Ses portraits se vendent comme des petits pains chauds dans le monde entier. Ils sont parfois retenus pour la couverture de livres, notamment au Canada, en Allemagne, en Belgique et en Argentine. Le peintre lavallois Mathieu Laca, qui expose cet été à six endroits, au Québec et en Ontario, mène sa barque grâce à internet et quelques galeries depuis 23 ans. La Presse a rencontré l’artiste dans son atelier.

L’importance de l’école

Si Mathieu Laca, âgé de 40 ans, est devenu peintre, il le doit à deux enseignants du secondaire. Son prof de français, Jean Comeau, qui l’avait pris sous son aile alors qu’il en avait grand besoin, et Rachel Villeneuve, sa professeure d’arts plastiques. Il avait 17 ans et étudiait à l’école Curé-Antoine-Labelle, à Laval. Brillant participant à Génies en herbe, il s’était réfugié dans la littérature et aurait pu devenir astronaute. « Mais à partir du moment où j’ai découvert l’art, je me suis rendu compte que je n’avais plus besoin de taper des scores en math, dit-il. Je suis allé faire un DEC en arts plastiques à Lionel-Groulx, à Sainte-Thérèse, et ensuite un bac en arts visuels à Concordia. »

PHOTO FOURNIE PAR L’ARTISTE

Frida Kahlo I, 2016, huile sur lin, 36 po x 30 po

Depuis, il n’a jamais arrêté. Créant des installations, s’essayant à l’expressionnisme abstrait, au baroque, au figuratif chargé, voire provocant, exposant son corpus Porn is not art à la Patrick John Mills Contemporary Fine Arts Gallery d’Ottawa en 2011. Avec son style non conventionnel, Mathieu Laca s’est finalement orienté vers les portraits d’artistes réalisés à l’huile, avec des empâtements maîtrisés. Sa démarche évoque celle de Marion Wagschal, qu’il a connue à Concordia.

Il peint à partir de photos, surtout des musiciens et des écrivains, ayant plus d’affinité avec le monde musical et littéraire qu’avec celui des arts visuels. « Je choisis aussi des gens qui ont des têtes intéressantes, comme Samuel Beckett, dit-il. La ressemblance est souvent un tremplin, mais j’aime aussi faire référence à leurs œuvres ou à leur psyché. »

Année intense

PHOTO GUY L’HEUREUX, FOURNIE PAR MATHIEU LACA

Ukrainian Resistance, 2022, huile sur toile, 53 po x 72 po. Un enfant se défend contre un soldat russe avec un jouet qui lance un arc-en-ciel.

Grosse année 2022 pour Mathieu Laca avec des participations à quatre expos collectives au Québec. Une expo de grands formats, XL5, à la maison de la culture du Plateau-Mont-Royal, jusqu’au 14 août. Avec sa peinture engagée en hommage à l’Ukraine, car il a été très perturbé par l’invasion russe et les déclarations controversées du patriarche de l’Église orthodoxe russe sur l’homosexualité. « Le produit de la vente de cette peinture sera donné à un organisme ukrainien », dit-il.

Il fait partie de l’expo Battements présentée au Centre national d’exposition à Jonquière jusqu’au 21 août. Tout comme Collectif 2, à la galerie TNT, à Québec, jusqu’au 2 septembre, et une autre expo à la galerie Salon Art Club, à Montréal, en ce moment. Sans oublier que plusieurs de ses toiles sont exposées à la galerie Thompson Landry, à Toronto, et à la galerie Orange Art, à Ottawa. « Présent en même temps à Toronto, Ottawa, Montréal, Québec et Jonquière, je récolte ce que j’ai semé », dit-il.

Romancier

Ayant toujours aimé lire et écrire — jeune, il pensait faire arts et lettres —, Mathieu Laca réalise un rêve. Il publiera, l’hiver prochain, son premier roman, L’invention d’un visage. Un ouvrage planifié avec l’aide précieuse de l’écrivain Jean Barbe. « Je me pince encore car je ne réalise pas que je sois parvenu à l’écrire, dit-il. Il y est question de peinture et d’un phénomène inusité qui s’appelle la prosopagnosie, soit la difficulté ou l’incapacité à reconnaître un visage. » Mathieu Laca a fait une peinture pour représenter un portrait dont il est question dans son roman. Le portrait sera d’ailleurs en couverture du livre.

PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE

L’œuvre créée pour L’invention d’un visage.

Le confinement aura été positif pour lui car il a beaucoup écrit et vendu d’œuvres durant la pandémie. « J’ai vendu 60 toiles en un an, surtout des œuvres anciennes, grâce à mon site. Mon sous-sol s’est éclairci ! Actuellement, je vis sur ce magot. » Le prix des œuvres de Mathieu Laca varie entre 2000 $ et 20 000 $. Il a des collectionneurs dans le monde entier. Certains lui achètent régulièrement des œuvres. Parmi ses clients, citons l’acteur Josh Brolin, les écrivains Colin Broderick et Michel Tremblay, et l’humoriste Marc Labrèche.

Son atelier

L’atelier de Mathieu Laca est au rez-de-chaussée de son domicile lavallois. Il y travaille cinq jours par semaine, de 9 h à 17 h. « Mais ces derniers temps, j’écris le matin et je peins l’après-midi, dit-il. Ça fait plus de 20 ans que je peins. Je pense que j’ai plus de plaisir qu’au début. Plus tu as du métier, plus les idées viennent facilement. Tu fais une touche et tu sais ce que ça donne. Je n’ai jamais passé de grandes périodes sans peindre. Donc cette continuité me nourrit. »

  • Dans l’atelier de Mathieu Laca

    PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE

    Dans l’atelier de Mathieu Laca

  • Des amas de peinture séchée à la base d’un mur de l’atelier.

    PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE

    Des amas de peinture séchée à la base d’un mur de l’atelier.

  • Quelques œuvres plus anciennes de Mathieu Laca

    PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE

    Quelques œuvres plus anciennes de Mathieu Laca

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Depuis quelque temps, Mathieu Laca s’est remis au fusain. On en a vu plusieurs dans son atelier, notamment des dessins de son mari, Jean. Ses études et préparations pour des toiles sont des dessins délicats, expressifs. « J’adore fouiller la surface, accumuler les traits, dégrader la lumière et dégager des volumes pour faire apparaître des visages, écrit-il dans son infolettre. Un bâtonnet de fusain n’est qu’une brindille de bois brûlé. Mais ce qu’on peut en tirer de nuances me renverse ! Et je trouve la sobriété du noir et blanc absolument somptueuse. »

PHOTO FOURNIE PAR L’ARTISTE

Étude pour Jean IV, 2022, fusain sur papier, 24 po x 18 po

Consultez le site de Mathieu Laca

Quelques œuvres

  • Michel Tremblay, 2018, huile sur toile, 48 po x 48 po. Portrait acheté par l’écrivain et qui a été retenu pour illustrer, en 2019, la couverture de sa nouvelle édition des Chroniques du Plateau-Mont-Royal.

    PHOTO GUY L’HEUREUX, FOURNIE PAR MATHIEU LACA

    Michel Tremblay, 2018, huile sur toile, 48 po x 48 po. Portrait acheté par l’écrivain et qui a été retenu pour illustrer, en 2019, la couverture de sa nouvelle édition des Chroniques du Plateau-Mont-Royal.

  • L’écrivain américano-irlandais Colin Broderick, chez lui, devant un portrait de Samuel Beckett réalisé par Mathieu Laca

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    L’écrivain américano-irlandais Colin Broderick, chez lui, devant un portrait de Samuel Beckett réalisé par Mathieu Laca

  • Léon Tolstoï par Mathieu Laca

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    Léon Tolstoï par Mathieu Laca

  • Son portrait de Van Gogh retenu pour la couverture d’un roman en Belgique

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    Son portrait de Van Gogh retenu pour la couverture d’un roman en Belgique

  • Margaret Atwood​, 2018, huile sur toile, 48 po x 42 po

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    Margaret Atwood​, 2018, huile sur toile, 48 po x 42 po

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