Toujours active, Françoise Sullivan a été danseuse, chorégraphe, performeuse, peintre, sculptrice et photographe. Il fallait la voir, samedi dernier, lors du vernissage de Pastels 1996-2004, l’exposition qu’elle présente chez son galeriste Simon Blais jusqu’au 15 juillet. Resplendissante, souriante comme toujours, et avec cette vivacité unique qui émane d’elle. Une artiste brillante au désir irrépressible de créer.
L’idée d’une œuvre murale consacrée à Françoise Sullivan émane d’Elizabeth-Ann Doyle, directrice de MU, qui crée des œuvres murales à Montréal depuis 2007. « L’été dernier, Valérie Plante est venue peindre sur la murale dédiée à Riopelle par Marc Séguin, dit-elle. Je lui ai dit que j’aimerais qu’on rende hommage à Mme Sullivan en 2023. Elle trouvait que c’était une bonne idée. »
En novembre dernier, Valérie Plante et Françoise Sullivan étaient assises à la même table, lors du bal du Musée des beaux-arts de Montréal. La mairesse s’est alors engagée à soutenir la création d’une œuvre murale.
L’œuvre devrait être créée sur la façade sud de l’édifice de la Place Dupuis qui loge l’hôtel Hyatt Place (ex-hôtel des Gouverneurs). Un contrat a été signé entre MU et le propriétaire de l’entreprise hôtelière. Françoise Sullivan est très heureuse du projet. « J’espère que la murale sera belle et qu’elle aura du sens », dit-elle.
Des discussions sont en cours entre MU et l’entreprise hôtelière quant au dessin à peindre. Des maquettes ont été élaborées par MU et Françoise Sullivan. Certaines reprennent le thème de Danse dans la neige, le solo qu’elle a improvisé en 1948 près d’Otterburn Park, que Jean Paul Riopelle avait filmé (mais le film a été perdu) et que Maurice Perron, également signataire de Refus global, avait immortalisé en le photographiant. D’autres font écho à sa pratique de l’abstraction.
« Pour le choix, on doit tenir compte de l’aspect éducatif dans l’espace public », dit Elizabeth-Ann Doyle. Et aussi du propriétaire, qui a toujours le dernier mot quant au choix de l’illustration retenue pour sa façade.
Place Dupuis fait partie d’un secteur avec un pôle d’art visuel assez fort. La murale permettra de participer à la revitalisation du secteur, ce qui colle bien à Françoise Sullivan, qui a toujours été dans l’innovation.
Elisabeth-Ann Doyle, de MU
Si tout se passe rondement, la réalisation de l’œuvre murale, qui durera un mois, débutera à la fin de l’été. MU a besoin des autorisations de l’arrondissement de Ville-Marie et de soutiens financiers publics et privés pour ce projet historique. « C’est une chance inouïe que Françoise puisse concevoir sa murale, dit Simon Blais. En plus, ce pourrait être la plus grande murale de tout Montréal. »
Consultez le site de MUUne expo virtuelle et un livre à la Galerie de l’UQAM
Mise à part l’œuvre murale, les honneurs à l’endroit de Françoise Sullivan viennent aussi de la Galerie de l’UQAM. Louise Déry, âme bénie de la galerie, vient de lancer une expo virtuelle et un ouvrage, Une ligne imaginaire, sur la période de création de Françoise Sullivan dans les années 1970, notamment en Italie. Des performances, de l’art conceptuel, de la photographie et de la vidéo. Activités qui illustrent la grandeur de la pensée créatrice de Françoise Sullivan, une artiste qui s’est toujours remise en question.
Françoise a été de tous les styles, de tous les courants, de toutes les générations depuis les années 1940. Cela fait beaucoup à raconter et il y a encore bien des histoires à sortir !
Louise Déry, de la Galerie de l’UQAM
Une nouvelle sculpture
Par ailleurs, Simon Blais célèbre Françoise Sullivan en faisant agrandir une sculpture en plexiglas qu’elle a créée en 1968. L’œuvre métallique en deux parties reliées par deux tiges fera 4,5 m de longueur et 2 m de hauteur. « Le sculpteur Michel Goulet m’a aidé, de la conception jusqu’à la soudure, dit-il. Françoise a visité l’atelier de découpe où la pièce a été montée, à Saint-Jean-sur-Richelieu. Elle était comme dans un magasin de bonbons ! Tellement contente qu’elle aimerait refaire de la sculpture ! »
La sculpture sera installée au Carré contemporain du MBAM à l’occasion d’une exposition d’œuvres récentes de Françoise Sullivan qui aura lieu du 31 octobre au 18 février prochain. Car Mme Sullivan peint encore et toujours ! Elle crée en ce moment les œuvres, dont de grands formats ( !), qui seront exposées au musée de la rue Sherbrooke, dans un commissariat de Florence-Agathe Dubé-Moreau.
Obtenez plus d’information sur l’exposition de Françoise Suyllivan au MBAMExpo chez Simon Blais
En attendant, il faut aller voir l’expo Pastels 1996-2004 avec des œuvres sur papier, certaines inédites, que Françoise Sullivan a créées lors de ses rares épisodes de pastels. Ceux de 1996 découlent d’un séjour en Grèce. Ils représentent notamment la nuit et la lumière de maisons dans la montagne. Des pastels magnifiques jamais exposés. Des œuvres qui ne sont pas des abstractions, mais des paysages, des visages, des cartographies, des rivages, les ondulations d’un étang, les vibrations de la lumière, les damiers d’une courtepointe. Telle l’incroyable courtepointe artistique de cette Montréalaise exceptionnelle dont la passion émeut, tant elle nous trace le chemin de la plus belle des libertés, celle de l’expression.
En reconnaissance de l’excellence de son travail, l’Université McGill célébrera Françoise Sullivan en lui remettant, aujourd’hui 6 juin, un doctorat honorifique. L’Université de Montréal fera de même en août pour saluer « la créativité exceptionnelle de cette artiste polyvalente ».