Depuis 20 ans, Michel Beaudry a créé un véritable parc zoologique : tortue, rhinocéros, oiseaux, chauve-souris, éléphant, crocodile, sanglier, ours, lynx, renard, chouette, bœuf musqué, carcajou, pangolin, porc-épic, scarabée, poissons, tatou, orignal… Des sculptures en acier, cuivre et céramique dont les contrastes semblent donner vie. Il choisit des animaux qui ont une charge mythique importante. Après les avoir sculptés, il les décore pour les personnaliser. « Avec eux, je raconte des histoires, dit-il. Ils sont ornés de textures et de dessins. Une maison, la forêt, des oiseaux, un train, etc. »
Michel Beaudry crée dans son atelier de Val-David. Il travaille sans plan détaillé, mais commence toujours par tracer au sol la silhouette de l’animal. « Ensuite, je lève le dessin et j’en extrais la troisième dimension. Cela donne une idée de l’espace que ça va occuper. » Il réalise une sorte de squelette avec des tiges métalliques, puis constitue le corps avec des plaques d’acier, cuivre ou céramique. Il utilise le découpage plasma, mais découpe ses plaques de cuivre à la main avec des ciseaux, ce qui prend du temps. La sculpture d’un animal représente environ un mois et demi de travail.
« La chose, la plus difficile à réaliser c’est le mouvement, dit-il. Avec par exemple les pattes en avant et en arrière. Tu veux que l’animal ait un élan. Donc parfois, tu dois recommencer une patte jusqu’à ce que tu sois satisfait du mouvement que tu obtiens. Actuellement, je suis en train de sculpter un loup à crinière, une espèce de canidé d’Amérique du Sud avec d’immenses pattes. Je veux le représenter en train d’avancer, avec une patte en l’air. L’acier te permet de travailler sur ce genre de défi. »
Le défi, c’est le moteur artistique de Michel Beaudry. Ex-sociologue spécialisé en informatique, il a commencé à sculpter en 2000. Influencé par sa compagne, l’artiste Bonnie Baxter, mais aussi par une envie de créer qu’il a toujours eue en lui. Un jour, il s’est lancé dans le recyclage de vieux disques durs pour créer une tortue ! « Comme je dis souvent, je n’ai pas pris ma retraite, je me suis moi-même recyclé ! dit-il. Comme j’ai toujours été un gars à projets, après la tortue, j’ai fait un rhinocéros puis un sanglier. Et j’ai continué ! »
L’exposition comprend des fleurs et des plantes greffées à des colonnes, et une volée d’oiseaux en céramique, sculptées depuis le début de l’année. Une vague d’oiseaux qui s’étend sur les murs de la salle et ajoute à l’impression d’un milieu naturel créé in situ.
Michel Beaudry a exposé plusieurs fois au MACLAU, l’ex-conservatrice du musée Andrée Matte aimant beaucoup son travail. Il a aussi présenté ses sculptures à Val-David et à Montréal, mais ne recherche pas à tout prix la visibilité. Il n’est pas représenté par une galerie, ne souhaitant pas adopter un rythme effréné de production. Il vend ses œuvres à des collectionneurs, au Québec et en Ontario. « L’écrivaine Monique Proulx m’a acheté une pièce et l’homme d’affaires Jonathan Wener [le fondateur de Canderel] en a trois », dit-il.
Ce solo de Michel Beaudry – réalisé à l’invitation du directeur général du musée, Jonathan Demers – fait partie de l’exposition Archéologies du vivant dans laquelle on trouve aussi les œuvres étonnantes de Reynald Connolly, qui aborde autant le sourire de l’être humain que ses travers les plus sombres. Un très beau travail également, à admirer lors de votre passage au musée de Saint-Jérôme.
Archéologies du vivant, au Musée d’art contemporain des Laurentides, jusqu’au 19 mars.