de 7 h à 21 h – de peinture pour compléter la fresque sur l’herbe du versant est du mont Royal, au coin des avenues du Parc et du Mont-Royal.

« Comme j’utilise des pigments naturels, c’est beaucoup de logistique », souligne celui qui a bâti une banque d’images de quelque 2500 mains. De gens connus (le joueur de tennis Roger Federer, par exemple) et de gens croisés dans la rue pour mettre toutes les personnes au même niveau.

Si Saype est si ravi de sa première visite à Montréal, c’est justement pour la diversité et l’ouverture des gens. Il compte bien rester en ville pour le cocktail d’ouverture du festival Mural, jeudi.

Programmation de Mural : ce qu’il faut savoir

  • Du 8 au 18 juin avec le boulevard Saint-Laurent piétonnisé de la rue Sherbrooke à l’avenue du Mont-Royal, et même jusqu’à la rue Laurier pour le premier week-end.
  • La scène musicale déménage dans le Mile End à l’angle des rues de Gaspé et Bernard.
  • Parmi les musiciens attendus : Koffee, Moonshine, ASAP Ferg, Dinos, High Klassified, Rymz et NoKliché.
  • Quant aux artistes qui créeront des œuvres murales d’envergure, citons OSGEMEOS, Cleon Peterson, Lauren YS, Tima, Isaac Cordal et Egle Zvirblyte.
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