Le Musée des beaux-arts de Sherbrooke (MBAS) propose, jusqu’au 8 janvier, Éclipse, une exposition d’œuvres picturales et photographiques de Richard-Max Tremblay. Un regard sur les 40 dernières années de sa production qui s’accompagnera, dès mercredi, d’une rétrospective de ses fameux portraits à la Galerie d’art Antoine-Sirois de l’Université de Sherbrooke.

L’éclipse, c’est la disparition momentanée de la lumière. Notamment celle du Soleil, lors d’une éclipse lunaire. Mais pour Richard-Max Tremblay, le phénomène est une démarche récurrente, soit de jouer avec l’apparition et la disparition des choses, le non-vu et les obstacles qui empêchent de voir. Avec l’artiste, la commissaire Suzanne Pressé a sélectionné, pour cette expo au MBAS, des photographies et des peintures qui révèlent le schéma esthétique de cet artiste montréalais, espiègle du chatoiement et éclaireur des incertitudes.

À l’entrée de l’exposition, on tombe sur Fantasmagorie urbaine, grande huile sur toile qui évoque l’image floue d’une animation urbaine. En s’approchant, plus d’architecture, mais une habile construction de petits ronds peints. Un procédé trivial, mais tellement bien rendu.

PHOTO JEAN-MICHEL NAUD, FOURNIE PAR L’ARTISTE

Fantasmagorie urbaine, 2013, Richard-Max Tremblay, huile sur toile.

Les peintures de Richard-Max Tremblay ont du charme, une classe. Jamais tapageuse, sa palette navigue dans les ocres, les gris, avec une approche souvent en camaïeu. Ses couleurs douces donnent aux toiles un aspect suranné, parfois satiné comme pour sa série des Boîtes. Un minimalisme maîtrisé, un travail exquis de la lumière qui rappelle Pierre Dorion. Ses miroitements ont juste ce qu’il faut d’éclat. Une touche intime, feutrée telle qu’on la savoure dans Giardini, Jardins #1, Ombres à Venise, Loggia, ou encore Le mur, une œuvre de cette année, avec un jeu d’ombres et de rayonnements dans un espace vide, mais comme habité.

  • Boîtes #11, 2014, huile sur toile. Collection de l’artiste.

    PHOTO MUSÉE DES BEAUX-ARTS DE SHERBROOKE

    Boîtes #11, 2014, huile sur toile. Collection de l’artiste.

  • Berlin Glitch #1, 2015, huile sur toile. Collection de l’artiste.

    PHOTO FOURNIE PAR L’ARTISTE

    Berlin Glitch #1, 2015, huile sur toile. Collection de l’artiste.

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Autre œuvre intéressante, la peinture en quatre blocs, Berlin Glitch #1, réalisée après avoir observé une grue à travers la fenêtre d’une pièce, à Berlin. Une grue et une petite caméra de surveillance dont les déformations par le verre avaient été captées par son œil puis son appareil photo. Des années plus tard, il a transmis ces perceptions sur une toile.

Pour chaque œuvre, il a une stratégie, dit Suzanne Pressé. Richard-Max n’est pas un artiste à système. Le sujet détermine sa recherche. C’est pour ça que c’est puissant.

Suzanne Pressé, commissaire de l’exposition

PHOTO MUSÉE DES BEAUX-ARTS DE SHERBROOKE

À gauche, la commissaire de l’exposition, Suzanne Pressé, en compagnie de la conservatrice du musée, Frédérique Renaud, près de l’huile Deux chapeaux, de 2011.

On retrouve avec plaisir Seize fenêtres, une photographie de fenêtres opaques prise en 2008. Une réflexion sur la poussière éclipsant une réalité, empêchant la fenêtre de jouer son rôle de transparence, mais lui conférant une fonction de support. Au contraire de la photographie Puits où la fenêtre permet d’apercevoir une bâche ocrée qui gît sur un puits de lumière. Cette poésie du regard, on la retrouve aussi dans Le ciel à travers #1, une esquisse de l’azur à travers les mailles d’un chapeau de paille ! Magnifique.

  • Vue de l’exposition, avec Seize fenêtres, à gauche.

    PHOTO JEAN-MICHEL NAUD, FOURNIE PAR LE MBAS

    Vue de l’exposition, avec Seize fenêtres, à gauche.

  • Puits, 2009, impression à jet d’encre pigmentaire, 69 cm x 186 cm. Collection privée.

    PHOTO FOURNIE PAR L’ARTISTE

    Puits, 2009, impression à jet d’encre pigmentaire, 69 cm x 186 cm. Collection privée.

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Fascinant également de contempler ces jours-ci Trois personnages (à F. B.), une huile de 1998, tirée d’une photographie. Trois femmes placotent sur un banc à la Staatsgalerie de Stuttgart, devant un large triptyque de Francis Bacon. On sourit et on repense à la vente de Sotheby’s, le 14 octobre dernier à Londres, où un autre des nombreux triptyques du peintre britannique, Three Studies for Portrait of Henrietta Moraes, est parti pour 38 millions de nos huards.

PHOTO JEAN-MICHEL NAUD, FOURNIE PAR L’ARTISTE

Vue de l’exposition Éclipse au MBAS

Le musée présente six portraits photographiques de Richard-Max Tremblay. Yves Gaucher, Françoise Sullivan, Marcelle Ferron, Betty Goodwin, Charles Daudelin et Fernand Leduc, croqués dans les années 1980. Seulement 6, car, dès mercredi, la Galerie d’art Antoine-Sirois en exposera 84, répartis dans trois salles.

Quelques-uns des portraits exposés dès mercredi
  • Pierre Soulages, 1986, impression à jet d’encre pigmentaire, 43 cm x 56 cm. Paris.

    PHOTO FOURNIE PAR L’ARTISTE

    Pierre Soulages, 1986, impression à jet d’encre pigmentaire, 43 cm x 56 cm. Paris.

  • Josefina di Candia, 2014, impression à jet d’encre pigmentaire, 43 cm x 56 cm. Paris.

    PHOTO FOURNIE PAR L’ARTISTE

    Josefina di Candia, 2014, impression à jet d’encre pigmentaire, 43 cm x 56 cm. Paris.

  • ORLAN, 2014, Paris.

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    ORLAN, 2014, Paris.

  • Éliane Excoffier, 2008.

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    Éliane Excoffier, 2008.

  • Michel Legrand, 2008, Montréal.

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    Michel Legrand, 2008, Montréal.

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Une visite commentée des deux expositions, en compagnie de Richard-Max Tremblay, sera organisée le samedi 19 novembre. Pour s’inscrire, profiter de la navette offerte et de ce double déploiement savoureux de peintures et de photographies, il faut contacter le Musée des beaux-arts de Sherbrooke au 819 221-2115.

Consultez la page de l’exposition Éclipse